tantôt adv. et n. m.
I. Adv. 〈Surtout Calvados, Bretagne, Mayenne, Sarthe, Loire-Atlantique, Centre-Ouest, Indre-et-Loire,
Champagne, Franche-Comté, Rhône, Loire, Gironde〉 vieillissant "dans l’après-midi". Tantôt vers deux heures à la maison (Copie d’élève, sud du Calvados, dans BrasseurNorm 1990). On verra ça tantôt (TamineChampagne 1993).
— jour de la semaine/adv. de temps + tantôt. Le plus souvent au travail, […] ne prenant du repos que le dimanche tantôt et les
jours de fête (A. Poulain, Contes et Légendes de Haute Bretagne, 1995, 15). Il n’y a que le dimanche tantôt qu’on travaillait pas (Femme, née en 1939, dans J. André et al., À Grand-Lieu, un village de pêcheurs, 2000, 151). Demain/hier tantôt.
1. […] mon père, y disait que pour les opéras, ça qui compte, c’est d’entendre – Y savait
ben de quoi y parlait vu que jeune homme y faisait de la figuration [au Grand Théâtre]
le dimanche tantôt. (A. Burtin et al., Petites histoires en franc-parler. C’est pas Dieu poss !, 1988, 109.)
II. N. m. 〈Surtout Bretagne, Centre-Ouest, Indre-et-Loire, Eure-et-Loir, Loir-et-Cher, Allier, Saône-et-Loire,
Côte-d’Or, Haute-Marne, Franche-Comté, Haute-Savoie, Savoie, Ain, Rhône, Loire, Isère,
Drôme, Alpes-de-Haute-Provence, Bouches-du-Rhône, Haute-Garonne (Toulouse, vieilli), Ardèche (Annonay), Haute-Loire (Velay), Limousin, Dordogne, Lot-et-Garonne, Gers,
Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques, Landes, Gironde〉 vieillissant
1. "partie de la journée qui va de midi jusqu’au soir". Stand. après-midi. – En début du tantôt (G. Boutet, Les Petits métiers oubliés, 1987, t. 3, 178). Le tantôt, j’ai l’habitude de faire la sieste (ValMontceau 1997).
2. Un tantôt qu’elle passait devant la porte de mon atelier, je l’appelai. (Y. Viollier, La Mariennée, 1980, 67.)
3. – Tu fais du mouton maintenant ?
– Ouais, depuis le tantôt ! (J. Lazare, L’Ami Pouchu, 1988, 57.) V. encore s.v. rive, ex. 1.
□ Avec un commentaire métalinguistique.
4. Aujourd’hui se divise en deux parties à peu près égales : le matin et le reste, qui
s’appelle le « tantôt ». (Cl. Menuet, Une enfance ordinaire, 1992 [1972], 48.)
5. Ils arrivèrent à la Rouéchotte vers les quatre heures du « tantôt », comme on dit chez nous. (H. Vincenot, Le Pape des escargots, 1972, 299.)
6. […] il était cinq heures du « tantôt » (ainsi nommait-on la soirée, chez nous). (H. Vincenot, La Billebaude, 1978, 302.)
— ce tantôt loc. adv.
● "cet après-midi". Ça devait être pour ça qu’elles t’avaient pas vue ce tantôt (Bl. Depincé, Au Carillon de l’Ouest, 1975, 223). On me promet le rapport pour ce tantôt (J. A. Lion, Histoires de femmes, 1991, 255).
7. – […] ils sont partis.
– Quand ça ? – Ce tantôt. (P. Magnan, L’Aube insolite, 1998 [1946], 304.) 8. – Est-ce que vous voudriez me faire une petite lettre ?
– Bien sûr. Vous voulez qu’on la fasse tout de suite ? – Ma foi… Si vous pouviez me la poster ce tantôt […]. (B. Clavel, Les Fruits de l’hiver, 1968, 374.) 9. – En attendant, ce tantôt, le Léon pis moi on va charger la camionnette avec le matériel de camping […]. (M. Mazoyer,
Les Vacances des berthes, 1985, 35.)
10. – Et des fois que je n’aurais pas été à la maison ce tantôt ? (R. Furriel, Ceux de la Louvière, 1989, 120.)
