aspect n. m.
〈Puy-de-Dôme〉 vieilli, littér. "côté de l’horizon ; exposition, orientation (d’un lieu, d’un bâtiment)".
1. Le plus souvent dans le syntagme prépositionnel à l’aspect (de).
1. Cependant, dans la paroisse de Brousse-Montboissier, les échines sont généralement
orientées du S.E. au N.W. selon la direction même des bandes plus siliceuses que nous
avons déjà signalées. Il en résulte alors que le flanc à l’aspect S.W. est nettement favorisé par rapport au flanc à l’aspect N.E. (L. Gachon, Une commune rurale d’Auvergne du xviiieau xxe siècle, 1981 [1939], 24 ; v. encore 101.)
2. De Montaigut-le-Blanc à Champeix, les coteaux à l’aspect du Midi ne sont que vignes en gradins. (H. Pourrat, En Auvergne, 1966 [1950], 69.)
3. La plaine sud est une large et longue terrasse qui s’étend contre l’arête centrale
du plateau et s’élargit depuis son milieu à l’aspect de Clermont jusqu’au col de Var. (L. Eychard, La Bataille de Gergovie, 1987, 62.)
— Par archaïsme stylistique (reprise d’une formule de la langue des notaires).
4. […] il [le Limagnais] a passé des siècles à lutter contre les accaparements fonciers
des Mousu (Messieurs) et finalement, il a réussi à cantonner leur avidité dans les marais ou
sur les versants « à l’aspect de bise* » des collines, où les manoirs et les prés s’enfouissent sous les arbres immenses (Les
Ratiers de Volvic). (P. Bonnaud, Bïzà Neirà 57, 1988, 13.)
— rare. Qualifié par un adjectif épithète.
5. Et parmi ces trois villages* privilégiés, deux : Montaigut et Fougères sont au bel aspect du Sud abrités de la bise* par la ligne de petits volcans qui va de la Garde au Courderchet ; le troisième,
Montmial, est à son aise sur une large échine pourvue de bonnes terres. (L. Gachon,
Une commune rurale d’Auvergne du xviiie au xxe siècle, 1981 [1939], 125 ; v. encore 59.)
2. En emploi autonome.
6. En outre, le pommier, arbre que ses fruits alourdissent beaucoup en automne aux bonnes
années, a dans les combes ses expositions préférées : le Nord, le Nord-Est, le Nord-Ouest.
Et cela pour deux raisons : là, il est le mieux protégé des vents du Sud, du Sud-Ouest,
les plus violents ; là, le sol garde plus de fraîcheur en été qu’aux aspects ensoleillés. (L. Gachon, dans MélArbos, 1953, t. 1, 119.)
7. Parcourons les secteurs bien différenciés de ce vaste territoire où la composition
des « aspects » (exposition) et des terroirs a été si justement mise à profit par les vignerons auvergnats
qu’il en est résulté non seulement des bouquets vinaires bien distincts mais plus
encore, par une cascade de causes et d’effets, des profils particuliers de l’histoire
viticole, des décalages chronologiques dans l’évolution, des originalités d’outillage
ou de coutumes. (P. Bonnaud, Bïzà Neirà 68, 1990, 17.)
◆◆ commentaire. Découlant du sens ancien de mfr. et frm. aspect "action de regarder, regard, vue" (JLemaire-1659, FEW), frm. aspect "orientation, exposition (d’une maison)" n’a été relevé dans la langue commune que de Félib 1676 à Trév 1771 et il est marqué
comme « vieilli » dep. Lar 1866 (FEW) ; les locutions avoir son aspect sur/vers "être tourné vers, avoir vue sur" et sus l’aspect de "du côté de (l’est)" sont attestées toutefois plus anciennement, en français préclassique (respectivement
1546-1605 et 1534, FEW). Le régionalisme constructionnel à l’aspect de (1) est donc à caractériser essentiellement comme un archaïsme sémantique. La construction
prépositionnelle est documenté d’abord dans les provinces voisines de l’Auvergne :
en 1552 en Rouergue (aspect d’Occident/d’Orient "du côté de l’occident/de l’orient", EnqCommRouergue 230), chez Olivier de Serres (à l’aspect du Septentrion, Vivarais 1600, Le Theatre d’Agriculture 154), et au 17e s. en Velay ou Vivarais (à l’aspect de dans Cartulaire de la chartreuse de Bonnefoy, éd. par J.-L. Lemaître, 1990, xi) ; puis en occitan auvergnat ca 1690 (ClermF., FEW), où il s’agit, à l’évidence, d’un emprunt au français ; enfin
continûment dans le français de Basse Auvergne, en particulier dans des documents
de la pratique, 1739 (à Brioude, AlmBrioude 60, 169 ; 1748, Bompart de Saint-Victor,
FournierNouvRech 561 [pour la date, v. C. Couderc, Catalogue des manuscrits de la bibliothèque de la ville de Clermont-Ferrand, 1890, 266] ; FEW ; ChambonMatAuv 1994 ; Brivadois 1775, AlmBrioude 53, 61 ; St-Jean-en-Val
1784, À Moi Auvergne 70, 225 ; Chamalières 1794, ManryChChamalières 194 ; Ambert 1800, BullGRAHLF 7, 55
et 56 ; 1853, P.-P. Mathieu, Ann. scient., litt. et ind. de l’Auvergne 26, 359 ; DéribierCantal 1852-1857, t. 5, 86 ; ClermF. après 1861, Provost/Menessier-Jouannet,
Carte archéol. de la Gaule, 63/1, 1994, 113 ; 1922, H. Pourrat, Gaspard des montagnes, impr. 1966, 50). L’emploi autonome (2), plus rare et beaucoup plus tardivement attesté (dep. 1922, H. Pourrat, Gaspard des montagnes, impr. 1966, 84), constitue probablement un développement secondaire. Les deux emplois
n’apparaissent plus aujourd’hui que dans le registre très soutenu de l’écrit.
◇◇ bibliographie. FEW 25, 467b, 468a, aspectus ; TLF (sans marque régionale, mais avec un exemple de Pourrat) ; BonnaudAuv 1976 ;
ChambonMatAuv 1994, 14 ; ChambonÉtudes 1999, 141 (Pourrat, Gaspard des montagnes).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
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