trier v.
〈Surtout Isère, Provence, Gard, Hérault, Aude, Pyrénées-Orientales, Haute-Garonne, Lozère,
Ardèche, Limousin, Dordogne〉 usuel "écosser (des petits pois, des haricots) ; éplucher (des légumes, des fruits)". Trier des pois (SéguyToulouse 1950). Trier des pommes de terre (TuaillonRézRégion 1983).
1. J’en prépare [des cardes] une ou deux fois dans le peu de temps où les marchés offrent
ce délicieux légume méconnu. Et chaque hiver je me dis : « Si ce n’est pas aussi fameux que dans ton souvenir, tu arrêtes de trier ce sacré carde ! » (M. Rouanet, Petit Traité romanesque de cuisine, 1997 [1990], 260.)
2. Les enfants, vous voulez des caramels ?
– … – Vous voulez des pralines ? – … – Vous voulez de la nougatine ? – … – Alors, venez trier les amandes. / Et ils viennent. (M. Rouanet, Petit Traité romanesque de cuisine, 1997 [1990], 259.) V. encore s.v. caillette, ex. 4.
— [Par méton. de l’obj.] 〈Languedoc oriental〉 trier la soupe "préparer les légumes pour la soupe".
— En part.
● 〈Aussi Vendée, Rhône, Drôme, Hérault, Ardèche, Haute-Loire (Velay)〉a trier la salade "enlever d’une salade les parties non comestibles (feuilles fanées ou en mauvais état,
trognon, grosses nervures des feuilles)". Les femmes […] triaient la salade pour le repas du soir (P. Magnan, Le Mystère de Séraphin Monge, 1990, 316).
a Ces quatre dernières localisations sont dues à Cl. Fréchet.
3. Depuis qu’on n’avait plus de nouvelles du pépé, Marie Courate passait à pleurer le
temps qu’elle n’usait pas dans d’innombrables travaux ménagers […]. Il lui arrivait
même de verser des larmes dans la salade qu’elle triait. (Ch. Exbrayat, Pourquoi tuer le pépé ?, 1985 [1972], 30.)
4. Dès la veille de la noce, la maison grouillait d’un remue-ménage de fourmilière bousculée :
[…] les sauces* à cuisiner […], les salades à trier, des fournées entières de tartes aux fruits de la saison… (A. Paraillous, Le Chemin des cablacères, 1998, 63.)
● 〈Hérault (Sète)〉 trier du poisson "nettoyer et préparer (du poisson) pour le faire cuire". Moi, le poisson, c’est mon mari qui le trie. Sinon, je n’en mange pas ! (CovèsSète 1995).
5. – Alors on fait la journée de la morue […], on se fait la brandade…
[…] Nous trions la morue. Je mets les filets de côté […]. Nous déchiquetons bien tout le reste en enlevant les arêtes. (Ch. Blavette, Ma Provence en cuisine, 1984 [1961], 143.) ■ dérivés. triage n. m. "écossage, épluchage". « Le triage du carde est particulièrement fastidieux. Chaque côte doit être pelée, débarrassée
de toute feuille – même au cœur où elles paraissent innocentes » (M. Rouanet, Petit Traité romanesque de cuisine, 1997 [1990], 259).
◆◆ commentaire. Cet emploi par extension de fr. trier "éliminer d’un ensemble (lentilles, grains, etc.) les éléments non comestibles" est surtout en usage aujourd’hui dans le quart sud-est de la France, où il est attesté
dep. 1756 dans le français du Languedoc (« tria, trier, ou faire le triage. – Eplucher » Sauvages 1756) ; il est aussi en usage dans une petite aire de l’Ouest – que des enquêtes complémentaires permettraient de mieux cerner –, où il est attesté dep. 1780 à La Rochelle (« trier une salade, des fraises, éplucher »). Le français de référence ne connaît que des emplois limitatifs : trier des grains, des haricots (GLLF), trier des grains, des lentilles, du riz (Rob 1985), trier le raisin, le grain de la balle, les lentilles (TLF), trier le grain, des lentilles (NPR 1993-2000).
◇◇ bibliographie. LaRochelle 1780 ; VillaGasc 1802 ; RollandLyon 1813 « Choisir ou trier la salade, pour dire ôter ce qui est mauvais, dites éplucher » ; JBLGironde 1823, 153 « trier la salade, les herbes. Cette expression est bonne, si l’on a en vue de faire un choix ; mais si l’on veut
ôter ce qu’il y a de mauvais, on doit dire éplucher » ; SaugerPrLim 1825 ; ReynierMars 1878 ; SéguyToulouse 1950 ; TuaillonRézRégion 1983
(Drôme) ; CampsLanguedOr 1991 ; CampsRoussillon 1991 ; CovèsSète 1995 trier le poisson ; MazodierAlès 1996 ; RoubaudMars 1998, 48 trier les légumes ; MoreuxRToulouse 2000 trier les pois, les haricots, la salade, les châtaignes « connu surtout des plus de 60 ans » ; FEW 13/2, 304a-b, tritare.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Gard, Hérault, Aude, Pyrénées-Orientales, Lozère, 100 % ;
Dordogne, 75 % ; Haute-Vienne, 70 % ; Creuse, 65 ; Corrèze, 30 %.
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