buronnier n. m.
〈Surtout Auvergne, Aveyron, Lozère〉 "travailleur (exploitant agricole ou, généralement, salarié) appartenant à l’équipe
préposée à un buron* qui, pendant la belle saison, s’occupe de la conduite du troupeau de bovins, de la
traite et de la fabrication de la fourme*". Le « dortoir » des buronniers (ALMC, 1957, 503*). Les buronniers mangent peu, mais souvent (Cl. Royer, dans L’Aubrac 4, 1973, 81). Le métier de buronnier (P. Berte-Langereau, Lou Païs 209, avril 1975, 56). La mort des buronniers de l’Aubrac (J.-C. Crespin, Lou Païs 239, juillet-août-septembre 1979, 77). Le langage simple d’un ancien buronnier (R. Capelle, L’Aubrac et ses buronniers, 1995, 2).
1. Je suis né à Recoules d’Aubrac d’un ouvrier buronnier, il est resté d’ailleurs 27 ans dans la même maison, chez le même patron qui faisait
le buronnier l’été […]. (« Histoire de vie d’un Lozérien », dans L’Aubrac 4, 1973, 269.)
2. Dans le buron*, vie et travail se confondent : le buronnier vit sur son lieu de travail […]. (Cl. Royer, dans L’Aubrac 4, 1973, 75.)
3. Les occupations des buronniers, conduite du troupeau, déplacement du parc, traite, fabrication du fromage, forment
une somme d’activités indissociables, un tout, au travers duquel le buronnier apparaît à la fois comme un vacher et comme un fromager. (Cl. Royer, dans L’Aubrac 4, 1973, 81.)
4. Quant aux buronniers, ils deviennent de plus en plus rares. Les bons fromagers sont l’exception, quand
ils n’ont pas été embauchés dans les laiteries industrielles. (A. Fel, L’Auvergne, le Bourbonnais, 1973, 32.)
5. Les buronniers, qui étaient encore onze cents [dans l’Aubrac] en 1900, n’étaient plus que cent trente
en 1965 ; depuis leur nombre s’est encore réduit. / Les buronniers autrefois ne descendaient au village qu’à certains jours peu nombreux, entre mai
et octobre […]. (M.-L. Tenèze, Récits et contes populaires d’Auvergne, 1978, t. 1, 20 [introduction].)
6. Sur le terrain, Claude Royer a fait de longs séjours, observant notamment le fonctionnement
des montagnes* et le comportement des buronniers. (A. Desvallées, dans L’Aubrac 6/1, 1979, 27.)
7. Les buronniers me parlent aussi des folkloristes à leurs trousses, joyeux de prendre des photos
qui « font paysan ». (J.-C. Crespin, « La fin d’un rituel paysan ? La mort des buronniers de l’Aubrac », Lou Païs 239, juillet-août-septembre 1979, 77.)
8. Après avoir attendu que la présure fige le bon lait, onctueux et crémeux, qui vient
d’être trait, le « buronnier » émiette la « caillée »* dont il laisse égoutter le petit lait. (Pays et gens de France, n° 20, le Puy-de-Dôme, 4 février 1982, 14.)
9. La Bastide d’Aubrac est aux portes de ce grandiose « far-west » rouergat où séjournaient de mai à octobre, dans le plus grand isolement[,] quelque
onze cents buronniers condamnés à une vie pastorale rudimentaire de forme antique. (E. Quintard, « Connaissez-vous La Bastide ? », Revue du Rouergue 37, 1983, 143.)
10. La transhumance a encore de beaux jours devant elle, mais n’en a pas moins perdu et
sa forme traditionnelle et sa vocation première : la fabrication sur place, dans les
burons*, du fromage de Laguiole*. Une activité qui, il est vrai, imposait aux buronniers une solitude de quatre mois. (Le Monde sans visa, 19 mai 1990, 17.)
11. Le métier s’est perdu depuis la grande guerre. Il n’y avait pas d’école pour être
« buronnier » si ce n’est l’apprentissage en milieu naturel. (J.-Cl. Roc, Burons de Haute-Auvergne, 1992, 48.)
12. Pendant ce temps, Mélanie avait entrepris de réduire en tranchettes – pas en tranchounettes !
– un bloc de tomme. De véritable tomme cantalienne, obtenue, toujours par échange,
des buronniers du Lioran. (J. Anglade, La Soupe à la fourchette, 1996 [1994], 65.)
13. Le début de la saison était assez difficile et pénible pour les buronniers, car il fallait prendre le rythme des journées. (R. Capelle, L’Aubrac et ses buronniers, 1995, 47.)
14. Le soir, la traite accomplie, les vaches parquées, les buronniers entrèrent en conversation devant une poêlée de pommes de terre mélangée à un quartier
de tomme fraîche. (J.-P. Leclerc, D’un hiver à l’autre, 1997, 114.)
■ remarques. Les composés buronnier-exploitant, buronnier-fromager, buronnier-vacher (Cl. Royer, dans L’Aubrac 4, 1973, respectivement 90, 84, 83, 83 et 97) semblent n’appartenir qu’au vocabulaire
technique de l’ethnologie.
■ encyclopédie. V. Cl. Royer, « L’homme des burons », dans L’Aubrac 4, 1973, 63-122.
◆◆ commentaire. Dérivé français de buron*, formé dans la variété régionale et attesté dep. 1787/1788 pour l’Auvergne (G. et
P.-F. Fournier, BullAuv 91 (1983), 337, 338, 339 ; dep. 1813 pour le Gévaudan, Les Tournées du Préfet Gamot. La Lozère à la fin du premier Empire, Mende, 1985, Centre d’études et de recherches de Mende, Mémoire n° 2, 21, 22, 23
[cf. Saint-Germain-du-Teil 1845, texte cité dans Lou Païs 208, 1974, 188] ; dep. 1879 pour le Rouergue, VayssierAveyr s.v. burounièa). Sans tradition lexicographique comparable à celle de buron* (dep. Boiste 1826, FEW ; aujourd’hui seulement Rob 1985b) et moins dérégionalisé que celui-ci (malgré sa migration dans le discours ethnologique
et géographique, v. ci-dessus ex. 2-6), le mot paraît aujourd’hui beaucoup plus usuel
en référence à l’Aubrac et au Cantal que dans le Puy-de-Dôme (où il ne s’emploie naturellement
pas en parlant des monts du Forez) ; il a été emprunté par aveyr. burouniè (VayssierAveyr, op. cit.)c.
a Sans doute dès 1829, et dans le sens de "cantalès (responsable du buron, qui s’occupe de la fabrication du fromage)", v. L’Aubrac 6/1, 1979, 86 n. 6 (sans citation textuelle).
b Qui donne la prononciation standardisée [byʀɔnje] ; la prononciation régionale est [byʀonje].
c Les parlers occitans sont généralement restés fidèles à leurs types traditionnels
(cf. L’Aubrac 6/1, 84), en particulier pour les désignations spécifiques de chaque membre de l’équipe
de buronniers (v. ALMC 1718*).
◇◇ bibliographie. FEW 15/2, 14b, *buìr- (considéré à tort comme un emprunt à l’occitan) ; GebhardtOkzLehngut 1974, 320 (à
tort « < Aveyr. ») ; A. Desvallées et al., L’Aubrac 6/1, 1979, 84, 86 ; BoisgontierMidiPyr 1992 ; Chambon Lalies 17 (1997), 33-53, notamment
38-39.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Aveyron, 100 % ; Haute-Garonne, Tarn, 25 % ; Ariège, Lot,
Tarn-et-Garonne, 0 %.
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