dégraisser v. tr.
〈Jura (Morez), Ain, Rhône (Lyon), Isère, Loire, Drôme, Provence, Ardèche (nord), Haute-Loire
(Velay)〉 usuel "nettoyer à sec (un vêtement, une pièce de tissu)". Stand. détacher. – Elle a fait dégraisser ses rideaux (FréchetMartVelay 1993).
1. Et voilà ! Mon abruti a trouvé le moyen de se verser un verre de vin sur sa braguette.
Et de son pantalon des dimanches, en plus ! […] Enfin, j’ai plus qu’à le mener dégraisser. (MeunierForez 1984, 83.)
2. Juliette pense que demain il va falloir aller chez le teinturier. La robe à dégraisser. (J.-N. Blanc, Hôtel intérieur nuit, 1985, 101.)
— Au part. passé/adj.
3. En attendant, j’entrai comme ouvrière à la teinturerie Robin : au repassage des vêtements
teints ou « dégraissés ». (M. Bailly, La Jarjille ; c’est la sœur du Piosou !, 1980, 68).
■ dérivés. dégraisseur n. m. "artisan qui nettoye les vêtements, les tissus". Stand. vieilli teinturier. « D’autre part, une dame interroge. Elle interroge le dompteur Hagenbeck. “Dans votre fauverie, lui écrit-elle, un lion a uriné sur ma blouse ; directement,
à travers les barreaux. J’ai dû aller chez le dégraisseur…” » (A. Vialatte, Chronique des grands micmacs, 1989 [1957], 107). Attesté dep. 1532 (« degresseur de bonnetz », Rabelais, Pantagruel, éd. V.-L. Saulnier, 1959, 162), ce dérivé sur dégraisser est considéré par les dictionnaires contemporains comme « techn. » (Rob 1985) ou, plus justement, quoique de façon restrictive quant à l’aire géographique,
comme « vieillia ou région. (lyonnais) » (TLF) ; GLLF « on dit auj. teinturier ». – GononPoncins 1984 « nos enseignes portent “dégraisseur” » ; FEW 2, 1282a, crassus.
a La base Frantext n’en donne pas d’exemple postérieur à 1933 (Giraudoux), mais v. H. Bazin : « […] Ta femme est sortie avec ton complet gris sur les bras : elle doit être chez le
dégraisseur » (Chapeau bas, 1982 [1963], 13) et « […] ce costume bleu […] qui devait […] passer chez le dégraisseur » (Madame Ex, 1989 [1975], 9).
◆◆ commentaire. Attesté en ce sens précis, sans marque d’usage, dep. 1779a, entré dans les dictionnaires dep. Lar 1870, ce verbe (par restr. de fr. dégraisser "ôter la graisse ou les taches de graisse", dep. le 13e s., v. FEW) est surtout en usage de nos jours dans la même aireb que dégraissage, même si les dictionnaires le donnent sans marque (TLF ; Lar 2000) ou l’affectent
d’une marque « techn. » (Rob 1985) ou « vieilli » (NPR 1993-2000) plutôt que diatopique.
a « simon. […] eh ! dis donc ? la besogne que je t’avois laissée est-elle faite ? m’as-tu dégraissé le dos de cet avocat ? Madame simon. Oui, on y a reporté ce matin. Simon. M’as-tu savonné le côté gauche de ce faraud qui fait toujours chapeau sous le bras ?
Madame simon. Y a beau temps. J’ai décrassé aussi le frac de ce Gascon » (Dorvigny, Janot chez le dégraisseur, 10 [fac-similé de l’éd. Cailleau, 1786, in H. Lavedan, Volange comédien de la Foire, Tallandier, 1933]) et « Madame Simon. Ah ! c’est que ces Messieurs-là, vois-tu se connoissent en dégraissage » (ibid., 11 ; comm. de P. Enckell).
b Pour un exemple dont le contexte est parisien, mais dont l’auteur a des attaches familiales
en Haute-Loire (Saugues), v. R. Sabatier, Les Fillettes chantantes, 1980, 46 : « Parfois, un homme qui ne possédait qu’un costume devait attendre chez le teinturier,
en chemise et en caleçon, que le vêtement fût dégraissé. »
◇◇ bibliographie. GononPoncins 1984 ; MeunierForez 1984 ; FréchetMartVelay 1993 ; FréchetAnnonay 1995 ;
RobezMorez 1995 ; SalmonLyon 1995 ; FréchetDrôme 1997 ; MichelRoanne 1998 « usuel ».
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
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