11. Ce tantôt Albin sera reparti, t’en entendras pas reparler d’ici l’année prochaine. (Ch. Briand,
La Batteuse, 1991, 49.)
12. – J’irai donc passer un moment avec ta mère ce tantôt. (M.-M. Muller, Froidure, le berger magnifique, 1998 [1997], 66.)
● 〈Drôme〉 "ce soir". La journée n’a pas suffi, nous finirons ce tantôt (FréchetDrôme 1997).
— à tantôt ! "à cet après-midi !".
2. Par restr. "milieu de la journée". Stand. midi.
13. Comme très souvent le vendredi notre repas du tantôt s’est trouvé décalé par l’arrivée tardive de ma tante, retour du marché d’Amboise.
(P. Babault, Jeune Parisien chez les vignerons 1900, 1974, 93.)
3. 〈Côtes-d’Armor〉 (jusqu’) à tantôt "(formule d’adresse quand on se sépare)". Stand. à bientôt.
14. – Ce n’est pas le tout de causer, il faut payer aussi.
– Bah ! si on ne disait rien, on mourrait quand même. – On n’a que ça, vat ; sa goutte de café et dire un mot quelconque… Jusqu’à tantôt, tout le monde. (H. Pollès, Sophie de Tréguier, 1983, 34.) □ Avec un commentaire métalinguistique incident.
15. – Allons ! Je dois aller faire une tournée en campagne, il faut que j’aille atteler
mon cheval. À tantôt ! fit-il en soulignant dans un dernier petit rire entre les dents qu’il restait attaché
à cette forme locale de dire à tantôt ; il nous tendit la main. (L. Guilloux, L’Herbe d’oubli, 1984 [av. 1980], 101.)
— Par ellipse.
16. Villotin salue l’ouvrier agricole.
– Tantôt. (J. Le Clerc de La Herverie et B. Aubin, Porkopolis, 1984, 93.) ◆◆ commentaire.
I. L’emploi adverbial porte divers indicateurs d’usage dans les dictionnaires généraux
contemporains : « mod. » (Rob 1985 ; NPR 1993-2000), « fam. » (Lar 1985) ou « pop. » (DHLF), et seul TLF le marque comme un fait diatopique « Ouest et Centre de la France » ; Lar 2000 le donne sans marque. Il est, selon GrevisseGoosse 1993, § 966 g 3°, « prédominant dans la région parisienne » [par rapport aux sens "bientôt" (vieilli) et "à l’instant passé ou proche"]a, mais la situation est sans doute moins simple, comme l’observe Hanse 1994, indiquant
que ce sens « auquel se tient l’Académie en 1935 a été confirmé par plusieurs linguistes qui y ont
vu un usage parisien. Les Parisiens s’en défendent aujourd’hui et voient là un usage
provincial ». Seule une enquête d’ensemble permettrait d’établir l’aire de cet emploi adverbial
au sens ici analysé.
II. attesté dep. le 18e siècle dans les relevés différentiels et régulièrement enregistré dans la lexicographie
générale dep. 1872 comme un emploi marqué – « à Genève et dans plusieurs provinces » (Littré), « vx et pop. » (GLLF), « fam., régional » (Rob 1985), TLF « fam., vieilli ou région. (Ouest et Centre de la France) », NPR 1993-2000 « fam. et région. » –, cet emploi substantivé est principalement en usage (vieillissant, v. ici ex. 6)
dans deux vastes aires : à l’Ouest (de la Bretagne romane aux Pyrénées) et à l’Est
(de la Haute-Marne à la Provence ; et en Suisse romande, Pierreh). Il semble que le
nord de la France et une grande partie du Languedoc ne connaissent pas aujourd’hui
cet usage. La formule d’adieu (jusqu’) à tantôt, attestée dep. 1631 (à tantôt, Molière), présente encore au 18e s. chez Marivaux (1723 « Adieu, jusqu’à tantôt » et 1733 « Adieu […] ; à tantôt », Frantext), semble aujourd’hui sortie de l’usage standard (elle est consignée sans marque dans
les dictionnaires contemporains : GLLF à tantôt, sans ex. ; Rob 1985, avec ex de Molière ; TLF avec ex. de Nerval 1854 à tantôt), mais s’entend encore dans certaines régions, comme les Côtes-d’Armor.
a En usage à Toulouse, ces deux sens y sont considérés comme des « régionalismes inconscients » par MoreuxRToulouse 2000.
