lambic ou lambig [lãbik] n. m. ou f.
〈Côtes-d’Armor, Morbihan, Finistère〉 usuel "eau-de-vie de cidre". Stand. calvados, fam. goutte. Synon. région. berluche*. – Pommes au lambig (Recette dans S. Morand, La Cuisine bretonne, 1982,32). Un petit verre de lambic (C. Vlérick, Le Brodeur de Pont-l’Abbé, 2000 [1999], 18).
1. – Vous boirez bien un coup de cidre, Corentin ! […]
– Rien. Je n’ai pas soif. – Le temps est lourd. On attrape chaud à marcher. – J’habite tout près d’ici, vous le savez bien. – Un coup de lambig alors. Seulement une petite goutte. (P.-J. Hélias, Savoir-vivre en Bretagne, 1969, 3.) 2. Le lambig sert presque à tout. Pour guérir le mal de dents, par exemple. Il suffit d’y tremper
une croûte de pain que l’on serre entre les mâchoires à l’endroit de l’élancement.
(P.-J. Héliaz, Le Cheval d’orgueil, 1975, 123.)
3. […] on lui tend un verre de lambig [en note : eau-de-vie] qu’il avale sans sourciller. (Ch. Le Quintrec, Chanticoq, 1989 [1986], 26.)
4. Dans les dernières années de l’autre siècle, on trouvait encore en ces lieux une vie
simple, une authenticité évidente. […] Les maisons étaient sombres et de terre battue.
On y vivait de soupe et de châtaignes, de cidre et de bonne lambig. (Ch. Le Quintrec, Bretagne est univers, 1988, 25.)
5. Il changea de position dans son fauteuil.
– Ouf ! Je suis moulu. Veux-tu prendre la bouteille de lambic et deux petits verres dans le buffet ? Tu boiras bien une goutte avec moi ? Yann revint avec la bouteille et un seul verre. Le recteur* prit le temps d’avaler une gorgée d’alcool. – Tu sais, Yann, une goutte de temps en temps, ce n’est pas un péché. Bien sûr, il vaut mieux s’abstenir comme tu le fais. On ne sait jamais le mal que peut faire cette invention du diable, mais quand même… (C. Vlérick, Le Brodeur de Pont-l’Abbé, 2000 [1999], 244.) V. encore s.v. fort1, ex. 9.
□ Avec ou dans un commentaire métalinguistique incident. Cette eau-de-vie de cidre qui a nom « lambig » (P.-J. Hélias, Le Cheval d’orgueil, 1975, 326). En Cornouaille et en Pays de Lorient, on fabrique une eau-de-vie appelée lambig, forte
et peu fruitée (L’Encyclopédie de la cuisine régionale. La cuisine bretonne, 1979, 155).
6. Cuisinier sorti des conservatoires les plus classiques, Crouzil [à Plancoët, Côtes-d’Armor]
attaque l’animal [le homard] à la régulière, lui faisant supporter de généreux brûlages
au calvados ou au lambic, sorte d’alcool local à base de pommes, réservant les pinces qu’il propose en deuxième
passage dans un ragoût de légumes nouveaux. (J.-P. Quélin, dans Le Monde, 9 juin 1999, 33.)
— Dans le syntagme café-gâteau-lambig (sur le modèle de café-pain-beurre, v. pain).
7. Il lui demanda alors d’aller prévenir le seigneur des lieux qu’un chanteur de gwerz
[en note : chanson de geste] attendait à la porte et qu’il ferait bien valoir ses talents
pour la noce de son fils. Bernez fut introduit. Il entra en chantant dans la salle
où tous les invités prenaient « un café-gâteau-lambig » avant la cérémonie. (A. Jacq, Légendes de Bretagne, 1996, 129.)
■ graphie. La graphie avec ‑g est celle du breton où, cependant, elle note une consonne sourde [k].
■ encyclopédie. V. L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Bretagne, 1994, 38-41.
◆◆ commentaire. Du breton lambig m. "alambic ; liqueur obtenue par la distillation" (Hemon ; lambic dep. 1732, v. EsnaultMétaph 1925), celui-ci emprunté au fr. alambic avec aphérèse ou, plus vraisemblablement, à la forme déjà aphérésée lambic m. "alambic" attestée en français de ca 1270 jusqu’en 1613 et bien répandue jusqu’à l’époque moderne dans les parlers dialectaux
galloromans, qui connaissent aussi (Loir-et-Cher, Allier, Ardennes) l’emploi métonymique
"eau-de-vie" (FEW)a. Documenté dans le français du Finistère dep. 1918 (« J’ai acheté un litre de Lambic qui m’a coûté 7 fr. 50 », Lettre écrite de Landrevarzec, v. EsnaultMétaph 1925), le mot est absent des dictionnaires
généraux qui ne connaissent que l’homonyme lambic ou lambick "variété de bière belge" (dep. 1832, emprunt au flamand ; v. FEW 16, 441b, lambick).
a Pour un exemple (en français rural) renvoyant aux Côtes-d’Armor, cf. Michel Tournier,
Les Météores, 1989 [1986], 26 : « Ensuite Denise avait été recueillie par un bouilleur d’eau-de-vie qui promenait sa
“lambic” de ferme en ferme et qui lui avait communiqué le goût du calvados avant de l’abandonner
à Notre-Dame du Guildo » (Frantext).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Finistère, 95 % ; Côtes-d’Armor, 65 % ; Morbihan, 60 %.
|