baeckeoffe [bɛkəoːfə] ou [bɛkəɔfə] n. m.
〈Moselle (est), Alsace〉 usuel "ragoût de gros dés de bœuf, de mouton et de porc marinés au vin blanc, disposés en
couches alternant avec des pommes de terre et des oignons coupés en rondelles, que
l’on cuit longuement à l’étouffée dans un récipient en terre vernissée de Soufflenheim".
1. Quant au plat de résistance [d’un repas d’enterrement], comme il fallait qu’il résiste
à quelque quarante assaillants, tante Marie avait suggéré un baeckeoffe, maman avait protesté, c’était un plat du Bas-Rhin, tante Marie avait insisté, l’avantage
du baeckeoffe, c’est que, quand on en a fait pour quarante, il y en a pour quatre-vingts, et puis
ça épaterait la cousine du Havre et le cousin de Paris, c’est sûr que les Français
s’y entendent en cuisine mais ce n’est pas chez eux qu’on trouverait quatre sortes
de viandes dans un même plat, car le baeckeoffe c’est ça, c’est une marinade de bœuf, de mouton, de porc et d’oie que parfume le
riesling et qu’on fait mitonner dans des cocottes en terre sur un lit de pommes émincées,
c’est la plus alsacienne des potées, maman avait fini par se rallier, à condition
d’écarter l’oie et de se limiter à trois viandes, un repas funéraire se devait d’être
simple… Après le baeckeoffe, le munster, les tartes aux cerises, le café, le kirsch, la quetsche ou la framboise
apporteraient un ultime réconfort aux convives affligés… (J. Egen, Les Tilleuls de Lautenbach, 1979, 48-49.)
2. C’est dans cette ambiance que je grandis et que je me familiarise avec le fumet de
la choucroute, avec le jambon aux nouilles, avec les volailles au riesling à la sauce
ambrée, avec le baeckoeffe [sic] aux trois viandes (veau, agneau et porc), et avec la truite qui baigne dans son
beurre mousseux. (L’Encyclopédie de la cuisine régionale. La Cuisine alsacienne, 1981, 7, préface d’É. Jung.)
3. Il est des choses à ne jamais dire ni faire en Alsace. Par exemple, enquêter sur celui
qui cuisine la meilleure matelote ou le baeckoffe – potée aux trois viandes – le plus onctueux. C’est toujours votre interlocuteur,
même s’il est d’ascendance andalouse. (P.-M. Doutrelant, La Bonne Cuisine et les autres, 1986, 129.)
4. Mais, notamment dans le Haut-Rhin, le plat le plus somptueux reste le baeckeoffe. C’est aussi le plus typique. […] Il y a plusieurs recettes de ce « four du boulanger » (c’est la traduction exacte du mot baeckeoffe), selon les moyens ou l’approvisionnement. (R.-J. Courtine, La Cuisine des terroirs, 1989, 34.)
5. Le baekenofe ou potée aux trois viandes, se dispute avec la choucroute le titre de plat national.
C’est un délicieux mélange d’agneau, de porc et de bœuf, cuit à l’étouffée pendant
des heures au four (autrefois les ménagères trop occupées les jours de grande lessive,
portaient le plat – généralement en terre – à cuire dans le four du boulanger […]).
(Cuisine actuelle en décembre, n° hors-série, novembre 1990, 58.)
6. Fête paroissiale […] Après la messe 11h30 : L’apéritif sera offert sur le parvis […].
12h30 : Le baeckeoffe sera servi […]. (Construire ensemble. Bulletin de la paroisse du Christ ressuscité, Strasbourg, n°1278, 24 septembre 1993, 1.)
7. Les plats de tradition [dans un restaurant de Colmar] (baeckeoffe, palette, fleischnacka*, tripes au vin blanc) demeurent nos préférés. (Le Guide Pudlowski de l’Alsace gourmande, 1995, 42.)
8. Assortiment baeckeoffe / Paleron de bœuf, échine de porc, épaule d’agneau, pied de porc […] / le kilo 28
f 90. (Dernières Nouvelles d’Alsace, 18 octobre 1996, n. p. [Publicité].)
9. Le Bäckeoffe est un des piliers de la cuisine alsacienne traditionnelle. Ce plat complet, fort
en arômes et surtout consommé en hiver, doit mijoter longuement à chaleur lente et
régulière. (L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Alsace, 1998, 352.)
■ graphies et var.
1. En dehors de la graphie retenue en entrée comme la mieux établie, on relève baekenofe (ici ex. 5), baeckeofe (Le Monde sans visa, 17 janvier 1987, 15), bækeofe (Rob 1985), les graphies à l’allemande bäckeoffe (Rob 1985 ; ici ex. 9), bäkeofe (Rob 1985 et NPR 2000 ; Le Monde sans visa, 14 septembre 1991, 21) ou bäckoffe (Guide Bleu. Alsace, 1990, 113 et 115), à quoi s’ajoutent diverses formes qu’on considérera comme des
coquilles : baeckeoff (L’Est républicain, éd. Nancy, 4 juin 1988, 602), baekkofee (Le Monde Loisirs, 19 avril 1986, 23), bäeckoffe (Dernières Nouvelles d’Alsace, 18 mai 1996, RE 2) ou beakhoff (L’Est républicain, éd. Belfort, 7 avril 1998, 259). Dans les formes avec ‑n- (ici ex. 5 et LarGastr 1996, baekenofe ; Dict. de l’académie des gastronomes 1962, backenoff ; Ph. Dollinger, dans Guide bleu. Alsace, 1979, 47, beckenoffe ; Rob 1985 baechenoffe), ce ‑n- de liaison, correspond à des formes anciennes de masculin faible (voir infra).
2. À côté de ces formes, et notamment de celle retenue en entrée, diffusée à partir de
Strasbourg, on relève dans le Haut-Rhin des formes en ‑a, comme baeckeoffa (Dernières Nouvelles d’Alsace, 18 octobre 1996, TE 2) ou baeckaoffa (« Un baeckoffa de bonne facture et une bouillabaise quelconque », Le Petit Futé. Le Guide qui ose tout dire sur Mulhouse. Éd. 1983, s.l., 1983, 262).
◆◆ commentaire. Attesté dep. 1899 baeckeofe (HöflerRézArtCulin). Emprunt non adapté et non fixé, dont les diverses formes reflètent
la variation dialectale de l’alsacien de même sens (Béckenoffe SchmidtStrasbourg 1896 ; Beckenofen MartinLienhart 1907 ; par métonymie du sens de base "four du boulanger", attesté dep. 1344 bachofen, Himly). Le terme n’est guère en usage en dehors de l’Alsace, non plus que le référent.
◇◇ bibliographie. Rob 1985 et NPR 1993 (avec une définition qui renvoie à une réalité obsolète : « … cuit au four du boulanger ») ; NPR 2000 « région. ».
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Moselle (est), Bas-Rhin, Haut-Rhin, 100 %.
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