pète n. f.
〈Drôme, Hautes-Alpes, Provence, Gard, Hérault, Aude, Lozère〉 fam. Souvent au pl.
1. "fiente globuleuse de certains animaux". Stand. crotte. – Pètes de chèvre, de mouton.
1. – Ensuite, dit l’oncle, je crois que nous pouvons compter [comme gibier] sur des lapins.
– Oh oui, dis-je. Il y en a même près de la maison. Ils ont fait leur cabinet près du gros amandier. C’est plein de pètes. (M. Pagnol, La Gloire de mon père, 1995 [1957], 94.) 2. À la fin de la saison [de transhumance], les routes empruntées sont reconnaissables,
bien sûr, par les « pètes » qui les recouvrent, mais surtout par ses [sic] « ribes » [= bords] que les bêtes ont pelées au passage […]. (P. Roux, Contes pour un caganis, 1983 [1978], 48.)
3. François partit en reconnaissance […]. Il en revint en disant que trois gros masclasses
[= lièvres] y faisaient des pètes (crottes) fraîches. (M. Scipion, L’Arbre du mensonge, 1980, 249-250.)
□ En emploi métalinguistique.
4. Elle [la chèvre] ne fait pas des bouses mais des chapelets de crottes sèches, moulées,
qui ressemblent à des grains de café. On les nomme des « pètes ». Des « pètes » de chèvre. (R. Barjavel, La Charrette bleue, 1989 [1980], 77.)
— Dans la comparaison noir comme une pète "très noir". Un grand garçon noir comme une pète (Th. Monnier, Madame Roman, 1998 [1957], 53). À force d’aller à la mer, elle est noire comme une pète (BouvierMars 1986).
— ne pas se prendre pour de la pète/pour une pète (+ compl. déterminatif) loc. verb. fig. "se considérer comme quelqu’un d’important" (LangloisSète 1991). Stand. pop. ne pas se prendre pour une merde.
5. – Se fout de nous ! […] Se prend pas pour de la pète de bique et pète plus haut que son cul. Sacré couillon*, va ! Pire qu’un député. (P. Sogno, Le Serre aux truffes, 1997 [1993], 138-139.)
2. Par anal. pètes de rat loc. nom. f. pl. vieilli "bonbons de réglisse".
6. La maison Florent fabriquait une sorte de bonbons de réglisse vendus dans des boîtes
rondes, que tous les enfants du Midi désignaient, à cause de leur forme et de leur
couleur, sous le nom de « pètes de rats ». J’en ai mangé ma ration… (R. Barjavel, La Charrette bleue, 1989 [1980], 77.)
◆◆ commentaire. 1. Emprunt au pr. (peto "crotte, crottin, fiente de certains animaux" AchardMars 1785 ; cf. ALP 759* ‘crottes de brebis’ et ALLOr 520 ‘id.’), avec adaptation phonétique, documenté dep. 1908 dans le français de Provence (« plus noire qu’une pète (un crottin de chèvre) » et « pètes d’âne » J. Aicard, L’Illustre Maurin, Paris, Ernest Flammarion, 202 et 297) et non pris en compte par les dictionnaires
généraux contemporains ; le pètes f. pl. "excréments de chèvre", relevé près de Malmédy, en Belgique (BSLW 50, v. FEW) est évidemment une création
indépendante. Le sens 2, par analogie plaisantea, est absent de la lexicographie générale et des relevés régionaux.
a L’image est connue sous diverses lexies, ainsi CunissetDijon 1889, 124 « Guilles de ratte, crottes de souris, nom d’un petit bonbon rond à la réglisse » ou G. Sore, Entre Dune et Bassin en 1900, 1973, [44] : « Et les “crottes de rat” ? Réglisse en petits bâtonnets. »
◇◇ bibliographie. Cf. VillaGasc 1802 en des sens proches : « pète, crotte : boue détrempée, ordure qui s’attache au bord des robes et des habits […].
La crotte qui s’attache au poil des bœufs, des brebis, des chiens barbets » ; BrunMars 1931 ; BouvierMars 1986 ; BlanchetProv 1991 ; CampsLanguedOr 1991 ; LangloisSète
1991 ; GermiChampsaur 1996 ; MazodierAlès 1996 pètes pl. ; FréchetDrôme 1997 ; FEW 8, 134a, peditum.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : (1) Bouches-du-Rhône, Hautes-Alpes, 100 % ; Hérault, 90 % ; Gard, Var, 80 % ; Alpes-de-Haute-Provence,
Vaucluse, 65 % ; Alpes-Maritimes, Lozère, 40 % ; Aude, 25 %.
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