chef-lieu n. m.
〈Surtout Centre-Est et Centre-Sud〉 dans les syntagmes chef-lieu de commune, chef-lieu de la commune usuel "centre administratif et commercial constituant généralement l’agglomération la plus
importante d’une commune, dans les régions d’habitat dispersé (par opp. à village*, hameau, écart, quartier*, campagne)". Synon. région. bourg*. – Les trois kilomètres séparant le hameau des Combes du chef-lieu de la commune (J. Mallouet, De mes montagnes, 1997, 197).
1. […] un certain nombre de règles tendent à donner aux électeurs le maximum de commodités
matérielles pour participer au scrutin. […] le lieu de vote est au chef-lieu de la commune, ce qui rapproche l’urne de l’électeur […]. (G. Vedel, Manuel élémentaire de droit constitutionnel, 1949, 365.)
2. La principale de ces enquêtes porte sur le village de Pérols, chef-lieu de commune situé à la cote 800 sur le versant sud-ouest du Plateau, et sur les hameaux de la
commune qui compte au total 512 habitants. (J. Mazaleyrat, La Vie rurale sur le Plateau de Millevaches, 1959, 70.)
3. Le terme village* s’applique, le plus souvent, aux hameaux et non au chef-lieu de la commune. (ALMC, 1959, t. 2, carte 621.)
4. Saint-Mary-le-Plain, ch. l. com., cant. Massiac. (G. Fournier, Le Peuplement rural en Basse Auvergne durant le haut moyen âge, 1962, 435.)
5. Entre Bourg-Saint-Maurice et Moûtiers chaque commune comprend de un à six hameaux
en plus du chef-lieu. (H. Raulin, dans Chr. Abry, Les Sources régionales de la Savoie, 1979, 72.)
6. Il n’y a pas à proprement parler, de village de Cordon. […] il n’y a pas d’agglomération,
pas de rues. L’agrégation n’existe pas. Chaque maison est unique et ne se soude pas
à une autre, ni au chef-lieu, ni dans les hameaux. (BrussonCordon 1982, 23.)
7. En Anjou, et à Mozé en particulier, on appelle bourg* : le chef-lieu de la commune comprenant la mairie, l’église, l’école, etc. ; villages* : des groupes de maison[s] comprenant cinq ou six feux ; hameaux : des groupes plus petits de deux maisons par exemple et de leurs dépendances. (Cl. Rivals,
Pierre Roullet, La vie d’un meunier, 1983, 13.)
8. ROCOULES, ch.-l. cne au flanc d’une petite butte (891 m). (J. Arsac, Toponymie du Velay, 1991, 178.)
9. Il s’agit, sans préjuger de son importance, du chef-lieu de la commune, siège de la mairie, de l’église, de l’école, des commerces éventuels. (ALAL, 1992,
t. 3, carte 1164.)
10. La montagne est occupée jusqu’à des niveaux élevés, la moyenne des chefs-lieux de commune s’établit à 1100 mètres. Les habitations sont groupées en petits hameaux ou en gros
bourgs*. (GermiChampsaur 1996, 13.)
— Par ellipse. 〈Haute-Savoie, Savoie, Ain, Drôme〉 chef-lieu n. m. "id.".
11. Dans l’arrondissement de Bourg-en-Bresse, l’étendue moyenne de la propriété rurale
est légèrement inférieure à dix hectares ; c’est donc, pour la France même, une région
de très petite propriété. L’esprit communal est peu développé ; la commune, le « chef-lieu », ne groupe autour de l’église et de la mairie qu’un petit nombre d’habitations :
l’auberge, l’épicerie, les demeures des artisans : menuisier, forgeron, maréchal-ferrant,
réparateur de cycles, garagiste, entrepreneur de battage. La plupart des cultivateurs,
propriétaires ou fermiers, vivent dans des bâtiments construits au centre du petit
domaine qu’ils exploitent ; il en résulte une dispersion extrême des habitations […].
(R. Vailland, Drôle de jeu, 1945, 138.)
12. Comme la plupart des villages de montagne, Lus est en fait un ensemble de hameaux
qui sont dispersés sur tout son territoire et peuvent ou ont pu avoir une réelle importance
et une vie spécifique […], le « chef-lieu », comme on nous a souvent dit, c’est-à-dire le hameau principal[,] siège de l’église
[…], de la mairie, des commerces… où vit près du tiers de la population […]. (J.-Cl. Bouvier,
La Mémoire partagée, Lus-la-Croix-Haute (Drôme), 1980, 12-13.)
13. L’habitat est très dispersé dans une vingtaine de hameaux ; le chef-lieu n’est que l’un des plus gros de ces villages*, c’est surtout le village de l’église et de la mairie. La plus grande partie de la
population vit dans les autres villages s’échelonnant le long du versant de la montagne.
La Commune forme pourtant une unité solide […]. (G. Tuaillon, Préface de GaideMontvalezan
1994, 4.)
