anchoïade n. f.
〈Provence, Languedoc, Lozère, Pyrénées-Orientales〉 usuel
1. "préparation à base d’anchois, en part. sauce à base d’anchois, ail et huile d’olive". L’anchoïade est commercialisée en pots de verre ou en tubes (L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Provence-Alpes-Côte d’Azur, 1995, 313).
1. […] une moitié de pain d’Aixa fendu dans sa longueur, et qui grillée à point permettra de préparer de si bonnes
anchoïades. (P. Roux, Contes pour un caganis, 1983 [1978], 113.)
a Pain dont « la pâte n'est pas manipulée avec de la farine mais avec de l'eau » (Walter ColloqueRennes 1996, 222).
2. Tandis que ses hôtes faisaient honneur à des crudités qu’on trempait dans l’anchoïade, l’Escrivain prépara à la cuisine une omelette de quinze œufs, mordorée et baveuse
à souhait […]. (R. Sabatier, Les Enfants de l’été, 1986 [1978], 358.)
3. Voici les légumes traditionnels, dont le symbolisme vaut moins que leur maturité hivernale :
le chou-fleur, le cardon […], le céleri, l’artichaut. On peut les servir soit en salade,
à l’huile d’olive pressée dans l’année, soit en sauce blanche, soit encore accompagnés
d’une anchoïade. (J.-P. Clébert, Les Fêtes en Provence, 1982, 21.)
4. L’anchoïade doit rester chaude jusqu’au moment de servir. Il faut donc la laisser au bain-marie.
Avec le céleri en branches elle est exquise. Sur du pain, délicieuse, surtout s’il
est grillé. Les feuilles d’artichaut y sont divines et les salades aussi ! (M.-A. Gruénais-Vanverts,
La Cuisine de Provence-Lubéron, 1982, 207.)
5. La maison Roque [à Collioure] demeure l’une des meilleures de la place : l’anchois
est, ici, vendu entier au sel, en filets à l’huile d’olive ou à l’huile végétale et
sous forme d’anchoïade et de crème d’anchois. (É. de Meurville & M. Creignou, Le Guide des gourmands 1991, 1990, 130.)
6. L’anchoïade […]. On la sert avec des bouquets de chou-fleur cru, des carottes crues ou cuites,
des cœurs de salade, des radis, des tomates, des pommes de terre bouillies, du concombre
et surtout des cœurs de céleri […]. Juin se prête à l’anchoïade de jeunes légumes facile à digérer, fraîche dans l’été commençant. Préparez toujours
trop de sauce. Le lendemain vous pourrez présenter une grillade de bœuf qui sera nappée
d’anchoïade. (M. Rouanet, Petit Traité romanesque de cuisine, 1997 [1990], 155.)
7. Souvent on faisait une anchoïade, ça se faisait bien : un pot d’anchois, un peu d’huile d’olive et le céléri, la carde…
(L. Merlo, J.-N. Pelen, Jours de Provence, 1995, 48.)
8. En fait de casse-croûte, Fonfon avait préparé une anchoïade qu’il sortait juste du four. […] Fonfon m’adressa un clin d’œil, puis on se mit à
tremper nos tranches de pain dans la purée d’anchois, relevée de poivre et d’ail haché.
(J.-Cl. Izzo, Chourmo, 1996, 21.)
9. […] les mets simples comme, le matin, une bonne anchoyade avec le quichet (tartine aillée recouverte d’anchois écrasés dans l’huile d’olive) et parfois un
accompagnement d’œufs durs, de cœur de céléri : pour cette préparation mes parents
auraient fait l’arbre droit ou les pieds au mur. (RoubaudMars 1998, 56.)
— à l’anchoïade loc. adj.
10. Haricots à l’anchoïade / […] De simples haricots blancs cuits à l’eau légèrement salée. Egouttés et assaisonnés
à chaud d’une « pommade » composée de filets d’anchois pilés en compagnie des grains* d’ail, d’un jaune d’œuf. Le tout sera monté comme un aïoli avec deux louches d’huile
d’olive. (A. Bonnaure, La Cuisine rustique. Languedoc, 1971, 47.)
2. Par méton. "repas dont cette préparation constitue le plat principal".
12. Fête du vent. Fête des cerfs-volants. […] Le tout, dans le rire, s’achève en fin de
jour par une grande anchoïade. (A. Medam, Blues Marseille, 1995, 119.)
13. Après le bal [du 14 juillet], dans la courette, chacun trouvait sa place pour la traditionnelle
anchoïade accompagnée d’un vin rosé aux belles couleurs d’aurore […]. (M. Fillol, Petites Chroniques des cigales, 1998, 85.)
■ graphie. On relève aussi la graphie anchoyade, moins usuelle : « Il me servait l’anchoyade, […] me conjurant d’accompagner de beaucoup d’huile et de force pain le précieux “pissalé”, coulis d’anchois, maritime nectar, que les charcutiers vendent à présent dans des
tubes » (J. Audiberti, Dimanche m’attend, 1965, 94) ; « – […] Très bon, ce truc-là, c’est un plat local, comment l’appelez-vous ? – L’anchoyade » (J.-P. Chabrol, Les Rebelles, 1965, 330).
■ encyclopédie. Les recettes de cette préparation ont varié selon les époques (au 19e s., selon M. Morard, elle consistait en une tartine de pain arrosée d’huile d’olive
et aillée, sur laquelle on écrasait des anchois et que l’on passait au four ; en 1931,
BrunMars la définit comme un "plat d’anchois, de tomates et de piments") et si l’anchoïade s’apparente aujourd’hui souvent à une sauce liée crue (commercialisée
sous forme de crème homogène), elle peut être en Roussillon une "salade d’anchois" (CampsRoussillon 1991). V. recette d’ « Anchoïade » dans L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Provence, Alpes, Côte-d’Azur, 1995, 400 et d’ « Anchoyade au gros sel » id. Languedoc-Roussillon, 1998, 339.
◆◆ commentaire. Attesté dep. 1886 (anchoyade, M. Morard, Les Secrets de la cuisine dévoilés ; 1900 anchoïade, J.-B. Reboul, La Cuisinière provençale – tous deux dans HöflerRézArtCulin), le mot est entré dans la lexicographie régionale
en 1931 (BrunMars). De pr. lang. anchouiado f. "sauce à l’anchois" (Mistral ; FEW 25, 7b, aphye), lui-même dérivé sur pr. lang. anchoio "anchois", le passage au français supposant une dédialectalisation de [u] prétonique. Caractéristique de l’aire côtière méditerranéenne, le terme commence
à se dérégionaliser par la voie du commerce de grande distribution et du tourisme,
ce qui lui a valu d’être récemment pris en compte par la lexicographie générale (Rob 1985,
qui le donne comme un régionalisme de Provence ; sans marque dans Lar 2000 et NPR 2000) ;
L’anchoïade est le nom d’un restaurant d’Agay (Var).
◇◇ bibliographie. BrunMars 1931 ; LarGastr 1938 anchoyade ; MartelProv 1988 ; CampsLanguedOr 1991 ; CampsRoussillon 1991 ; ArmKasMars 1998
« emblématique de la cuisine provençale » ; aj. à FEW, loc. cit.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Alpes-Maritimes, Gard, Hérault, 100 % ; Hautes-Alpes, 75 % ;
Var, Vaucluse, 65 % ; Aude, Bouches-du-Rhône, 60 % ; Lozère, 55 % ; Alpes-de-Haute-Provence,
50 %.
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