attraper1 v.
I. Emploi intr. ou (moins usuel) pron. 〈Surtout Rhône, Loire, Isère, Drôme, Hautes-Alpes (Champsaur), Provence, Pyrénées-Orientales,
Ardèche, Haute-Loire (Velay), Puy-de-Dôme, Corrèze, Dordogne, Lot-et-Garonne, Gers,
Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques, Landes, Gironde〉 usuel.
— [Le sujet désigne un aliment] "coller au fond d’un récipient lors de la cuisson". Stand. attacher. – Ça c’est encore attrapé (ArnouxUpie 1984). Mes lentilles vont s’attraper (BoisgontierAquit 1991). Mon gâteau n’est pas présentable, je n’ai pas réussi à le démouler, il s’était attrapé (GermiChampsaur 1996).
1. […] ces pommes de terre sautées à la poêle que ma mère ratait toujours un peu, les
laissant attraper au fond, ce qui me plaisait par-dessus tout. (P. Magnan, L’Amant du poivre d’âne, 1988, 141.)
□ En emploi métalinguistique.
2. S’attraper c’est comme ça qu’on dit en français ou attraper. Y en a qui disent attacher, mais c’est pas français ça. La daube a attaché au fond de la casserole… ça se dirait
pas. (Témoin, août 1977, dans MédélicePrivas 1981, 139.)
● Au part./adj.
3. S’il en [du millas*] restait au fond du chaudron, on le mettait dans des assiettes, avec un peu de lait
et du sucre, ou un œuf. C’était une gourmandise ! Ça et racler le fond quand c’était
un peu attrapé ! (G. Charuty, Gestes d’amont, 1980, 11.)
■ dérivés. peu usuel attrapé n. m. "ce qui a pris au fond d’un récipient lors de la cuisson d’un aliment". « – Je parie que tu as encore oublié de tourner la soupe, ça sent l’attrapé, disait ma mère en enlevant ses gants percés pour soulever le couvercle de la marmite » (M. Raphaël, De deux choses l’une…, 1949 [1947], 75). – Part. passé substantivé, attesté en français du Sud-Ouest dep.
1895 (« c’est de l’attrapé, ça sent l’attrapé » PépinGasc) ; aj. à FEW 17, 354b, trappa.
— [Le sujet désigne un récipient de cuisson] "être de nature à ce que les aliments collent au fond lors de la cuisson". C’est bien commode, ces nouvelles poêles : ça n’attrape jamais (GononPoncins 1984).
II. 〈Centre-Ouest, Gironde〉 fam. "blesser (notamment en heurtant, en coinçant quelque part)".
4. – Ah ! mon pauvre Dubos, il vient de nous arriver malheur. Tiens, regarde par là.
Nous avons attrapé un homme au croisement des routes dans le bourg* ; Dieu sait comment cela s’est fait. ! (A. Dupin, Pierric, 1953, 109.)
— Emploi pron. Je me suis attrapé en ouvrant une boîte de conserves (RézeauOuest 1984).
◆◆ commentaire. Emplois par restriction de fr. attraper "prendre à une trappe, à un piège" (dep. 1165-1170, Chr. de Troyes, FEW).
I. Au sens de "coller, adhérer", le verbe est enregistré dans Lar 1866, mais suivi d’exemples qui n’illustrent pas
l’emploi décrit ci-dessus (La pluie s’était attrapée aux vêtements. La main était si serrée que les doigts s’étaient
attrapés) ; mais cf. MâzucPézenas 1889, 88 « La fricassée s’est attrapée à la poêle, elle sentira le roussi ». Ce sens n’apparaît plus dans les dictionnaires généraux contemporains (absent de
GLLF, TLF, Rob 1985). Il est probable que l’aire actuelle de attraper "prendre au fond" est plus large, malgré la concurrence de quelques subrégionalismes, que celle indiquée
ici (selon B. Moreux, cet emploi est aussi en usage dans le français de la Bretagne
romane).
II. TLF est le seul dictionnaire général contemporain à enregistrer cet emploi, sans marque
diatopique, avec un exemple de Balzac (1843). Il s’agit d’un archaïsme (attesté dep.
La Rochefoucauld et Sévigné, enregistré dans Besch 1845 ; v. FEW), dont divers glossaires
conservent la trace au tournant des 19e et 20e s. (notamment en Ardennesa, Normandie, Ille-et-Vilaine ; v. encore FertiaultVerdChal 1896).
a V. aussi ALW 15, 42b-43b « fr. rég. de Wallonie s’attraper “se blesser ; se faire attraper” ».
◇◇ bibliographie. (I.) PépinGasc 1895 ; RLiR 42 (1978), 157 ; MédélicePrivas 1981 ; ArnouxUpie 1984 ; GononPoncins
1984 « usuel, tous âges » ; MartinPilat 1989 « usuel » ; BoisgontierAquit 1991 ; MazaMariac 1992 ; FréchetMartVelay 1993 ; FréchetAnnonay
1995 ; LaloyIsère 1995 attrapé adj. "se dit d’une préparation culinaire qui attache" ; GermiChampsaur 1996 ; FréchetDrôme 1997 ; FEW 17, 354b, *trappa. – (II.) RézeauOuest 1984 et 1990.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : (I) Région lyonnaise, 75 %. (II) Vendée et Charente-Maritime, 100 % ; Deux-Sèvres et Charente, 75 % ; Vienne, 60 %.
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