flip n. m.
〈Somme, Normandie, Côtes-d’Armor, Morbihan, Ille-et-Vilaine, Mayenne〉 usuel "cidre (ou parfois poiré) chaud et sucré, additionné de calvados ; par méton. verre ou bol de cette boisson". Faire un bon flip pour se réchauffer (BrasseurNorm 1990).
1. […] « fais-nous donc un flip, tiens, aussi ben i pieu toujou [il pleut toujours] » […] (J. L. Trassard, Des Cours d’eau peu considérables, 1981, 128.)
V. encore ici ex. 2.
□ Avec un commentaire métalinguistique incident. Un flip […] du cidre chaud avec de la goutte (SchortzSenneville 1998, 154).
2. Le gosse a arrêté de pleurer, elle a ravivé le feu et elle nous a fait flamber un
flip, du vieux cidre chaud avec du sucre et de la goutte. Son mari qu’était resté au lit
y a demandé ce qui se passait. Elle y a répondu : « rin ». Notre flip bu, on l’a bien remerciée. Jules y a laissé des pièces. On s’en est retourné.
(P. Guicheney, On se meurt apprenti, 1997, 56.)
— Au sing. à valeur générique.
3. À boire / Le flipe [sic] (cidre bouillant, eau-de-vie de pomme et miel). (Pays et gens de France, n° 74, la Somme, 24 mars 1983, 4e de couverture.)
■ encyclopédie. Cette boisson, qui se fait surtout avec du cidre doux, est souvent fortement alcoolisée.
On peut la faire flamber (ALN 288* et BrasseurNorm 1990).
■ dérivés. flipot n. m. "id.". « “J’ prendrais bien un flipot”. Victorine comprit le clin d’œil, elle se dirigea vers le récipient en fonte qui
gardait le cidre au chaud sur une grande chaufferette : “J’ te mets juste une goutte de calva, ça suffit bien” » (S. Anne, Victorine ou le Pain d’une vie, 1985, 157). – Aj. à FEW 18, 63a, flip, où ce mot manque.
◆◆ commentaire. Emprunté dep. 1716 (v. TLF) à l’angl. flip "mélange de bière et d’alcool avec du sucre, chauffé avec un fer rouge" (dep. 1695, v. OED), le terme a désigné en français standard une sorte de punch et
n’y est plus guère en usage aujourd’hui que dans la loc. nom. porto flip "cocktail à base de porto, de sucre et de jaune d’œufs battus" (dep. 1816, v. TLF). Le sens particulier considéré ici, en usage sporadique dans
certaines zones du quart nord-ouest, n’est attesté que dep. 1870 dans le français
du Calvados (« Des individus entrèrent dans le débit et demandèrent du phlippe, boisson qui n’est guère connue que dans notre contrée, qui se confectionne avec du
cidre doux, et de l’eau-de-vie et des épices ; le tout mis ensemble sur le feu » Le Lexovien, dans MoisyNormand 1887, s.v. flip), 1892 en Bretagne (« Francésa et la servante ramassaient hâtivement les chopines de “flip” » Ch. Le Goffic, Le Crucifié de Keraklès, 1988 [1892], 78), 1897 (« le flip délieur de langues » et « le flip, ce punch d’Armor, si gai à écouter bouillir » A. Le Braz, éd. Lacassin, t. 1, 474 et 521). Les dictionnaires généraux contemporains
en rendent compte de manière peu adéquate (Rob 1985, avec la seule marque « vieilli », sans date et sans exemple ; GLLF et TLF, sans marque, avec cependant un exemple
de La Varende [d’origine normande] 1936).
◇◇ bibliographie. MazeHavre 1903 ; VerrOnillAnjou 1908 (avec exemple datable de 1901) ; KervarecQuimper
1910 flipp ; LepelleyBasseNorm 1989 ; BrasseurNorm 1990 ; LepelleyNormandie 1993 ; SchortzSenneville
1998 ; ALIFOms (pts 1, 12, 18 et Nogent-le-Rotrou, 70 ; aux pts 19, 21 et 34, le mot
a pu désigner un "mélange de café, sucre et eau-de-vie bouillis") ; FEW 18, 63a, flip.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Basse-Normandie, 35 % ; Côtes-d’Armor, 30 % ; Morbihan,
25 % ; Finistère, 0 %.
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