◇◇ bibliographie. « Tantôt, pour l’après-midi » LagueunièreAgde [ca 1770] n. ; LaRochelle 1780 n. ; Sauvages 1785 n. ; VillaGasc 1802 n. ; MulsonLangres
1822 n. ; PomierHLoire 1835 sur le tantôt ; GabrielliProv 1836 « c’est un adverbe de temps. N’en faites pas un nom » ; ConnyBourbR 1852 n. ; BourquelotProvins 1868 n. ; MoisyNormand 1887 n. ; OffnerGrenoble
1894 n. ; PuitspeluLyon 1894 n. ; FertiaultVerdChal 1896 n. ; GuilleLouhans 1894-1902
adv. et n. ; LambertBayonne 1902-1928 adv. et n. ; ClouzotNiort 1907-1923 n. ; VachetLyon
1907 n. ; BrunMars 1931 n. ; MaugBagneuxHSeine 1936 adv. et n. ; BrunetFranchesse
1937 n. ; DuraffVaux 1941 ; GarneretLantenne 1959 n. ; JamotChaponost 1975, 57 ; RLiR 42
(1978), 185 n. (Vendée, Savoie, Isère, Lyon, Drôme) ; GonthiéBordeaux 1979 ; RouffiangeMagny
1983 n. ; StrakaProbl 1983, carte 2 ; TuaillonVourey 1983 n. « usuel, […] régionalisme tout à fait inconscient » ; ArmanetVienne 1984 ; RézeauOuest 1984 et 1990 adv. et n. ; GuichSavoy 1986 ce tantôt ; MartinPellMeyrieu 1987 ce tantôt ; RobezVincenot 1988 n. (présenté erronément comme « adv. ») ; DufroidVienne 1989 ; MartinPilat 1989 adv. et n. « usuel à partir de 60 ans, en déclin au-dessous » ; BrasseurNorm 1990 adv. ; DucMure 1990 n. ; BoisgontierAquit 1991 n. ; VurpasMichelBeauj
1992 ce tantôt ; BlancVilleneuveM 1993 adv. et n. « usuel » ; BrasseurNantes 1993 n. ; FréchetMartVelay 1993 ce tantôt ; GagnySavoie 1993 n. « usuel » ; TamineChampagne 1993 adv. ; ValThônes 1993 ce tantôt ; VurpasLyonnais 1993 ce tantôt « bien connu » ; FréchetAnnonay 1995 ce tantôt « globalement bien connu » ; SalmonLyon 1995 ce tantôt ; SimonSimTour 1995 adv. et n. ; FréchetDrôme 1997 « usuel » adv. et n. « usuel » ; ValMontceau 1997 n. « fréquent […], toutes générations confondues » ; FréchetMartAin 1998 ce tantôt ; MichelRoanne 1998 adv. « bien connu » ; BlanWalHBret 1999 adv. et n. « très fréquent partout » ; ChambonÉtudes 1999, 237 ; MoreuxRToulouse 2000 « informateurs âgés » ; ALIFOms « La forme française [= standard] l’après-midi est connue partout, mais reste très concurrencée par le tantôt » ; FEW 13/2, 119a, tostus.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : I. Doubs, Morbihan, Haute-Saône, 100 % ; Finistère, 85 % ; Côtes-d’Armor, Jura, Territoire-de-Belfort,
65 %. II. Creuse, Drôme, Gers, Gironde, Isère, Landes, Rhône, Savoie, Haute-Savoie, Haute-Loire
(Velay), 100 % ; Haute-Vienne, 85 % ; Loire, 80 % ; Ain, Ardèche, 65 % ; Dordogne,
60 % ; Corrèze, 55 % ; Pyrénées-Atlantiques, 50 % ; Lot-et-Garonne, 40 % ; Hautes-Pyrénées,
0 %. (I. et II.) Charente, Charente-Maritime, Indre-et-Loire, Deux-Sèvres, Vendée, 100 % ; Vienne,
80 %.
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