décrotter v. intr.
Souvent fam.
1. 〈Champagne, Ardennes, Meuse (nord), Meurthe-et-Moselle (Nancy)〉 "manger vite et beaucoup". Stand. se gaver, s’empiffrer, pop. bafrer. – Qu’est-ce que j’ai décrotté ! (RoquesNancy 1979).
2. 〈Ardennes, Meuse〉 "travailler vite et beaucoup". Stand. pop. dépoter.
■ prononciation. Ardennes [dɛkʀɔte].
◆◆ commentaire. 1. Ce sens métaphorique de fr. décrotter "nettoyer (en enlevant la crotte)" (dep. le déb. 13e s., TLF) est attesté dep. 1807 dans le français de Paris (D’HautelBasLangage) ; absent
de Littré, il est accueilli dans les dictionnaires français contemporains, où il est
considéré comme « pop. et vx » (Rob) ou « pop. fam. » (TLF, qui ne cite qu’un exemple, tiré de L. Reybaud, Jérôme Paturot, 1842). Mais parallèlement à cette discrète pénétration du mot dans le français de
référence, ce sens est documenté également dès 1807 dans le français de Lorraine (« décrotter un morceau n’est pas français. Ne dites pas, Il a décrotté en un moment ce gigot » Michel), et il appartient toujours à l’usage familier d’une aire (d’où il est peut-être
originaire) à l’est de Paris, et qui a d’ailleurs été plus vaste naguère (v. Fertiault ;
Mâcon ; Gap) ; il a aussi été signalé en Normandie (TuaillonRézRégion 1983).
◇◇ bibliographie. MichelLorr 1807 ; RollandGap 1810 ; FertiaultVerdChal 1896 décroter ; Mâcon 1926 ; RLiR 42 (1978), 168 ; RoquesNancy 1979 ; StrakaProbl 1983, 52 et carte
« décrotter “manger avec grand appétit” dont l’aire dialectale et celle de son emploi en français sont identiques » ; TamineArdennes 1992 dècrotter ; FEW 16, 408b, *krotta. 2. est une innovation régionale, enregistrée seulement dans TamineArdennes ; aj. à FEW,
loc. cit.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : (1) Ardennes, Marne, Haute-Marne, Meuse (nord), 100 % ; Aube, 80 %. (2) Ardennes, Aube, Marne, Haute-Marne, Meuse (nord), 0 %.
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