chocolatine n. f.
〈Surtout Hérault, Ariège, Haute-Garonne, Cantal (Massiac), Corrèze, Lot-et-Garonne, Gers, Hautes-Pyrénées,
Pyrénées-Atlantiques, Landes, Gironde〉 usuel "petite pâtisserie de pâte feuilletée (ou parfois briochée), roulée autour d’un bâtonnet
de chocolat qui fond à la cuisson". Stand. pain au chocolat.
1. Roland et moi, nous aimons cette entreprise. Nous voulons préserver cet aspect familial.
Cinquante ouvriers, pas davantage. Au-delà, ce serait « l’usine » ! 7 000 baguettes, 8 000 croissants et 7 000 chocolatines à l’heure : c’est l’objectif cette année. (Le Magazine de l’Ariégeois, juin 1991, 39.)
2. À la récré, on allait aux pissottes [= pissottières] avant d’acheter la chocolatine à la concierge. (SuireBordeaux 1991, 81.)
3. Figurez-vous que dans un collège de Fleurance [Gers], un fameux gang vient de sévir.
Le gang non de l’éclair, mais du pain au chocolat. Quatre garnements, faussaires d’occasion
et gourmands de routine, ont réussi, à l’aide d’un tampon dérobé, à fabriquer de faux
tickets de « chocolatine ». Un ticket, un pain. Même qu’ils en firent commerce. […] Sanctions, exclusion [sic, au sing.], plaintes, la route du pain au chocolat est désormais coupée. Au pain sec
et à l’eau, mes gaillards ! (P. Georges, Le Monde, 10 janvier 1997, 28.)
4. En fait, la boulangerie ne possédait pas de vitrine et s’ouvrait directement sur la
rue par un large présentoir en verre dans lequel […] s’alignaient tartelettes de toutes
sortes, croissants ou chocolatines. (P. Dessaint, Du bruit sous le silence, 1999, 29.)
□ Avec un commentaire métalinguistique incident.
5. Ce n’est que des chocolatines, des petits pains au chocolat, que j’ai. (Patron du Carpe diem, env. 50 ans, Montpellier, 29 octobre 1998.)
□ En emploi autonymique.
6. Le petit pain au chocolat n’est bon que tout frais et encore tiède, car dès qu’il
refroidit, le chocolat durcit et l’ensemble perd beaucoup de son charme. Il porte
aussi le nom de « chocolatine ». (La Table & ma Cuisine, n° 46, janvier 1982, 19.)
7. Si l’on veut acheter une baguette, ou – ainsi qu’on le dit ici [dans les Landes] d’un
petit pain – une « chocolatine », on se rendra là, en direction de Luglon. (É. Holder, En compagnie des femmes, 1996, 7.)
◆◆ commentaire. Formé sur frm. chocolat "substance alimentaire à base de fèves de cacao" (courant dep. 1740, TLF), à l’aide du suffixe ‑ine (dans le paradigme de frm. amandine "gelée comestible où entrent des amandes ou de l’huile d’amandes", dep. Lar 1898, FEW 24, 502b amygdala ; cf. TLF 9, 1295), le mot est absent des dictionnaires généraux (noter cependant
la mention fugitive de chocolatine "sorte de bonbon au chocolat" dans Lar 1899, première attestation du dérivé) et il n’est pris en compte par la
lexicographie régionale que dep. 1980 (première attestation du sens décrit ci-dessus).
Tout porte à croire que chocolatine est une innovation récente du français du Sud-Ouest dont le mot est caractéristique :
selon MoreuxRToulouse, « le mot et la chose ont dû s’introduire à Toulouse entre les deux guerres » (mais Ø SéguyToulouse 1950) ; ils étaient certainement connus à Tulle (Corrèze) en
1965 (témoignage de C. V.). L’ex. 6 ci-dessus témoigne de la dérégionalisation du
mot (cf. encore N. et C. Le Foll, Le Chocolat, Genève, 1996, 170 : « Disposer les chocolatines sur une plaque humide, les badigeonner au pinceau […] » et cette étiquette d’une boulangerie de Challans, Vendée, 21 juillet 2000 : « 4 chocolatines beurre 17 Fr »)a, dont seule une enquête d’ensemble permettrait de tracer avec précision l’aire d’emploi.
a Un document publicitaire, émanant d’une boulangerie de Clermont-Ferrand et distribué
dans les boîtes aux lettres de la ville, le 7 février 1997, indique : « […] Produits de l’Aveyron […] / pains de campagne aux recettes aveyronnaises […] / Fouace* aveyronnaise […] / Actuellement 8 chocolatines = 10 F […]. » On déduira sans peine de ce texte l’origine aveyronnaise du boulanger (ce qu’a confirmé
une demande de renseignements par téléphone)… et l’on attendra quelques années pour
voir si le mot s’est acclimaté dans le Puy-de-Dôme.
◇◇ bibliographie. DuclouxBordeaux 1980 ; SuireBordeaux 1988 ; BoisgontierAquit 1991 « usuel dans le Midi de la France » ; relevé sur une étiquette dans une boulangerie de Massiac (Cantal), le 7 octobre
1999, par J.-P. Chambon ; MoreuxRToulouse 2000 « régionalisme inconscient, d’usage quasi général. Cependant les informateurs les plus
âgés ne l’ont pas connu dans leur jeunesse, cette friandise n’existant pas alors » ; aj. à FEW 20, 63b, chocolatl.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Gers, Gironde, Landes, Pyrénées-Atlantiques, Hautes-Pyrénées,
100 % ; Lot-et-Garonne, 40 %.
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