taure n. f.
〈Orne, Sarthe, Indre-et-Loire, Eure-et-Loir, Loiret, Indre, Loire-Atlantique, Mayenne,
Maine-et-Loire, Centre-Ouest, Loir-et-Cher, Cher, Côte-d’Or, Loire (Roanne), Limousin,
Dordogne〉 rural "veau femelle ; jeune vache qui n’a pas encore vêlé (stand. génisse)". Synon. région. vêle*. – Une jeune « taure » (M. Richard, Une enfance heureuse. Une enfance vendéenne, [après 1960], 49).
1. Y a une taure : la Jolie, qui mange le linge. Attention à la lessive étendue sur la haie du jardin !
(Ph. Valette, Mon Village, 1947, 183.)
2. Et je ne dis rien du mélange d’odeurs où seul un bon flair du pays sait trier ce qui
appartient au marais, aux violettes du talus, à la taure qui secoue les crottillons de sa queue en tirant la touffe à pleine langue, au sapin
qui vous adoucit la gorge rien qu’en suintant du bourgeon. (H. Bazin, Qui j’ose aimer, 1956, 215-216.)
3. « Fait à quatre cochons quatre piqûres, visite veau battement de cœur, visite vache
langue de bois, un pot d’onguent pour les mamelles, visite taure fait dépommage [= action d’enlever une pomme obstruant le gosier de l’animal], fourni
pour digestion deux paquets. » Le vétérinaire revient toutes les semaines […]. (J.-L. Trassard, L’Ancolie, 1975, 192.)
4. […] ça se reconnaît de loin plus facilement qu’une taure d’un châtron. (H. Vincenot, La Billebaude, 1978, 107.)
5. […] se faire coincer le poignet gauche dans la mangeoire par la chaîne d’une petite
taure indocile […]. (J.-L. Boncœur, Le Village aux sortilèges, 1980, 336.)
6. […] ma tante possédait deux vaches et une taure [en note : génisse], trois ou quatre chèvres, puis la Ponette, une petite jument. (Cl . Couchay
et G. Arnoult, Une petite maison avec un grand jardin, 1980, 57.)
7. […] cette petite saloperie de taure jaune qui s’annonçait si belle, se laissait féconder et refusait de porter fruit.
(M. Gurgand, Les Demoiselles de Beaumoreau, 1981, 163.)
8. Il quitta le bourg*, arriva au champ de foire et s’arrêta devant des taureaux magnifiques, destinés à
renouveler la race Maine-Anjou dans tout le canton ; mais il passa son chemin. Il
demanda le prix des paires de bœufs, les Vendéens et les Poitevins, il les caressa ;
mais il passa son chemin. Il s’arrêta en connaisseur devant un joli lot de petites
taures. Il les tâta à l’échine, sur la croupe, aux côtes, aux pis. (L. de La Bouillerie,
Entre hommes et loups, 1983, 45.)
9. Mais ce n’était pas toujours aussi simple [le vêlage]. Quelquefois, surtout quand
il s’agissait de jeunes taures, nous avions beau conjuguer nos efforts, ça venait pas. (D. Bayon, Au flanc de ma colline, 1995, 154.)
10. Ils purent voir de l’autre côté du grand courant quatre jeunes taures, se serrant de peur, isolées sur un étroit îlot. Elles s’étaient laissées prendre
par la montée rapide des eaux. (R. Langlois, Les Raisins de la passion, 1996, 42.)
11. Pour éviter la contagion [de la fièvre aphteuse], les Jarraud avaient parqué les deux
taures dans le pré le plus éloigné du hameau. (S. Lavisse-Serre, Les Locatiers de Beauvoir, 1998, 105-106.)
12. Les veaux de Lyon pesaient plus de 300 livres, les « taures » de la race limousine, aux lignes parfaites, profitaient à merveille des bons soins
que Louis leur prodiguait. (P. Louty, Le Secret de Catherine, 1999, 511.)
— 〈Loire (Poncins), Limousin, Dordogne〉 "vache stérile".
◆◆ commentaire. Attesté en français dep. le 16e siècle (« thoreau, thore ou vache », Nevers, GdfC), taure est en usage principalement dans une vaste aire comprenant le Centre-Ouest, le Centre
et le Limousin, avec des aires sporadiques plus à l’est : Côte-d’Or et Loire. Il est
aussi passé dans le français du Québec (Dionne 1909 dans la métalangue s.v. tauraille ; GPFC 1930 ; ALEC ; Lavoie 1985, 1312), en Acadie (MassignonAcad 1962, § 837 ; CormierAcad
1999) et en Louisiane (DitchyLouisiane 1932 ; GrioletLouisiane 1986). Après être entré
dans le français de référence (Ac 1694), et encore non marqué dans Trév 1752, il est
aujourd’hui marqué dans la plupart des dictionnaires généraux (sauf dans GLLF) comme
« régional ou technique (élevage) » (Rob 1985 ; NPR 1993-2000), « région. (Ouest et Centre) et élev. » (TLF), « région. » (Lar 2000) ; cet archaïsme est également bien représenté dans les patois de nombreuses
régions de la France septentrionale (ALF 637 ; ALIFO 513, ALN 802 (Orne), ALO 482,
ALCe 637, ALB 1028, ALCB 927, ALLR 223, ALFC 613).
◇◇ bibliographie. PellasAix 1723 s.v. vaquo ; DuPineauR [1746-48] ; JBCPérigord 1818 ; LaRochelle 1861 tore ; 1868 « la Cévenole était jeune, alerte […] et solide des reins comme une jeune taure » A. Daudet, Le Petit Chose, dans MichelDaudet) ; Mâcon 1926 s.v. taurie, dans la définition ; MussetAunSaint 1948 ; SabourinAubusson 1983 et 1998 ; GononPoncins
1984 taure ou taurèle ; RézeauOuest 1984 et 1990 ; RobezVincenot 1988 ; ChaumardMontcaret 1992 ; BrasseurNantes
1993 ; Verreault/Lavoie Dialangue, avril 1996, 56 ; MichelRoanne 1998 « usuel au-dessus de 60 ans » ; FEW 13/1, 132b, taurus.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : ("génisse") Charente, Charente-Maritime, Deux-Sèvres, Vendée, 100 % ; Creuse, Vienne, 80 % ;
Haute-Vienne, 30 % ; Dordogne, 15 % ; Corrèze, 0 %. ("vache stérile") Haute-Vienne, 30 % ; Dordogne, 25 % ; Corrèze, 20 %.
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