rattrouper v. tr.
〈Lorraine, Franche-Comté〉 usuel "faire venir en un même endroit (des animés) ; mettre ensemble (des inanimés concrets)". Stand. rassembler, réunir.
1. rural [L’obj. désigne des animés non-humains] Le chien rattroupe les moutons (R. Bichet, Contes de Mondon et d’autres villages comtois, 1975, 181).
1. […] un dindon qui épate ses femelles pour les rattrouper. (R. Vuillemin, Les Chroniques du « Chat bleu », 1975, 139.)
2. C’est à Poligny, paraît-il, qu’on réunissait autrefois, sur la place du pays, les
chèvres et les boucs de la région pour les mener au pâturage. On les rattroupait alors au son d’une corne spéciale qu’on appelait le cornet à bouquin. (R. Bichet, Racontottes de Franche-Comté, 1990 [1978], 131.)
3. Vers cinq heures, il fallait rentrer pour la traite du soir. Chacun [des jeunes bergers]
rattroupait ses vaches et regagnait la maison[,] heureux de sa journée. (R. Bichet, Un village comtois au début du siècle, 1979, 164.)
— Par restr. "ramener un animal dans le troupeau".
4. Les pâturages choisis étaient toujours assez grands pour faciliter la surveillance
et si une bête s’écartait du troupeau, par rotation et selon un ordre établi spontanément,
un berger la rattroupait. (R. Bichet, La Cancoillotte, 1987, 38.)
— Par ext. [L’obj. désigne des personnes] Emploi pron. réfl.
5. […] les jeunes appréciaient les maisons où le paternel savait se montrer tolérant
et où la table était toujours bien garnie ; dans ces cas-là, les jeunes gens « se rattroupaient » dans ces maisons […]. (GrandjeanFougerolles 1979, 250.)
2. [L’obj. désigne des inanimés concrets]
6. Il avait projeté d’acheter une machine qui en faisait cent paires par jour, mais le
temps de rattrouper les sous, les gens ne mettaient plus de sabots ! (H. Vincenot, Le Pape des escargots, 1972, 64.)
7. – […] On voit bien que vous n’avez pas vu ma sauce. C’est qu’il y a en a une belle
épaisseur avec le litre de pinard que j’ai versé dedans. Essayer d’y rattrouper les grumeaux c’est tout comme si vous tentiez d’attraper des alevins à la main sous
le barrage de l’usine ! (R. Vuillemin, Les Chroniques du « Chat bleu », 1975, 12.)
8. Elle, Mélie, pareille en cela à toutes les paysannes qui habitent nos villages, rattroupait ses mèches sous un foulard qui ne la quittait jamais. (J. Lazare, L’Ami Pouchu, 1988, 30.)
9. […] tout cela cuisait dans les coquelles* […] ou rissolait dans les poêlons. Aidée de l’Ernestine, l’Oreste « ratroupait » [sic] les braises ou remontait les crémaillères. (P. Arnoux, Les Loups de la Mal’Côte, 1991, 161.)
10. – Il va falloir se dépêcher de tout rattrouper. (Belfortaine, env. 50 ans, secrétaire, 8 octobre 1998, en parlant de bagages à préparer.)
◆◆ commentaire. De fr. attrouper "rassembler" (dep. 1205, v. TLF)a, et préfixe re-), rattrouper a été relevé dans le français de Lorraine où il apparaît dans quelques relevés régionaux
récents, mais surtout en Franche-Comté, où il est attesté dep. 1857, et dans la Suisse
romande voisine (dep. 1709 rétroper, Pierreh) ; il a aussi été connu autrefois en Berry (Jaubert). Le type lexical est
également présent dans les patois de ces régions et dans une aire plus large comprenant
les Ardennes et l’Isère (FEW). Absent des autres dictionnaires généraux contemporains,
rattrouper est relevé dans TLF s.v. re‑, sans marque diatopique, mais avec un exemple du Nancéien L. Febvre.
a Le verbe simple attrouper, que le TLF qualifie de « rare », ne l’est sans doute pas dans le cas de la Franche-Comté, cf. « L’enseignement [religieux] devient moins rébarbatif qu’autrefois et pourtant, les
prêtres n’attroupent pas la foule des enfants autour d’eux […] » (A. Nicoulin, Le Dessus du Mont, 1979, 121).
◇◇ bibliographie. MonnierJura 1824 rattroupé ; JaubertCentre 1864 les maisons de ce village sont rattroupées ; GasconDole 1870 ; BeauquierDoubs 1881 ; CollinetPontarlier 1925 ; BoillotGrCombe
1929 ; DondaineAuth 1976, 60 ; BichetRougemont 1979 ; TuaillonRézRégion 1983 (Franche-Comté) ;
DuraffHJura 1986 « très usuel » ; RobezVincenot 1988 ; LanherLitLorr 1990 ; DromardDoubs 1991 et 1997 ; ColinParlComt
1992 ; DuchetSFrComt 1993 ; MichelNancy 1994 ; RobezMorez 1995 « courant partout » ; JacquotChampagney 1998 ; LesigneBassignyVôge 1999 ; FEW 17, 398b, thorp.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Doubs, Haute-Saône, 100 % ; Jura, Territoire-de-Belfort,
65 %.
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