boisson n. f.
1. 〈Loir-et-Cher, Loiret, Indre〉 vieillissant ou vieilli "liquide à boire obtenu à partir de marc de raisin auquel on ajoute de l’eau". Stand. piquette.
1. […] l’ouvrier agricole était un paria gagnant peu, de 300 à 450 francs par an, nourri
à la ferme, mangeant beaucoup de légumes – choux, betteraves, pommes de terre – comme
viande du lard, buvant de la boisson faite soit avec des rondelles de pommes, du marc de raisin ; un peu de vin marquait
les moments des foins, des moissons, des battages ; il couchait dans des soupentes
mal closes, malpropres, jamais chauffées, travaillant du lever du jour jusqu’au coucher
du soleil. (Cl. Rivals, Pierre Roullet. La vie d’un meunier, 1983, 73.)
2. Dans les grosses fermes beauceronnes, on arrosait copieusement le marc avant l’ultime
pressée, à l’eau du puits évidemment, et il en coulait de la « boisson ». (G. Boutet, Les Gagne-misère, 1985, t. 1, 71.)
□ Avec un commentaire métalinguistique incident.
3. […] boire sa chopine de « boisson » – du vin amplement mouillé d’eau […]. (G. Boutet, Les Gagne-misère, 1986, t. 2, 108.)
2. 〈Surtout Normandie〉"liquide à boire obtenu à partir de marc de pommes auquel on ajoute de l’eau ou cidre
mélangé d’eau". Va porter de la boisson à ton grand-père (BrasseurNorm 1990). Nous […] on faisait que de la boisson (SchortzSenneville 1998, 146).
4. […] le cidre, […] sous sa forme la plus usuelle, la « boisson » […]. (A. Frémont, Paysans de Normandie, 1981, 67.)
5. Après trempage, le marc est pressé à nouveau ; on obtient la boisson qui sera le cidre de consommation journalière de faible degré alcoolique (moins de
3,5°). (Témoin, région de Longny-au-Perche [Orne], dans A. Morin, M.-R. Simoni-Aurembou,
Le Perche à table, 1992, 95.)
— Dans les syntagmes petite boisson et bonne boisson (selon que la quantité d’eau est plus ou moins élevée).
6. […] la proportion d’eau est très variable selon les fermes. Il y a de la « petite boisson » et de la « bonne boisson ». (ALN, t. 1, 1980, 272*.)
7. […] un des agriculteurs retraités oppose au pur jus la petite boisson, ‘cidre coupé d’eau’ […]. (BougyMtStMichel 1999, 34.)
◆◆ commentaire. Emplois par restriction de fr. boisson "liquide qui se boit et contient de l’alcool" (dep. fin 13e s., v. TLF). 1. Attesté dep. 1741 en fr. de référence (Savary des Bruslons, v. FEW), et fin 18e s. en Saintonge (« barrique de boisson » MussetAunSaint 1929), boisson est aujourd’hui un archaïsme qui ne semble de quelque usage que dans le Centre (et
dans quelques points de l’Ain en un sens voisin "boisson [sic] constituée d’un mélange de vin et d’eau, préparée à l’avance" FréchetMartAin). – AnonymeHippolyteF ca 1800 s.v. aïgado « dans plusieurs départemens » ; PyotJura 1838, 335 ; PuitspeluLyon 1894 ; FertiaultVerdChal 1896 ; VerrOnillAnjou
1908 ; BerthierIssoudun 1996 ; FréchetMartAin 1998 ; FEW 1, 351a, bibitio. 2. Attesté en français dep. 1852 dans l’actuelle Seine-Maritime (« boisson, cidre auquel on a ajouté de l’eau » DecordeBray) ; 1903 au Havre (« Avez-vous du cidre à vendre ? – Oui, pas du pur, mais de bonne boisson », MazeHavre), ce sens est caractéristique de la Normandie (TuaillonRézRégion 1983 ;
LepelleyBasseNorm 1989 ; BrasseurNorm 1990 ; LepelleyNormandie 1993 ; SchortzSenneville
1998 ; FEW, loc. cit.) et des régions voisines (ALIFO 215).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : (2) Basse-Normandie, 50 %.
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