cagagne n. f.
1. 〈Drôme, Hautes-Alpes, Provence, Gard, Hérault, Aude, Pyrénées-Orientales, Ariège, Haute-Garonne,
Tarn, Tarn-et-Garonne, Lot, Aveyron, Lozère, Ardèche (Annonay, Privas)〉 très fam. "évacuation fréquente de selles liquides". Stand. diarrhée, pop. chiasse. Stand. région. déclichette*, dringue*. – Je vais pas attraper la cagagne pour te faire plaisir (réponse d’un petit-fils à sa grand-mère qui voulait lui faire manger des pommes
un peu trop vertes)(NouvelAveyr 1978) ; avoir/donner la cagagne.
1. « On dirait une pastèque sans sucre… C’est frais. Un parfum léger, indéfinissable… Mais
délicieux !
– Il faudra voir, reprit Ugolin, si ça plaît aux lapins, et si ça ne leur donne pas la cagagne… » (M. Pagnol, Jean de Florette, 1995 [1963], 786.) 2. Castor, chef cuistot, tempérait leur appétit par cette terrible sentence culino-médicale :
« Le lapin, c’est comme le cochon en plus petit. Quand on le mange ça doit plus saigner.
Autrement, ça te donne la cagagne […]. » (M. Stèque, La Tour de Siagne, 1981, 71.)
3. – […] tu prendras de l’eau dans ta bouche […] et tu l’avaleras lentement.
– Mais j’aurai la cagagne, papé*. – Je ne pense pas. (G. J. Arnaud, Les Oranges de la mer, 1990, 190.) 4. Pascal avala son café au lait d’un trait.
– Bois pas si vite que* tu vas attraper la cagagne. (P. Cauvin, Rue des Bons-Enfants, 1990, 56.) □ En emploi métalinguistique.
5. J’ai dû aller à l’école pour savoir qu’on ne dit pas la cagagne mais la colique […]. (Y. Rouquette, « Histoires de parler », dans Toulouse, 1991, 141.)
— Par méton., au sing. à valeur collective "matières fécales". Stand. pop. merde.
6. […] on le [le camion du vidangeur] suivait jusqu’au port en courant et en chantant
sur l’air des lampions : / La cagagne !… / La cagagne !… C’est le camion de la cagagne !… (M. Albertini, Les Merdicoles, 1998, 48-49.)
■ variantes. Par réduplication euphémique 〈Drôme, Ardèche (Annonay)〉 gagagne n. f.
■ remarques. cagagneux, ‑euse adj. peu usuel "souillé d’excréments". Stand. fam. ou pop. merdeux. Voir s.v. escoube, ex. 1.
2. Au fig. 〈Bouches-du-Rhône (Marseille), Gard (Alès)〉 pop. "grande frayeur". Il m’a surprise dans le noir que* ça m’a foutu une de ces cagagnes ! (BouvierMars 1986). Quand je l’ai vu avec le fusil, j’ai eu une de ces cagagnes ! (MazodierAlès 1996).
3. Par anal. 〈Haute-Garonne (Toulouse)〉 pop., vieilli "petit objet sans valeur ; résultat piteux" (SéguyToulouse 1950). Stand. fam. ou pop. merde.
4. 〈Haute-Garonne (Toulouse)〉 "grande paresse". ça me fout la cagagne loc. phrast. pop. "(pour exprimer qu’on n’a plus le courage de faire qqc.)". Synon. région. cagne*.
◆◆ commentaire. Non pris en compte par la lexicographie générale, cagagne est un emprunt, qu’on a tout lieu de croire assez récent, à l’occ. cagagno "diarrhée" (Mistral ; FEW 2, 18a, cacare) ; il est surtout caractéristique du français de Provence et de Languedoc. L’emploi
4 est sans doute dû à un croisement sémantique avec cagne "paresse".
◇◇ bibliographie. JoblotNîmes 1924 ; SéguyToulouse 1950, § 165 ; NouvelAveyr 1978 ; RLiR 42 (1978),
162 ; MédélicePrivas 1981 « on l’utilise de manière expressive pour amuser les amis » ; BouvierMars 1986 ; MartelProv 1988 ; BlanchetProv 1991 ; LangloisSète 1991 ; BoisgontierMidiPyr
1992 ; CouCévennes 1992 caguagne ; ArmanetBRhône 1993 ; FréchetAnnonay 1995 ; MazodierAlès 1996 ; FréchetDrôme 1997 ;
ArmKasMars 1998 ; BouisMars 1999 ; MoreuxRToulouse 2000 ; aj. à FEW, loc. cit.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Hautes-Alpes, Alpes-Maritimes, Ariège, Aude, Aveyron, Gard,
Hérault, Haute-Garonne, Lot, Lozère, Pyrénées-Orientales, Tarn, Tarn-et-Garonne, 100 % ;
Var, 80 % ; Bouches-du-Rhône, 60 % ; Alpes-de-Haute-Provence, Vaucluse, 50 %.
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