les citations
drapeau n. m.
rural, vieilli ou vx Souvent au pl.
1. Nord, Pas-de-Calais, Maine-et-Loire, Centre-Ouest, Allier (nord), Saône-et-Loire (Mâcon), Franche-Comté (spor.), Lyon, Isère (La Combe-de-Lancey), Haute-Loire (Le Puy), Puy-de-Dôme (spor.), Creuse (Aubusson), Corrèze (Treignac) "toute pièce de tissu utilisée pour envelopper les bébés au maillot ; ensemble des langes (couche(s), et pièce de coton molletonné recouvrant le tout)". Avec ces nouvelles couches, plus besoin de laver des drapeaux ! (CartonPouletNord 1991).
1. Sans rien dire à personne, elle s’est mise à préparer sa layette, faire ses drapeaux. (A. Geaudrolet, Amours paysannes. Travaux et déboires sexuels d’une femme de la campagne, 1980, 50.)
2. À la fin de ce mois de juin, elle donna naissance à son treizième enfant, un garçon qui fut prénommé Emile, auquel on ne chercha ni parrain ni marraine éloignés […]. On l’enveloppa des mêmes drapeaux que ses prédécesseurs […]. (J. Anglade, Un parrain de cendre, 1991, 84.)
□ Dans un commentaire métalinguistique incident.
3. Ces jeunes mamans des années 50 ont de quoi s’émerveiller aujourd’hui devant les chauffe-biberons électriques, les poudres à dissolution instantanée et… les couches-culottes… car il fallait aussi aller laver les langes, les « drapeaux », au lavoir public. (J.-L. Clade, La Vie des paysans franc-comtois dans les années 50, 1993, 103.)
4. Sitôt terminé les soins du ménage que son mari lui laissait, elle passait son temps à tricoter des chaussons et des bonnets, à préparer des langes qu’elle appelait des drapeaux, avec de la laine de récupération et de vieille toile que lui fournissait sa mère. (J. Anglade, Un lit d’aubépine, 1997 [1995], 100.)
Haute-Loire (Saugues) "toute pièce de tissu réservée à l’usage du bébé ; petit drap".
5. La cousine Barny lavait chaque jour, et les « drapeaux » séchaient avec les pointes et les langes. (P. Chevrier, La Haute-Bigue, 1996, 112.)
2. Cher, Indre, Allier, Bourgogne, Franche-Comté (spor.), Rhône, Loire, Puy-de-Dôme (spor.), Creuse, Aquitaine "pièce de tissu souple et absorbant placée directement contre la peau, utilisée comme couche pour envelopper les bébés au maillot". – Il s’agit du petit drap de toile dont on enveloppe d’abord le poupon quand on le lange. Nous nous sommes servis pour cette question du mot local : le drapeau (ALLy 973*). Ce qui maintient lange et drapeaux ? (ALFC 1098*, question 3147). Drapeau sec (J. Anglade, Les Permissions de mai, 1992 [1981], 945).
6. Madame se souvient des draps qu’il nous avait fait couper pour faire des drapeaux quand les jumeaux sont nés ! (Les Cahiers bourbonnais du Centre, 116, 1986, 368.)
7. La ch’tite* Marie passa son premier hiver enfouie dans une brassière de linon recouverte d’une brassière de piqué, pliée* dans un drapeau, confectionné dans de vieux draps usagés pour qu’il soit plus doux, auquel on ajoutait un bourrasson* pour essayer de garder le bébé au sec. (S. Lavisse, Un siècle de vie à l’ombre de Tronçais, 1995, 77.)
8. La pauvre n’a pas la chance d’avoir un trousseau et elle manque de l’indispensable. Elle n’a même pas encore de drapeaux pour ce petit qui va naître en janvier. (M.-Th. Boiteux, Le Secret de Louise, 1996, 91.)
9. L’hiver venu, les Jarraud veillèrent avec leurs amis, les soirées où ils se retrouvaient seuls, la Louise tricotait des brassières ou ourlait des drapeaux […]. (S. Lavisse, Les Locatiers de Beauvoir, 1998, 26.)

encyclopédie. « Le drapeau est généralement la première pièce de tissu rectangulaire ou carrée qui enveloppait l’enfant. On en mettait souvent deux : le premier qu’on pliait en triangle, le deuxième qu’on laissait dans sa largeur » (ALFC 1097*). « Pièces d’étoffe, ordinairement carrées et d’environ 80 cm de côté, dans lesquelles on enveloppait le bébé. En général, la couche ou drapeau était en toile de lin ou de coton et collait au corps ; le lange, en étoffe de laine moelleuse et chaude, était superposée à la couche » (ALMC 1468*).
