trage, traige (et var.) n. m.
〈Bourgogne, Franche-Comté (notamment Besançon et Lons-le-Saunier)〉 fam. "couloir, passage piétonnier, qui permet de traverser un pâté de maisons d’une rue
à une autre (synon. région. traboule*) ; passage entre deux maisons villageoises contiguës". Stand. ruelle, venelle.
1. trage, traje. De la Grande Rue à la rue des Granges, ils ont supprimé un trage qui était bien pratique (R. Dromard, Comtoiseries, 1999, 14).
1. Un long mur hérissé de piques de fer nous séparait du « traje » des voisins. (A. Nicoulin, Le Dessus du Mont, 1979, 41.)
2. Traje [titre] / La fermeture d’un traje bien connu à Besançon provoque des remous. Les habitués contraints de faire un détour
se plaignent de cette fermeture (pour raisons de sécurité). (Le Pays de Franche-Comté, 30 avril-1er mai 1994, 36.)
3. En face du célébrissime « Soleil d’Or » [à Dampierre-sur-Salon, Haute-Saône] il y avait un trage où se trouvait le jeu de quilles. (P. Magnin, La Haute-Saône au temps du tramway, 1996, 43.)
4. Les deux hommes raflent la caisse et disparaissent en quelques secondes par les toits
du grand magasin [à Besançon]. Un scénario que n’aurait sans doute pas renié le commissaire
Pidoux, auteur des « Clochards d’Asmodée » où l’on voit des délinquants se fondre sur les toits de Besançon et dans les « trages » de la boucle du Doubs. (Le Pays, 20 mars 1999, 33.)
□ Avec ou dans un commentaire métalinguistique incident.
5. Au rez-de-chaussée [d’une maison de Besançon] s’ouvre un trage (passage) qui permet de gagner la place du Huit-Septembre. (L. Estavoyer et J.-P. Gavignet,
Besançon, ses rues, ses maisons, 1989, 118.)
6. Les passants s’esclaffent ou se résignent. Les plus chagrins en sont quitte [sic], pour éviter un cortège trop envahissant, à s’esbigner par les trajes qui sont à Besançon, ce que les traboules* sont à Lyon. (L’Est républicain, éd. Nancy, 11 septembre 1992, 411.)
7. Entrée dans l’histoire pour avoir vu naître Rouget de Lisle (au n° 24), la rue [du
Commerce, à Lons-le-Saunier] se visite dans tous les sens. En pénétrant dans les longs
couloirs (les trages) pour découvrir les arrière-cours […], en marchant sur le pavé pour regarder façades
et toitures. (Pays Comtois, n° 8, septembre-octobre 1996, 38.)
□ Dans un énoncé définitoire ordinaire.
8. À Besançon un trage (ou traje) est un passage piétonnier permettant la traversée des îlots à travers cours et jardins ;
ils sont aujourd’hui malheureusement de plus en plus fermés au public. On trouve le
même mot à Voray [Haute-Saône] (le cadastre écrit treige, conformément à la prononciation patoise) pour désigner l’accès depuis la rue à des
bâtiments situés en seconde ligne. (Barbizier. Bulletin de liaison de folklore comtois, n.s., n° 22, 1998-1999, 286, n. 9.)
2. traige, treige, trèje. Treige de la Cordière (Panneau de signalisation, centre-ville Dole, Jura).
9. Ville [Besançon] sillonnée de rues, de traiges, éclairée des verdures de Chamars, des collines et des forts […]. (J. Garneret, L’Amour des gens, 1972 [1950], 37.)
10. Plus il parcourait les ruelles et les trèjes [en note : passage entre deux maisons] de ses origines, plus il s’émerveillait tout à coup,
entre deux pignons croulants du xve siècle ou sur la placette, de découvrir les solitudes étagées des croupes sylvestres
à perte de vue ou de plonger le regard à ses pieds au plus profond de la vallée […].
(H. Vincenot, Le Maître des abeilles, 1992 [1987], 71.)
11. Au numéro 44 [de la rue du Commerce, à Lons-le-Saunier] existe un « traige », avec une large cour pour deux escaliers à magnifique rampe en fer forgé […]. (Le Guide du Jura, 1992, 113.)
12. Dans Lons-le-Saunier […] en pénétrant sous les porches, dans les « traiges », des passages qui débouchent sur des cours et de magnifiques escaliers. (Version Femme, Supplément dominical de L’Est républicain, 2 juillet 2000, 36.)
□ En emploi autonymique. V. ici ex. 8.
◆◆ commentaire. Ce type lexical est caractéristique de Bourgogne et surtout de Franche-Comté, où il
est attesté dep. 1534 (« Le traige du Point du Jour […] afin de povoir treger communement des rues Grande et
de Sainct Vincent », cité dans BeauquierDoubs 1881 ; Gdf). Enregistré dans la lexicographie régionale
dep. le 19e siècle, le mot est ignoré de la lexicographie générale. Au sens de "sentier ; raccourci", il est encore de quelque usage en milieu rural (Ø ALFC 158), et particulièrement
en référence à L. Pergaud, La Guerre des boutons.
◇◇ bibliographie. MonnierJura 1824 et MonnierDoubs 1859 traige ; BeauquierDoubs 1881 trage, traige ; CunissetDijon 1889 traige ; GarneretLantenne 1959 traije ; RLiR 42 (1978), 186 trège (Côte-d’Or) ; BichetRougemont 1979 ; DromardDoubs 1991 et 1997 trage ; TavBourg 1991 treige ; TrouttetHDoubs 1991 trage ; ColinParlComt 1992 traje, trage (avec ex. de Pergaud, traje) ; DuchetSFrComt 1993 trèche ; FEW 13/2, 233a-b, *trebare.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
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