ficelle n. f.
I. 〈Lyon〉 fam. "chemin de fer à câble ou à crémaillère". Stand. funiculaire.
— Emploi non-comptable. Pour monter à Fourvière, j’ai pris la ficelle (VurpasLyonnais 1993).
1. […] un de ces vieux tireurs de lazagnes [= voleurs de portefeuilles] qui opèrent dans
la ficelle Croix-Pâquet […]. (M.-É. Grancher, Pas de bégonias pour Madame Dugommier, 1950, 157.)
2. Dans ma jeunesse, les patrons refusaient au personnel le remboursement de la « ficelle » [en note : funiculaire] quand il se rendait chez les canuts de la Croix-Rousse. (M.-É. Grancher,
Tout pour la tripe !, 1965, 27.)
3. Deux funiculaires avaient été installés pour monter de la ville. Tous deux fonctionnaient
pareillement avec un gros câble et par va-et-vient de deux cabines, l’une montant,
l’autre descendant. Les Croix-Roussiens ont très vite baptisé ces funiculaires du
nom de « ficelle », nom qui est resté jusqu’à leur disparition. Il y avait la ficelle à un sou, la plus vieille qui desservait le quartier de la soierie, Croix-Paquet,
puis la ficelle à deux sous reliant la rue Terme au boulevard de la Croix-Roussea […]. Le Maire a cru devoir nous priver des deux « ficelles » à la fois ! L’une, celle à deux sous, a fait place à un tunnel pour les autos. […]
Quant à notre vieille ficelle à un sou, elle a fait place au métro ! (Témoignage de Mme Marguerite, dans M. de Certeau et al., L’Invention au quotidien, 1994 [1980], t. 2, 180-181.)
a On lit en note : « Madame Marguerite fait une erreur. Le premier funiculaire fut celui de la rue Terme,
inauguré le 3 juin 1862 ; le second n’entra en fonction qu’en 1891. »
4. Deux hommes marchaient lentement sur le gravier, sur la terrasse de Fourvière. Ils
venaient de contempler Lyon, qui s’étendait sous leurs yeux. Ils se dirigeaient sans
hâte vers la petite gare du funiculaire, la ficelle. (P. Siniac, Folies d’infâmes, 1983, 181.)
V. encore s.v. allée, ex. 2.
□ Avec commentaire métalinguistique incident.
5. […] le jardin du pensionnat dont les gradins cascadent jusqu’aux toits du vieux quartier
Saint-Jean, longeant le rail de « la ficelle », le funiculaire de Fourvières. (F. Deschamps, Croque en bouche, 1980 [1976], 280.)
— Emploi comptable.
6. – […] allons bon, à bajafler [= bavarder] comme ça, je viens de manquer une Ficelle !
– Vous prendrez la suivante ! (A. Burtin et al., Petites histoires en franc-parler. C’est pas Dieu poss !, 1988, 26.) V. encore s.v. vogue, ex. 1.
II. 〈Picardie, Normandie〉 usuel "crêpe roulée, fourrée d’une sauce au jambon, fromage et champignons".
7. Ficelles picardes. Pâte à crêpe salée, ordinaire. Champignons cuits hachés ajoutés à une béchamel.
Sur chaque crêpe, placer une demie [sic] tranche de jambon, une grosse cuillerée de sauce aux champignons et un peu de râpé.
Rouler les crêpes […] et faire gratiner. (La France à table, juin 1964, 47b.)
8. La ficelle normande, crêpe au fromage et aux champignons […]. (H. Gault, Chr. Millau, Guide Julliard de Paris, 1970, 256.)
9. Ficelles picardes […]. Beurrer le fond et les parois d’un plat à gratin et y disposer les
« ficelles » côte à côte. (L’Encyclopédie de la cuisine régionale. La Cuisine Flandres-Artois-Picardie, 1979, 20-21.)
10. Quant à la ficelle picarde, crêpe au jambon dans une sauce aux champignons et au gruyère, il s’agit
d’une intruse, de création récente… (Pays et gens de France, n° 74, la Somme, 24 mars 1983, 12.)
11. Ficelle picarde et flamiche* voisinant [dans un restaurant de Péronne] avec la matelote d’anguilles et le canard
au poivre vert. (Le Monde sans visa, 13 avril 1991, 23.)
■ encyclopédie. Recette de « Ficelles picardes » dans L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Picardie, 1999, 172-173.
◆◆ commentaire. Ces deux sens ne sont pas pris en compte par la lexicographie générale.
I. Terme caractéristique de Lyon, où il est attesté dep. 1894 (« Longtemps on a dit la Ficelle tout court, parce qu’il n’y en avait qu’une. Aujourd’hui l’on dit la Ficelle de la
Croix-Rousse, la Ficelle de Saint-Just, la Ficelle de la Croix-Pâquet. Cette métaphore
diminutive et méprisante est admirable » Puitspelu)a, par méton. de fr. région. ficelle "câble ou système de traction du funiculaire" (documenté seulement dep. 1896 « Chemins de fer à ficelle » Ardouin-Dumazet, Voyage en France. La région lyonnaise, qui donne aussi le sens ici analysé « Le chemin de fer de la Croix-Rousse ou ficelle, premier funiculaire construit à Lyon », v. SalmonLyon 1995). Dans la Suisse romande proche, Lausanne connaît aussi ficelle, mais le terme fonctionne quasiment comme un nom propre, dans la mesure où il n’y
a jamais eu qu’une seule ficelle dans cette ville (comm. pers. d’A. Thibault).
II. Attesté seulement dep. 1957 (« Ficelle picarde (crêpe farcie jambon champignon) » Guide Michelin France, dans HöflerRézArtCulin). De ficelle "petite corde", par analogie de forme (cf. fr. ficelle "pain très mince équivalent à une demi-baguette").
a Déjà en 1870 dans cette attestation indirecte d’un ancien de la guerre de 70, naturel
du Ménil dans les Vosges, qui narrant sa mobilisation en 1870 à Oscar Bloch (BlochLex
1915, 158) lui dit qu’à Lyon, lui et ses camarades prirent [le tʃɛmĨt fjeː de lɛ fisɛl pu nɛla i kalveːr]. Bloch traduit ainsi : « le chemin de fer de la ficelle (train à crémaillère ?) pour aller au Calvaire ».
◇◇ bibliographie. (I)PuitspeluLyon 1894 ; VachetLyon 1907 ; MiègeLyon 1937 ; JamotChaponost 1975 ; SalmonLyon
1995 ; FEW 3, 878b, *funicella. – (II) NPR 2000 ; aj. à FEW 3, 878b-879a, *funicella.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
|