entendre v.
Dans des loc. verb.
I. 〈Basse Bretagne〉 usuel entendre avec qqn loc. verb. "se faire gronder". Celle-là, elle va entendre avec moi !
II. vieillissant.
1. 〈Loire-Atlantique, Doubs〉 entendre dur "être dur d’oreille". Stand. être sourd. – À quatre vingts ans, il avait bon pied bon œil, mais il entendait dur (DromardDoubs 1991).
2. 〈Haute Bretagne, Morbihan, Mayenne, Sarthe, Maine-et-Loire, Vendée〉 entendre haut. "id.". Stand. être sourd. – C’était un bonhomme qui entendait haut (Femme, née en 1931, dans J. André et al., À Grand-Lieu, un village de pêcheurs, 2000, 197).
1. – Tiens, à Nantes, du côté de Sautron, soi-disant qu’il [sic] ont fait un bouligue [= bowling] !
– Un qui [= quoi] ? que demande le père Bredelout qu’entend un peu haut. (H. Bouyer, Presse-Océan, 30 janvier 1982, dans BrasseurNantes 1993.) 2. Alors, Théophile Maurille, curé de Reuille, eut un geste magnifique de lancer de filet
sur le lac de Galilée. Pour précipiter le dénouement, criant des ordres au général
qui profitait de ce qu’il entendait haut pour n’en faire qu’à sa tête, il lança un drap qui couvrit la branche. Ce linceul
enveloppa l’essaim et la tête ébouriffée de Kléber. (L. de La Bouillerie, Le Passeur, 1991, 61.)
3. 〈Meurthe-et-Moselle, Vosges〉 entendre sourd "id.". Stand. être sourd. – Parlez plus fort, il entend sourd (MichelNancy 1994).
3. – Quoi ? Je n’entends rien, depuis quelque temps j’entends sourd. (G. Remy, En cueillant les brimbelles, 1986, 59.)
◆◆ commentaire.
I. Tour caractéristique de Basse Bretagne, combinant l’emploi absolu du verbe (correspondant
à fr. entendre "recevoir une réprimande" et tu vas/il va, etc. m’entendre loc. phrast. exprimant une menace) et la préposition avec (v. à la nomenclature).
II.1. Mal prise en compte par la lexicographie générale (TLF « vx », sans exemple ; Ø Rob 1985) et par les relevés régionaux, cette locution est à rapprocher
de fr. (être) dur d’oreille (dep. 1788, Abbé Barthélémy, Frantext ; cf. afr. oïr dur, etc. FEW 25, 847b, audire et dur d’oüye, OudinCurFr 1640). Faute d’une enquête d’ensemble, l’aire réelle de son usage actuel
est incertaine ; elle est « usitée en Wallonie, mais vieillissante » (comm. de M. Francard). – VerrOnillAnjou 1908 ; BlochVosgesMérFr 1921, 129 « d’après le patois [sic], il [le français régional] dit : “entendre dur”, au sens d’être sourd » ; DromardDoubs 1991-1997 ; aj. à FEW 3, 193a, durus. 2. Locution caractéristique du français de l’Ouest, attestée à Rennes dep. 1891 (Coulabin),
que sa présence dans le français d’Acadie (NaudMadeleine 1999 s.v. haut) dénonce comme un archaïsme. Elle n’est pas prise en compte par la lexicographie
générale. – CoulabinRennes 1891 « locution très-populaire » ; VerrOnillAnjou 1908 ; BrasseurNantes 1993 « paraît largement répandu dans l’Ouest » ; GallenBÎle 1997, 16 ; FEW 24, 369b, altus et 25, 841-842a, audire. 3. Cette locution, qui semble caractéristique du français de Lorraine, n’y est pas attestée
à date ancienne. Elle n’est pas prise en compte par la lexicographie générale.
◇◇ bibliographie. LanherLitLorr 1990 ; MichelNancy 1994 ; MartinLorr 1995, 27 ; aj. à FEW 12, 453a, surdus (où cette locution manque).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : (I) Finistère, 100 % ; Morbihan 90 % ; Côtes-d’Armor, 65 %. (II.3) Vosges, 40 % ; Meurthe-et-Moselle, 35 % ; Meuse, Moselle, 0 %.
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