brisaque adj.
〈Nord, Pas-de-Calais, Champagne, Ardennes, Lorraine〉 fam. [Surtout d’un enfant] "qui casse, qui détériore les objets dont il se sert ou qui lui tombent sous la main,
par manque de soin". Stand. fam. brise-fer. – On ne peut pas lui acheter de beaux jouets : il est bien trop brisaque (TamineChampagne 1993). Enfants brisaques (G. B., Neuves-Maisons, Meurthe-et-Moselle, dans L’Est républicain, 8 novembre 1999, 115).
1. Il ne changeait pas souvent de chaussures, mon mari, il n’était pas brisaque. (Femme, env. 70 ans, originaire d’Épinal, 1er mars 2000.)
2. – Il [un enfant de 21 mois] commence à se calmer, il casse moins qu’il n’a fait.
– Le mien a déjà deux ans, mais il est encore un peu brisaque. (Dialogue entre deux pères, Nancy, parc de la Pépinière, 1er juin 2000.) — Emploi subst. Il réussit à tout casser, un vrai brisaque (LanherLitLorr 1990). Tu as encore démoli ton vélo ? Quel brisaque tu fais ! (CartonPouletNord 1991). Elle m’a encore cassé un verre. Quelle brisaque ! (TamineArdennes 1992).
3. En dehors des enfants, ces brisaques dont hélas ! les orteils grandissaient plus vite que l’esprit […], il était bien
vu, chez les hommes, de ménager jusqu’au dernier jour la paire de bottines à soufflets
étrennée le jour du mariage […]. (R. Collin, Les Bassignots, 1969, 92.)
4. Un vase fragile était à ses yeux [grand-mère] un objet « casuel » [= fragile], ce qui n’était pas une raison pour le « frâler » [= casser]. « Ah les brisaques ! » (R. Harrburger, Du pain avec du chocolat, 1995, 98.)
5. – Théophile [environ 18 mois] jette tout par terre, il casse tout. C’est un brisaque. (Vosgienne des environs de Remiremont, 25-30 ans, 18 octobre 2000.)
◆◆ commentaire. Ce type caractéristique du Nord et du quart nord-est de la France (et de la Wallonie),
sauf Alsace, qui a été relevé aussi fin 19e s. et début 20e s. dans le français pop. de Paris, dans le Centre et en Bourgogne (FEW), est sans
doute dérivé sur le radical de fr. briser "mettre en pièces", avec une finale analogue à celle de bredaque (FEW 1, 541b, brittus) et de foutraque. Attesté dep. 1792 à Bellevaux en Wallonie (« brisac, homme mal mis, déguenillé », RLR 14, 171, d’après FEW), et aujourd’hui recentré vers son aire d’origine, il n’est
pas pris en compte par la lexicographie générale. La rareté des attestations écrites
contemporaines dans la documentation (en dehors des glossaires régionaux) indique
que le mot appartient principalement au registre oral.
◇◇ bibliographie. MulsonLangresa 1822 brisac ; SaubinetReims 1845 ; MémAube 1868 brisac ; VermesseLille 1877 ; CunissetDijon 1889 ; FertiaultVerdChal 1896 ; PutonRemiremont
1901 brisac ; GuilleLouhans 1894-1902 ; RobRemiremont 1911 brizac ; MaugBagneuxHSeine 1936 ; ChaurandThiérache, 254 « vieilli » ; CrouvChampagne 1975 ; RoquesNancy 1979 brisac ; LanherLitLorr 1990 ; CartonPouletNord 1991 ; GuilleminRoubaix 1992 ; TamineArdennes
1992 ; MartinVosges 1993 ; TamineChampagne 1993 ; MichelNancy 1994 ; Gorcy MélLanher
1993, 73 (cite Theuriet, 1890) ; LesigneBassignyVôge 1999 ; FEW 1, 533a-b, brisare.
a C’est peut-être à cet ouvrage que fait allusion Champfleury [né à Langres], Pauvre Trompette, Paris, éd. des Cendres, 1846 [1989], 53 : « Passez vite à l’autre air, petits brisaques. – Brisaque, dans le dictionnaire néologique de la province, signifie un enfant qui
casse, qui détruit tout » ; comm. de P. Enckell.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Ardennes, Haute-Marne, 100 % ; Marne, 90 % ; Meurthe-et-Moselle,
Vosges, 85 % ; Aube, 80 % ; Meuse, 65 % ; Moselle, 0 %.
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