chon n. m.
〈Meuse, Meurthe-et-Moselle, Vosges〉 vieillissant Le plus souvent au pl.
1. "résidus de la fonte de la panne du porc". Synon. région. chichons*, friton*, graton*, grillon*, rillon*.
1. Le gâteau de chons / Ce gâteau de chons fait toujours nos délices en hiver et au printemps […]. Sur le feu, faites fondre
doucement dans une cocotte en fonte, 2 ou 3 kilos de panne de porc découpée en petits
dés jusqu’à ce qu’il n’en reste que des petits chons dorés que vous retirez de la graisse fondue avec une écumoire. (J.-M. Cuny, La Cuisine lorraine, 1975, 48.)
2. […] Mélanie avait les yeux partout. Sur le travail de chacun pour le faciliter, la
propreté des boyaux qui rentraient de la fontaine, la panne coupée en morceaux menus
qui fondait pour le saindoux, la couleur des chons qu’elle récupérait prestement pour les mettre dans le boudin qui mijoterait doucement
[…]. (A.-M. Blanc, Pays haut, 1988, 36.)
3. […] ce sont des oignons revenus dans du saindoux, du sang très frais, des « chons » de saindoux récupérés pour le moelleux et des épices fraîchement hachées […] qui
ont valu à son boudin noir [à un charcutier lorrain] une médaille de bronze, au concours
de Mortagne-au-Perche dans l’Orne. (L’Est républicain, 20 mars 1999, éd. Nancy, 616.)
4. Bientôt les tripes s’empliraient de sang et de « chons » [en note : graisse de porc] assaisonnés d’épices et d’aromates […]. (G. Garillon, Vosges de mon enfance, 2000, 104.)
□ Avec ou dans un commentaire métalinguistique incident.
5. […] Mathis fait fondre la graisse dans un grand chaudron […], la passe dans un tamis,
et récupère soigneusement les déchets non fondus, les « chons » qu’elle mélange au sang qui est cuit, un peu de lait, de mie de pain, de plantes
odorantes : thym et sariette […], et elle fait cuire tout ce mélange ensemble, le
remuant de temps à autre avec sa cuiller de bois, pour faire le boudin. (André Noël,
dans Revue lorraine populaire, n° 49, décembre 1982, 16.)
6. Pour faire un bon boudin, il faut un tiers oignons, un tiers sang, un tiers chons (gras de porc fondu), sel, poivre, sariette et autre chose encore […]. Pas la peine
de crier sur les toits une recette qui gagne. (L’Est républicain, éd. Nancy, 24 mars 2000, 604.)
2. chons (de lard) "petits morceaux de poitrine de porc, coupés en dés, qui entrent dans la composition
de plats tels que la quiche, la potée lorraine et certaines galettes". Stand. lardon. Synon. région. creton* (sens 3), graton* (sens 1.2.), grillon* (sens 3). – Faire revenir les p’tits chons (RoquesNancy 1979). Salade [de pissenlits] aux chons (L. Bésème-Pia, La Salade au lard en Ardenne et ailleurs…, 1995, 91).
7. Dans une grande marmite en fonte, mettre un morceau de saindoux et des chons de lard gras. Laisser fondre doucement. Placer un morceau de lard fumé, une palette de porc
et des saucisses lorraines fumées. (J.-M. Cuny, La Cuisine lorraine, 1975, 80.)
8. Le jambon fumé, la quiche avec ses chons de lard étaient des plats très appréciés. (J. Chaudron, Autour de la Bessotte. Souvenirs d’un enfant de Lorraine, 1994, 100.)
□ Avec un commentaire métalinguistique incident.
9. Peler des pommes de terre en robe des champs, les écraser. Lier cette purée avec un
peu de farine. Bien malaxer. Composer de petites galettes et les garnir de petits
(chon) morceaux de lard [sic pour l’emplacement et la graphie de la parenthèse]. Cuire au four. (Les Amis du vieux
Gérardmer, Au pays des lacs, 1960, 180.)
■ encyclopédie. Les galettes de chons comprennent, selon les régions, des chons au sens 1 ou au sens 2 (v. Revue lorraine populaire 8, 207).
◆◆ commentaire. Type lexical largement répandu en français médiéval dans le nord de la France, où
il est attesté dep. la 1re moitié du 12e s. (chaon "partie du lard qui ne fond pas et se grille" Psautier d’Oxford, v. Gdf 2, errata), ca 1390 (« Et puis la [la seiche] frit l’en en foison d’uille longuement, tant qu’elle devient
gredelie et recroquillee comme chaons de lart » Menagier de Paris, éd. G.E. Brereton et J.M. Ferrier, Oxford, 1981, 243)a, dont l’aire est aujourd’hui restreinte dans les dialectes à la Champagne, à la Lorraine,
à la Bourgogne, et, en français, à une partie de la Lorraine (Meurthe-et-Moselle,
Meuse et Moselle). Ce régionalisme de toujours n’est pas pris en compte par les dictionnaires
généraux du français contemporain. Il est issu d’un abfrq. *kâda que Haust (R 47, 554) apparente au moyen-néerlandais câde, qui aboutit au néerlandais mod. kaan de sens identique.
a Cf. aussi la locution ne prisier un chaon, « mot conservé dans les patois de la Meuse, sous la forme contractée chon » (GirRoussb, Jeanroy JournSav 1941, 153).
◇◇ bibliographie. MichelLorr 1807 chons pl. (2) ; CrouvChampagne 1975 (1 « Argonne » et 2 « Lorraine ») ; RoquesNancy 1979 (1) ; LanherLitLorr 1990 ; MartinLorr 1995 ; LesigneBassignyVôge
1999 ; Revue lorraine populaire, n°3, 53, n° 7, 166 et n° 8, 207 ; FEW 16, 293a, *kâda.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Meurthe-et-Moselle, 65 % ; Meuse, 50 % ; Vosges, 15 % ;
Moselle, 0 %.
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