◆◆ commentaire. Extension d’emploi de chef-lieu "centre administratif d’une circonscription territoriale", à partir de la nomenclature administrative : chef-lieu de région/de département/d’arrondissement/de canton, qui est enregistrée par Rob 1951-1985 et TLF, mais non par GLLF 1971, Lar 1982, NPR 1993-2000,
Lar 2000. Elle n’est cependant pas d’usage général, car elle paraît inusitée dans
les régions d’habitat dispersé de l’Ouest, où l’on emploie exclusivement bourg* en ce sens, et elle a, au moins, un concurrent dans des contextes didactiques : centre communal (E. Nègre, Toponymie du canton de Rabastens, Paris, 1959, 31 ; bourg* ex. 10).
Elle est d’abord attestée, de façon transitoire, dans les projets de la Révolution
visant à regrouper les unités administratives de base de l’Ancien Régime à l’intérieur
de vastes circonscriptions communales (« Alors j’ai à colorier distinctement dans les 720, ou 729 communes, toutes les villes
qui peuvent s’y trouver, avec la prétention de devenir chef-lieu de Département ou
de Commune » 1791, Sieyès, Frantext). Elle a été reprise postérieurement, pour éviter l’ambiguïté du régionalisme bourg*, notamment par des toponymistes et géographes traitant des régions d’habitat dispersé
surtout du centre-sud de la France (« […] dans les recensements, pour ne pas multiplier les articles, on joint souvent au
chiffre du chef-lieu de la commune, d’un village ou d’un hameau, le nombre des habitants
d’un domaine, d’un moulin ou d’une maison isolée, dépendant de la commune » J.-B. Bouillet, Dictionnaire des lieux habités du département du Puy-de-Dôme, Clermont-Ferrand, 1854, p. 2-3 de l’« Introduction » qui n’est pas paginée ; « chalus, chef-lieu de commune, (373 habitants) » A. Tardieu, Grand Dictionnaire historique du département du Puy-de-Dôme, Moulins, 1877, 110 et passim ; « Dorat/Chef-lieu de commune, canton et arrondissement de Thiers, bureau de poste et
perception de Thiers […] » C. Faugère, Dictionnaire historique et géographique des lieux habités du département du Puy-de-Dôme, Clermont-Ferrand, 1892, 84 et passim ; « En 1789, Auvers faisait partie, au temporel et au spirituel, de Nozeyrolles, qu’il
a remplacé comme chef-lieu de commune, en vertu d’un décret du 1er novembre 1900 » A. Jacotin, Dictionnaire topographique du département de la Haute-Loire, Paris, 1907, 13 ; « Les fermes n’ont jamais été en France l’objet d’un recensement ; mais du moins le
dénombrement de 1891 nous a-t-il fait connaître le nombre des hameaux et principaux
groupes distincts du chef-lieu de la commune » P. Vidal de La Blache, Tableau de la géographie de la France, t. 2, 1908, 313, Frantext ; v. encore s.v. village, ex. 27). On rencontre également la locution dès la fin du 19e s. sous la plume d’un homme politique originaire de la Creuse (« Quelques semaines après, étant à Soubretost, chef-lieu de ma commune, un nommé Bouillot
me dit […] » 1895, M. Nadaud, Léonard maçon de la Creuse, Paris, 1976, 136).
Ces différentes attestations témoignent de la présence continue depuis plus d’un siècle
de la locution dans l’usage soigné d’auteurs originaires du centre-sud de la France,
face à la dénomination traditionnelle courante : bourg. Mais la locution s’est aussi implantée dans l’usage courant du centre-est, notamment
en Savoie (GagnySavoie 1993), dans l’Ain (v. ici ex. 11) et la Drôme (v. ici ex. 12
et FréchetDrôme 1997), c’est-à-dire dans une région où bourg* n’est pas signalé en ce sens. Il faut noter que l’usage savoyard (chef-lieu vs village vs hameau) s’accorde avec celui qui est attesté en français de Suisse : « […] la route qui conduit dans la vallée de Rhêmes […] conduit en lacets au village
d’Introd […] pour arriver ensuite à Rhêmes-Saint-Georges, chef-lieu de la commune
du Val de Rhêmes, divisé en plusieurs hameaux dans un vaste bassin bien cultivé » (H.-E. Keller, Etudes linguistiques sur les parlers valdôtains, Berne, 1958, 13) ; « St-Nic. = Saint-Nicolas […] questionnaire posé dans le chef-lieu, Fossaz […] » (ibid. 32) ; « Savièse n’est pas le nom d’un village, mais celui d’une grande commune agricole qui
en compte plusieurs, aux noms sonores, auxquels s’ajoutent des hameaux qui n’ont pas
de bannière. Saint-Germain est le chef-lieu de cette commune de près de quatre mille
habitants » (N. Roten, préface de Favre-Ballet, Lexique du parler de Savièse, Berne, 1960, V).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
|