chèvreton (aussi chevreton) n. m.
I. 〈Saône-et-Loire, Drôme, Ardèche, Haute-Loire, Puy-de-Dôme〉 usuel "petit fromage au lait de chèvre (parfois mêlé de lait de vache)".
— Emploi comptable. Mets-moi un chèvreton pour mon casse-croûte (FréchetDrôme 1997).
1. Le dimanche, les jours de marché, les jardiniers vendaient leurs salades […], les
paysannes leurs chèvretons et leurs poules. (J. Anglade, Les Ventres jaunes, 1991 [1979], 36.)
2. Le lard de midi, je le mangerai froid, avec une grosse tranche de pain et des cornichons
[…]. Pour finir, un de mes chevretons, fait du lait de mes chèvres… (Cl. Bourgendre, Le Tablier de sapeur, 1979, 54.)
3. Il emportait [à la vigne] du saucisson, une omelette froide et un chevreton […]. (M. Fouriscot, Marie la dentellière, 1987, 121.)
4. Il tira de sa musette du pain, un pot de beurre, un morceau de lard maigre, un chèvreton. (J. Anglade, Un lit d’aubépine, 1997 [1995], 277.)
V. encore s.v. fourme, ex. 19.
— Emploi non-comptable.
5. Mathilde fit manger à ses invités du chèvreton et de la confiture de pommes qu’elle avait faite elle-même. (J. Anglade, Une pomme oubliée, 1969, 222.)
— Au sing. à valeur générique.
6. Quand vous voyez un livre d’eux [Georges Conchon, Jean Anglade], il faut le lire.
Ils sont nés dans le Puy-de-Dôme, comme Pascal et le chèvreton. (A. Vialatte, Pas de H pour Natalie, 1995 [1955], 14.)
7. Le chevreton d’Ambert est encore fabriqué et affiné artisanalement. (Pays et gens de France, n° 20, le Puy-de-Dôme, 4 février 1982, 4e de couverture.)
8. Les chèvres sont aussi des familières du Livradois-Forez, même si leur nombre a considérablement
diminué. Le « chèvreton », ou fromage de chèvre, a toujours été une production typique. (Le Livradois-Forez, 1998, 124.)
V. encore s.v. fourme, ex. 15 ; soupe dorée, ex. 4.
□ En emploi autonymique. Voir s.v. artison, ex. 9.
II. 〈Bourgogne〉 commerce. Dans le syntagme chevreton de Mâcon.
9. « Mâconnais / Également connu sous le nom de chevreton de Mâcon, ce fromage fermier ou artisanal est fait soit au lait de chèvre, soit au lait de
vache, soit au lait de mélange. Cela dépend de la saison et du producteur » (L’Encyclopédie des fromages, 1997, 101.)
■ graphie et prononciation. La forme chèvreton semble aujourd’hui dominante ; les graphies chevreton (ici ex. 2-3, 7, 9) et aussi chévreton (FréchetMartVelay 1993) indiquent des prononciations moins répandues.
■ encyclopédie. V. L’Encyclopédie des fromages, 1997, 101.
◆◆ commentaire.
I. Attesté dep. 1879 (« Moi [à Saint-Étienne] j’avale des soupes énormes, dans des écuelles ébréchées, et
j’ai ma goutte de vin dans un gros verre, quand on mange le chevreton » J. Vallès, qui donne chevreton comme stéphanois), 1904 (chèvreton, MichaliasÈrsSuts, 119 et 121, en italique pour traduire Ambert chabrilhou), 1908 dans l’Allier (« petits fromages (chevretons) » Notice sur le commerce des produits agricoles, Paris, 1906, t. 2, 14). Ce type est également attesté dans les parlers foréziens
sous diverses variantes. Dér. sur chèvre, avec le double suffixe ‑eton (la variante chevrotona, considérée comme disparue par BonnaudAuv 1977, est due à l’influence de chevroter, dér. sur chevreau), le mot est pris en compte, sous la forme chevreton, par GLLF (« fromage préparé […] dans les monts du Forez », avec ex. de J. Vallès) et par TLF s.v. chèvre (même exemple de J. Vallès) ; il est absent de Rob 1985, de NPR 1993-2000 et de Lar 2000.
II. Attesté dep. 1926 à Mâcon pour y désigner un fromage du lieu, chevreton est peut-être une création indépendante du précédent, dér. sur fr. chevret "fromage de chèvre, particulièrement le fromage sec" (dep. ca 1800 « fromages appelés chez nous peraoudous et en français des chevrets » AnonymeHippolyteF ; Mâcon 1926), avec le suffixe ‑on.
a Attesté en 1861 dans le français de Clermont : « On fabrique beaucoup de chevrotons dans la vallée des bains du Mont-Dore » (MègeClermF 1861). Encore récemment : « Un troupeau de chevrotons bien secs occupe le milieu de la table » (F. Deschamps, Croque en bouche, 1980 [1976], 44).
◇◇ bibliographie. (I) ChataingEglis 1934 chèvreton ; BigayThiers 1943 chèvreton ; FaureYssingelais 1973 chèvreton ; BonnaudAuv 1976 chevroton « tombé en désuétude » ; BretogneLivradois 1980 chevreton ; BecquevortArconsat 1981 chèvreton s.v. chioretou ; QuestThiers 1987 ; FréchetMartVelay 1993 chévreton ; PotteAuvThiers 1993 chèvreton ; FréchetAnnonay 1995 chèvreton ; FréchetDrôme 1997 chèvreton « globalement attesté » ; ChambonÉtudes 1999, 144 (Pourrat, Gaspard des montagnes) ; FEW 2, 297a, capra. – (II) Mâcon 1926 chevreton ; FEW, loc. cit.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Haute-Loire (nord-ouest), Puy-de-Dôme, 100 % ; Cantal, 20 %.
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