frotte n. f.
〈Surtout Lot, Limousin, Dordogne, Gers, Landes, Pyrénées-Atlantiques, Gironde〉 frotte (à l’ail/d’ail) rural, vieilli "morceau de pain frotté d’ail et imprégné d’huile d’olive ou tartiné d’un autre corps
gras".
1. Après son tour de promenade, mon père rentrait souper*. Le souper* était son principal repas. J’oublie de vous dire qu’avant de sortir, il faisait quatre
heures d’une frotte d’ail trempée dans l’olive [= huile d’olive], et d’un verre de vin blanc. (G. de Lanauve,
Anaïs Monribot, 1995 [1951], 28.)
2. Souvent le goûter se compose d’une frotte à l’ail : on frotte la croûte d’une tartine avec une belle gousse d’ail, on sale et c’est
un régal. Parfois on étend sur la mie une bonne couche de graisse d’oie et c’est encore
plus savoureux. (D. Lavaud-Ribette, Mœurs et coutumes actuelles dans un canton du Périgord [Saint-Astier], [1961], Lou Bournat, 1985, n° 4, 22.)
3. N’ayant rien fait cuire chez moi, j’ai fait comme autrefois mon pauvre père, j’ai
mangé une frotte d’ail arrosée d’olive. (G. de Lanauve, Les Mémoires d’Anaïs Monribot, 1969, 175.)
4. À la maison, il se contentait d’une soupe, d’une sardine, d’un morceau de lard ou
de boudin, d’une tranche de fromage italien ou d’une « frotte » à la graisse aillée. (M. Jeury, Une odeur d’herbe folle, 1989, 216.)
5. L’autre image [de la grand-mère] est celle d’une femme souriante qui me donne à goûter
chaque jour à quatre heures. Du pain, du fromage, une frotte à l’ail, un verre de vin sucré en été, des marrons grillés en automne […]. (Chr. Signol, Bonheurs d’enfance, 1998 [1996], 26.)
6. – Maman, une frotte…
[…] Ma mère, radieuse, coupait une croûte dans la tourte* de pain, l’enduisait d’ail, la recouvrait de beurre et me servait ce régal […]. (M. Peyramaure, Un monde à sauver, 1996, 48.) ■ synonymes. 〈Dordogne, Lot-et-Garonne, Gironde〉 frottée à l’ail loc. nom. f. GonthiéBordeaux 1979 ; DuclouxBordeaux 1980 ; TuaillonRézRégion 1983 (Bordeaux) ;
TLF (avec exemple de Chérau [né à Niort], non daté, repris de GLLF).
◆◆ commentaire. Si frotee d’oignons est documenté à date ancienne (peut-être 16e siècle) et sans indication de localisation (« Mangeant leur lard bien jaune et rance Avec une frotee d’oignons » Blason de le In exitu Israel, dans Gdf), la lexie frottée à l’ail/d’ail a été relevée, au tournant des 19e et 20e s. dans quelques aires : à l’Ouest (Deux-Sèvres, Chérau dans GLLF ; Charente-Maritime,
v. MussetAunSaint 1932, Issouduna dans FEW ; à l’Est (Saône-et-Loire : GuilleLouhans 1894-1902, FertiaultVerdChal 1896).
Si elle semble sans continuateur dans cette dernière aire, elle s’est en revanche
maintenue dans le Sud-Ouest. La lexie frotte (d’ail), documentée dep. 1899 dans le français de Dordogne (« Avec ça, je mangeais des frottes d’ail » E. Le Roy, Jacquou le Croquant, Paris, L.G.E., 1985, 101 ; v. encore LaMazillePérigord 1929, 314) et relevée à Baignes-Sainte-Radegonde
(Charente) dans MussetAunSaint, est en usage dans une aire à peu près identique. Si
la première est un emploi subst. par ellipse de tranche/tartine de pain frottée d’ail, la seconde est probablement un déverbal de fr. frotter (plutôt qu’une adaptation d’occ. freta, comme l’indiquait Boisgontier).
a R. Guignard, Glossaire du Bas-Berry. Région Issoudun-Vatan, 1924, avec ce commentaire : « L’amateur de frottée à l’ail ne peut que mépriser la pâtisserie ».
◇◇ bibliographie. MussetAunSaint ; PierdonPérigord 1971 ; DuclouxBordeaux 1980 ; BoisgontierAquit 1991 ;
FEW 3, 787a, frictare.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Gers, Gironde, Landes, 100 % ; Corrèze, Dordogne, 90 % ;
Creuse, Haute-Vienne, 55 % ; Pyrénées-Atlantiques, 50 % ; Lot-et-Garonne, 20 % ; Hautes-Pyrénées,
0 %.
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