berte (aussi berthe) n. f.
〈Puy-de-Dôme〉 agriculture traditionnelle "hotte de vigneron servant à la vendange et au transport du fumier et de la terre". À la berte loc. adv. "à l’aide d’une berte" (PotteAuvThiers 1993).
1. Le vigneron ne partait jamais au travail sans s’être muni de sa hotte, qu’il appelait
sa « berte ». (J. Pothier, « Un siècle de vie laborieuse à Blesle, 1620-1720 : les vignerons », Almanach de Brioude 50, 1970, 181.)
2. Le travail de la vigne / […] Le panier une fois plein est vidé dans la « berte » – la hotte – d’un « bertaire », qui va lui-même la vider dans les bacholles*. […] / […] A l’entrée de l’hiver, il [le vigneron] vérifie les murettes des terrasses,
remonte dans sa berte la terre entraînée par le ruissellement des eaux. (A. Pourrat, Traditions d’Auvergne, 1976, 23).
3. Quoi qu’il en soit, la berte était bel et bien l’instrument indispensable au Brayaud [habitant de la région de
Châtelguyon]. Elle servait bien sûr à la vendange mais aussi à porter n’importe quoi
et n’importe où. On raconte qu’un paysan de Châtel, à qui on avait demandé de poster
une lettre à Riom, n’eut rien de plus pressé que de prendre sa berte. Les bertes d’osier ont disparu. Elles ont été remplacées par des instruments métalliques, mais
en 1974 j’ai encore rencontré dans le vignoble de Saint-Hippolyte un homme radieux
qui, sa hotte au dos, partait aux vignes. (L. Levadoux, « Un tour aux vignes : la vigne, le vigneron, les vignobles du Puy-de-Dôme » [1979], Bïzà Neirà 62, 1989, 11.)
4. La foire de Veyre, le 29 août, avant les vendanges, était surtout fréquentée pour
la fourniture de matériel de vendanges, bacholles*, berthes (hottes), paniers, échelles, etc. (L. Malleret, « Plauzat (Puy-de-Dôme) », Bïzà Neirà 33, 1982, 35.)
5. Portant la « berte » [en note : hotte] sur le dos, il poussait une remorque où se trouvaient de la paille de seigle
et de l’osier. Il allait à sa vigne attacher les ceps. (Cl. Fourneyron, Quel temps faisait-il en Auvergne ?, 1991, 56.)
□ En emploi métalinguistique ou autonymique.
6. La berte, c’est la hotte, en patois là bartà. La petite berte, c’est le bartou […]. Quant à l’orthographe, il était tentant d’écrire berthe, ça pose un dialecte ! (L. Levadoux, « Un tour aux vignes : la vigne, le vigneron, les vignobles du Puy-de-Dôme » [1979], Bïzà Neirà 62, 1989, 11.)
■ graphie. La graphie berthe (BigayThiers 1943 ; ci-dessus ex. 4 et 6) est plus rare.
■ dérivés. 〈Puy-de-Dôme〉 peu usuel bertaire n. m. "celui qui transporte la vendange dans la hotte" (v. ci-dessus ex. 2).
◆◆ commentaire. Sub-régionalisme spécifique du Puy-de-Dôme (attesté ClermF., Veyre-Monton, Vic-le-Comte,
Issoire, Cunlhat, Thiers ; inconnu des témoins Brivadois, mais v. toutefois ex. 1 ;
quasiment inemployé dans le Cantal), attesté dep. 1861 (MègeClermF ; ClermF. 1892,
berthe, Vieux Clermont 24, 13 ; 1915, DauzatVinz, § 259 ; BigayThiers 1943 ; 1956, ManryClermF 402 ; BonnaudAuv
1976 [sans localisation] ; PotteAuvThiers 1993 [sans localisation, base thiernoise],
cf. RLiR 42, 192), lié à la civilisation viticole traditionnelle et aujourd’hui en
perte de vitesse (inconnu des informateurs de moins de 25 ans). Emprunté à occ. (PuyD.)
['bɛrt]/['bart] "id." (ALAL 1383 pt 11, 12 ; Limagne, Vinz. Arconsat), attesté dep. av. 1689 (ClermF. bearta < *bèrta, Laborieux l’aîné, Las Vendegnas, éd. J. Berriat-Saint-Prix 13, 24 ; 1843, berto, L’Auvergne littéraire, scientifique et industrielle 2/4, 1), indirectement dès 1414 à travers lat. médiév. région. berta (JournGuillMurol 477), et lui-même d’aire réduite (Ø ALMC 972, ALLy 184, ALCeIndex).
Le mot français ne connaît pas de variation de timbre à la prétonique ; à Vinzelles,
il avait au début du siècle la forme du français (et du parler) du centre directeur
(Clermont), et non celle du parler local (['bartå]), cf. aussi ex. 6. Selon DauzatVinz
1915, du NP Berta ; à rapprocher probablement de la famille francoprovençale de Lyon barta "grand pot de terre", qui a fait l’objet d’un double classement dans le FEW (1, 264a, *barrum, et 15/1, 98a, Bertha, articles où ne se trouve aucun mot signifiant "hotte" ; cf. déjà « Oules, bartes, terrines, tirouers, et toutes sortes de vaisseaux propres à la bergerie,
vacherie et labourage » Belleau dans Huguet, sans définition). Le dérivé bertaire (dep. MègeClermF 1861 ; 1892, berthaire, Vieux Clermont 24, 13 ; 1930, Ph. Arbos, Étude de géographie urbaine. Clermont-Ferrand 35) est transféré de l’occitan (ClermF. bortéris pl., 1843, L’Auvergne littéraire, scientifique et industrielle 1/50, 1), avec conservation du suffixe autochtone ; la forme francisée berteur (I. Tournadre, « Vendanges, récits ethnographiques » [Mirefleurs, Puy-de-Dôme], Bïzà Neirà 59, 1988, 16) semble très rare.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Puy-de-Dôme, 55 % ; Cantal, 10 % ; Haute-Loire (nord-ouest),
0 %.
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