mettre v. tr.
"(exprimer telle ou telle potentialité)". Surtout dans les emplois suivants.
1. fam.
1.1 〈Allier, Hérault, Aude, Ariège, Haute-Garonne (Toulouse), Ardèche, Puy-de-Dôme, Dordogne,
Pyrénées-Atlantiques〉 mettre les/ses dents "avoir les dents qui poussent (d’un enfant)". Stand. faire ses dents.
1. […] âge auquel le bâtard a mis ses dents : 18 mois. (R. Pilhes, La Rhubarbe, 1965, 212.)
2. La seconde plaie de l’enfance [après les vers] n’est autre que l’éruption dentaire. Si bébé souffre d’une angine, d’une otite,
d’un rhume, que sais-je ? c’est qu’il met ses dents. (P. Perrève, La Burle, 1984 [1981], 108.)
3. Il [un taupier] réservait les pattes avant et les mâchoires [des taupes] pour les
femmes dont les nourrissons mettaient les dents. Elles en faisaient de petits sachets rectangulaires, sortes de scapulaires magiques
qu’elles pendaient au cou des enfants contre les fièvres dentaires et leurs douleurs.
(M. Rouanet, Bréviaire 1994 [1987], 113.)
4. Moi, je me suis assise dans un coin avec Madame Nogué, qui me racontait combien son
fils leur avait toujours donné de la satisfaction. Elle me disait que, quand il était
tout petit, il pleurait jamais, qu’il l’avait jamais empêchée de dormir la nuit, même
au temps où il mettait ses premières dents. (G. de Lanauve, Anaïs Monribot, 1995, 258.)
1.2. 〈Allier, Drôme, Provence, Hérault, Cantal, Puy-de-Dôme, Pyrénées-Atlantiques (Béarn).〉 mettre des feuilles "se garnir de feuilles (d’un arbre)". Stand. rare feuiller. – Le tilleul met ses feuilles.
5. La taille [des amandiers], personne n’oubliait de la faire. Ça se faisait à n’importe
quelle saison, sauf au moment où ils faisaient leur végétation. À partir du moment
où ils avaient commencé à mettre des feuilles, ça n’était plus valable. (L. Merlo, J.-N. Pelen, Jours de Provence, 1995, 200.)
— Par métaphore. Stand. fig. prendre racine.
6. – […] Ce qu’il me faut, c’est une béquille. Allez demander au père Rivoire s’il veut
m’en prêter une. Je peux pas rester sur ma bécane jusqu’à mettre des feuilles ! (J. Mallouet, De mes montagnes, 1997, 115.)
1.3. 〈Doubs (Besançon), Hérault, Aude, Haute-Garonne (Toulouse)〉 mettre du ventre "prendre de l’embonpoint (notamment au niveau de l’abdomen)". Stand. grossir, fam. prendre du ventre.
7. À midi, il dînait* bien, trop bien même ! Il avait mis un ventre ! (G. de Lanauve, Anaïs Monribot, 1995, 24.)
2. rural 〈Haute-Saône (Authoison).〉 Dans des loc. verb. mettre du pis « La vache met du pis quand elle est sur le point de vêler et que son pis grossit » ; mettre la cire « La jument met la cire quand elle est sur le point de mettre bas et qu’il se forme de petites chandelles
au bout des tétons » (DondaineAuth 1976, 59).
◆◆ commentaire. Locutions sans écho dans la lexicographie générale du français, principalement en
usage dans la partie méridionale de la France ; aj. à FEW 6/2, 187, mittere ; DesgrToulouse1766 s.v. sens ; SaugerPrLim 1825 ; PomierHLoire 1835 mettre du sens, de l’esprit ; AnonymeToulouse 1875. 1.1. Attestée dans le français de Toulouse dep. 1766 (« Les Gascons font un usage bien singulier du Verbe mettre. Ils disent : Quand mettrez-vous du sens, quand aurez-vous du sens ? […] Cet enfant ne dort plus, depuis qu’il
met ses dents […]. Ces Agneaux commencent à mettre des cornes. Les vieux arbres mettent du gui. Les vieilles murailles mettent du salpêtre. Les vieux toits mettent de la mousse » Desgrouais), de Montpellier dep. 1802 (« Les dents percent à cet enfant ; il lui perce une dent, et non, il fait, ni il met une dent » VillaGasc), de Lyon dep. 1894 (Puitspelu), de Mâcon dep. 1903, la locution mettre ses dents ne semble plus en usage dans ces villes, mais on la relève en Ardèche (v. ici ex. 2)
et en Suisse romande (où elle est attestée dep. 1849 « jusqu’à nos jours » LengertAmiel) ; elle est aussi connue dans l’Allier et le Puy-de-Dôme (Fr. Lagueunière).
1.2. La loc. verb. mettre des feuilles est documentée dep. 1925 dans le français du Gers (« Et lorsqu’ils se lignifient, mettent des feuilles, celles-ci sortent chétives, décolorées » Pesquidoux 1925, Frantext) ; elle est aussi connue en Provence (ex. 5), ainsi que dans l’Allier et le Puy-de-Dôme
(Fr. Lagueunière). 1.3. La loc. verb. mettre du ventre semble en usage dans deux aires distinctes : à l’est dans le Doubs (elle a été relevée
aussi en Suisse romande par Pierreh) et dans le Sud-Ouest (dep. 1950, Séguy). – VillaGasc
1802 ; PuitspeluLyon 1894 mettre ses dents, s.v. dent ; Mâcon 1903-1926 mettre ses dents ; SéguyToulouse 1950 mettre les dents/du ventre/de la connaissance « général » ; JouhandeauGuéret 1955, 82 « Mettre ses dents se disait des enfants dont les dents commencent à pousser » ; DromardDoubs 1991 et 1997 mettre du ventre ; LengertAmiel mettre ses dents (1849) ; MoreuxRToulouse 2000 « régionalisme inconscient, d’usage général en ce qui concerne mettre du ventre, moins fréquent dans ses autres emplois ». 2. Ces locutions n’ont pas été repérées en dehors du français de la Haute-Saône.
◇◇ bibliographie. (2.) DondaineAuth 1976, 59.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
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