poutou n. m.
〈Surtout Rhône, Loire, Isère, Drôme, Gard, Hérault, Aude, Pyrénées-Orientales, Ariège, Haute-Garonne,
Tarn, Tarn-et-Garonne, Lot, Aveyron, Lozère, Ardèche, Puy-de-Dôme, Haute-Loire, Limousin,
Dordogne, Lot-et-Garonne, Gers, Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques, Landes, Gironde〉 fam. ou pop. "baiser (témoignage d’affection)". Stand. fam. bécot (vieilli), bisou (très usuel), mimi (moins usuel). Stand. région. mi*. – Un gros poutou ; faire un poutou. Je demande un poutou (Ch. Trenet, « Implorante la Plante », 1971, dans Le Jardin extraordinaire, 1993, 403). « Les poutous » de la maman (N. Calmels, L’Oustal de mon enfance, 1985, 108).
1. À peine avait-il franchi le seuil de la gare que des bras puissants le soulevaient
de terre, que trois poutous retentissaient. (R. Sabatier, Les Noisettes sauvages, 1983 [1974], 14.)
2. – Alors, pépé, tu le donnes [le panier], oui ! insista la petite fille en lui secouant
la veste.
– Je donne contre un poutou, dit-il. (Cl. Michelet, Les Palombes ne passeront plus, 1982 [1980], 21.) 3. […] il apporta une botte d’asperges sauvages aux Sœurs, espérant que la plus jeune,
sœur Madeleine, lui ferait un gros « poutou » en les recevant. C’était la plus jolie et elle sentait discrètement la violette.
(G. J. Arnaud, Les Moulins à nuages, 1988, 89.)
4. Je fais un poutou à Thomas et je pars très vite. (L. Pujol, Le Temps des fleurs, 1989, 116.)
5. Il se laissa faire, mais effaça de la main sur sa joue la trace du poutou qu’elle y avait mis, comme si c’eût été une bave de limace. (J. Anglade, La Soupe à la fourchette, 1996 [1994], 33.)
6. – Viens là, près de moi. Va, maintenant que tu es grand, tu me fais plus de poutous comme avant, tu l’aimes plus pareil, ta mémé. (J.-Cl. Libourel, Antonin Maillefer, 1997 [1996], 88.)
7. Elisabeth claqua des « poutous » bruyants sur les joues fraîchement lavées de Jeannot et de Julie […]. (H. Noullet,
La Falourde, 1996, 197.)
□ En alternance avec baiser.
8. – Antonin ! Oh ! mais comme tu as grandi, me dit-elle ce jour-là en me voyant passer
la porte. Mon Dieu, je sais pas si je peux encore te voler un poutou.
– Vous avez pas besoin de le voler, lui répondis-je, je vous le donne. Et je lui fis claquer deux sonores baisers sur les joues, à l’en faire rougir de plaisir. (J.-Cl. Libourel, Les Roses d’avril, 1998 [1997], 97-98.) □ Avec ou dans un commentaire métalinguistique incident.
9. Il l’embrassa avec emportement. Ses baisers, ses « poutous » claquèrent dans l’air. (Fr. Rey, La Haute Saison, 1986 [1984], 363-364.)
10. C’est ainsi, de ferme en ferme et de poutous en poutous (baisers) distribués sans trop d’avarice aux mémés comme aux tout petits, que nous
nous faisons adopter par l’ensemble des villageois. (J. Roger, Le Fils du curé, 1998, 52.)
□ En emploi métalinguistique. Un gros poutou comme on dit dans le Centre (R. Sabatier, Trois Sucettes à la menthe, 1972, 81).
11. Le groupe folklorique « Le poutou de Toulouse » (« poutou » signifie là-bas « bisou ») a fait une halte à Lingolsheim […]. (Dernières Nouvelles d’Alsace, 29 juillet 1998, ST 4.)
■ remarques. Comme le suggère l’exemple suivant, le poutou est parfois plus « appuyé » qu’une simple bise : « Tout gamins, ils se sont tenus par la main, ils se sont fait la bise puis le poutou lors des premières danses au bal du village » (M. Bénézit, La Voix des chaumières, 1999, 121).
◆◆ commentaire. Transfert de l’occitan poutou, de même sens (attesté dep. 1578 à Toulouse, SéguyToulouse), qui couvre l’ensemble
de la partie méridionale de la France. Son attestation en français, en avril-mai 1784
sous la plume de Mme Roland, où le mot revient à plusieurs reprises (DDL 19) ne permet pas une localisation
précise, mais on peut penser, comme le suppose l’éditeur de cette correspondance,
que l’auteur a pu entendre le mot de la bouche de son mari, qui « avait pu rapporter ce terme de Clermont-de-Lodève [auj. Clermont-l’Hérault, dans l’Hérault],
où il avait été sous-inspecteur de 1764 à 1766 ». La dérégionalisation de poutoua et sa pénétration en français standard familier (v. BernetRézeau 1995)b semblent quelque peu en cours, mais Rob 1985 est le seul des dictionnaires généraux
contemporains à l’enregistrer (« fam. (régional) »).
a Mais FleischJonvelle 1951 « mot du langage enfantin » est peut-être une création indépendante.
b Plusieurs exemples aussi dans le cédérom Le Monde, ainsi : « Notre président [de la République], donc, prit dans ses vastes bras une douce et belle
enfant du pays [d’Alsace]. Et en tout bien, tout (grand) honneur, il lui fit deux
gros poutous républicains » (P. Georges, Le Monde, 11 février 1999, 31).
◇◇ bibliographie. « Je vous embrasse tous bien fort un gros poutou à Bernardou qu’il me tarde énormément
de voir. Qu’il prie bien […] pour son papa […] » (2 novembre 1919, lettre d’un poilu du Sud-Ouest, dans G. Bacconnier et al., La Plume au fusil, 1985, 73) ; ALG 591 ; SéguyToulouse 1950 ; FleischJonvelle 1951 « mot du langage enfantin » ; PierdonPérigord 1971 ; BonnaudAuv 1976 ; NouvelAveyr 1978 « très courant » ; RLiR 42 (1978), 181 (Ardèche) ; DuclouxBordeaux 1980 ; MédélicePrivas 1981 « très courant, affectueux ; il est utilisé lorsqu’on parle aux enfants ou à ceux avec
qui on entretient des relations très amicales » ; KellerRussoBéarn 1985 ; CampsLanguedOr 1991 « partout » ; CampsRoussillon 1991 ; LangloisSète 1991 ; BoisgontierMidiPyr 1992 « mot familier et surtout employé en parlant aux enfants » ; CouCévennes 1992 ; MazaMariac 1992 ; ArmanetBRhône 1993 ; FréchetMartVelay 1993
« usuel » ; PotteAuvThiers 1993 ; FauconHérault 1994 ; PolverelLozère 1994 ; CovèsSète 1995,
dans la métalangue s.v. poutounécher ; FréchetAnnonay 1995 « globalement connu » ; MazodierAlès 1996 ; FréchetDrôme 1997 « bien connu » ; MoreuxRToulouse 2000 « connu de tous » ; SuireBordeaux 2000 ; FEW 9, 261a, *pott–.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Ardèche, Ariège, Aude, Aveyron, Corrèze, Drôme, Gard, Haute-Garonne,
Hérault, Haute-Loire (Velay), Lot, Lozère, Pyrénées-Orientales, Rhône, Tarn, Tarn-et-Garonne,
100 % ; Creuse, 90 % ; Dordogne, Haute-Vienne, 85 % ; Loire, 80 % ; Isère, 40 % ;
Ain, 30 %.
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