bouffe n. f.
〈Provence (rare), Hérault, Aude, Pyrénées-Orientales, Ariège, Haute-Garonne, Tarn, Tarn-et-Garonne,
Lot, Aveyron, Gers, Gironde〉 fam. "coup sur la joue, appliqué du plat ou du revers de la main". Stand. gifle, fam. baffe.
1. – Parle doucement, il va t’entendre et il te foutra une bouffe.
– Quoi, à moi, une bouffe ? Je voudrais bien voir ça. (H. Soum, Chronique des bords de Garonne. La Pigassa, 1992, 261-262.) — Par ext. (notamment au rugby) "choc physique plus ou moins brutal ; coup de poing au menton".
2. On sort d’un match de rugby […] où l’on s’est pris de braves* bouffes avec les côtes toutes mâchées*, des bugnes* de partout. (Y. Rouquette, « Histoires de parler », dans Toulouse, 1991, 142.)
3. – […] Quand vous jouez [au rugby] au plus haut niveau, il y a une intensité physique
telle que, pour aller mettre des bouffes, gratuitement, il faut être très fort… (P. Dessaint, Du bruit sous le silence, 1999, 193.)
4. La mêlée est l’essence du rugby […]. Ne jamais perdre de vue que la moitié de l’équipe,
l’arrière, les trois-quarts, les demis, ceux qui « jouent du piano » pendant que les « déménageurs » [= les avants] se mettent des bouffes, ne savent pas, ne sauront jamais ce qui se passe sous la mêlée. (Fr. Marmande, dans
Le Monde, 9 octobre 1999, Supplément « La coupe du monde de rugby », I.)
■ graphie. Sous l’influence de l’occitan, les glossaires régionaux optent parfois pour la graphie
boufe ; on a retenu ici la forme bouffe, qui est celle du français contemporain et qu’utilisent les auteurs cités.
◆◆ commentaire. Emprunt à l’occitan de même sens (déjà aocc. bofa, v. LvP), lui-même de la racine onomatopéique buff- "souffler" (cf. fr. soufflet < souffler), bouffe n’est pas documenté avant 1949a : absent des dictionnaires généraux contemporains, ce terme, caractéristique de la
Provence méditerranéenne et du Languedoc, n’a été relevé dans les glossaires régionaux
que récemmentb. Comme en témoignent les ex. 2 à 4, il est particulièrement usuel dans l’argot du
rugby (cf. BouchardSport 1996 "uppercut") ; il ne semble pas avoir autrement pénétré le français fam. ou pop., l’attestation
« flanquer des bouffes » (A. Ernaux, La Femme gelée, 1989 [1981], 75) semblant un cas isolé.
a La forme bouffe relevée en wallon en 1757 (FEW) est une formation parallèle, qui ne doit évidemment
rien à l’aocc. D’autre part, la présence du mot dans la lexicographie bilingue semble
sans postérité : « Bofetá, vn soufflet, vne iouee, vne bouffe, sorgozzone, schiaffo, guanciata, mostazzone, buffetto » (Tesoro de las tres lenguas… / Thresor des trois langues, françoise, italiene, et espagnolle, de Hierosme Victor, Genève [Albert et Pernet], 1609 ; communication de P. Enckell,
qui précise : « le mot est absent de la partie fr.-it.-esp., qui connaît par contre buffe dans le même sens ».
b On ne l’a pas retrouvé chez Pagnol, malgré l’affirmation de Ph. Blanchet : « Je te fous une boufe, Marius ! Tout le monde se souvient de cette réplique de Raimu, dans la pièce [?] de Pagnol » (Les Mots d’ici, Aix-en-Provence, 1995, 17).
◇◇ bibliographie. MichelCarcassonne 1949, 11 ; SéguyToulouse 1950, § 175 boufe ; BouvierMars 1986 boufe ; BlanchetProv 1991 boufe ; SuireBordeaux 1991 bouffe ou bouïffe ; BoisgontierMidiPyr 1992 « surtout Gers » ; CovèsSète 1995 boufe ; ArmKasMars 1998 boufe « vieilli » ; BouisMars 1999 boufe ; MoreuxRToulouse 2000 (citant Soum, ici ex. 1) ; FEW 1, 596b, buff-.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Ariège, Aveyron, Haute-Garonne, Lot, Tarn, Tarn-et-Garonne,
100 %.
|