◆◆ commentaire. Les emplois cumulés (1. et 2.) de ce particularisme sémantique sont essentiellement relevés dans le Grand-Ouest et une large bande centrale, de la côte Atlantique à la Franche-Comté, d’où se détachent les aires Nord-Pas-de-Calais et Savoie. Ces emplois trouvent de surcroît leur prolongement dans le français d’Amérique du Nord (dep. 1659-61, FichierTLFQ ; MassignonAcad 1962 et CormierAcad 1999, avec bibliographie ; BrassChauvSPM 1990), en Suisse romande (GPSR) et, dans une moindre mesure, en Belgique (PohlBelg 1950). À cette distribution géographique (caractéristique d’un archaïsme) correspondent des densités d’emploi très variables ; la plupart des discours réfèrent à un passé récent dans le domaine de la vie domestique familiale et à des techniques d’habillage des nourrissons qui sont quasiment abandonnées aujourd’hui. Le nombre de lexiques attestant la permanence de cet emploi reste significatif ; v. encore les questionnaires des atlas régionaux où le terme « local » drapeau est utilisé pour obtenir le terme dialectal (ALLy IV, 119, Quest. ; v. carte 653) ou constitue le mot titre. 1. prolonge afr. drapel "morceau de drap", puis "vêtement" (Gdf), afr. drapiaux (pl.) "langes" (Roman de Thèbes, TL = TLF), mfr. et frm. drapeau "morceau d’étoffe (de laine) dont on enveloppe les enfants au maillot" (dep. Estienne 1538, FEW). Cet emploi est bien signalé et illustré dans la lexicographie française (Huguet ; Littré ; DG), il est marqué « vieilli » dep. Trév 1752 jusqu’à aujourd’hui, sans mention « région. » (Ø TLF ; Rob 1955 ; Rob 1987 ; Lar 1961 ; Lar [1982-1985]). 2. est surtout documenté à l’époque moderne, mais on peut relever des traces d’emploi ancien : "linges qui couvrent l’enfant sous le lange" (dep. Estienne 1538) ; il est toutefois difficile de suivre le développement de ce sens précis car la lexicographie a nettement privilégié le sens général (v. FEW) ; G. Massignon avance que « les glossaires cités emploient vraisemblablement lange au sens de couche » (MassignonAcad 1962, 632) et les informateurs eux-mêmes englobent souvent les deux référents sous une seule appellation ; 1., le mieux documenté, s’est sans doute imposé chez les glossairistes en cas de doute ou d’ignorance, 1. et 2. étant géographiquement imbriqués. On notera un affinement de la perception des référents chez les auteurs d’atlas régionaux, en comparant les traitements de ALF 1839 "langes" et celui des nouveaux atlas : ALB 1629 "couche du bébé" ; ALFC 1097 (mot titre) ; ALFC 1098* "couche" ; ALCe 824 "couche" ; ALJA 1345 (mot titre) ; ALMC 1467* ; ALLy 973 "couche".
◇◇ bibliographie. 1. FEW 3, 155a, drappus ; JBLGironde 1823 "linge dont on enveloppe le derrière des enfants" ; SaugerPrLim 1825, s.v. drape "tout ce qui sert à emmaillotter un enfant" pl. ; MègeClermF 1861 drapeau "petit drap à l’usage des enfants au maillot, lange" ; OffnerGrenoble 1894 "lange ; serviette, torchon" ; BoillotGrCombe 1929 "langes d’enfant" ; BrunetFrBourbonn 1964 "lange (sens ancien)" ; GagnonBourbonn 1972 drapeau, drapiau "lange" ; VincenzCombeL 1974, 36 s.v. pia "maillot de bébé" ; SabourinAubusson 1983 et 1998 "lange de coton" ; RézeauOuest 1984 "lange" « le plus souvent au pl. […] n’est utilisé que dans le discours sur un passé récent » ; DuraffHJura 1986 "lange triangulaire" « très usuel » ; JeanDurAnjou 1987 pl. "langes d’enfant" ; DucMure 1990, s.v. pia (dans la définition) ; TrouttetHDoubs 1991 pl. "langes" ; ColinParlComt 1992 ; DuchetSFrComt 1993 "linge, lange de bébé" ; PotteAuvThiers 1993 drape, drapeau "couche de toile fine pour langer" ; TamineChampagne 1993 « le terme n’est plus connu que des personnes âgées » ; RobezMorez 1995 « mot courant dans le Haut-Jura. Maintenant les jeunes utilisent des couches » ; SalmonLyon 1995 "couche, lange" ; QuesnelPuy 1996, 5, s.v. fate. 2. J. Marouzeau « Comment on parle chez nous », Le Creusois de Paris, [phot. d’art. non datée, ca 1952] drapeaux pl. "couches" ; GarneretLantenne 1959 "la première pièce de toile qui enveloppait le bébé" ; BridotSioule 1977 drapeau (syn. pointe) ; RouffiangeMagny 1983 « fr. rural » ; LagardeCérilly 1984 drapeau, drapiaux "couche située entre la pointe et les langes" ; GuichSavoy 1986 "couche du nourrisson" ; DesrichardSouvigny 1989 drapeau, (drapiau dans le sud de l’aire) "couche" ; BoisgontierAquit 1991 drapeau, drape "couche, linge fin dont on emmaillotte les bébés" ; TavBourg 1991 « usuel un peu partout, surtout en milieu rural » ; DubuissBonBerryB 1993 drapiau "couche" (le phonétisme signe un emploi marginal) ; CottetLyon 1996 ; PohlBelg 1950 "morceau de linge ; lange, loque, chiffon" ; MassignonAcad 1962 ; BrassChauvSPM 1990 "couche d’un bébé" Tant que je n’aurai pas levé le drapeau, je ne croirai pas que c’est un garçon ; GPSR "haillon" ; surtout au pl. "lange".
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.