cani n. m.
〈Lyon, Saint-Étienne〉 fam. "débit de boissons". Stand. café, fam. bistrot, troquet. – Aller au cani.
1. C’est le « canis » lyonnais. Un plancher avec de la sciure. Quelques tables lustrées. Un petit comptoir
derrière lequel le patron violacé met des élastiques de couleur au goulot des « pots »* afin d’en différencier le contenu : un élastique rouge pour le beaujolais, un vert
pour le côtes du Rhône. (San-Antonio, Le Standinge selon Bérurier, 1970 [1965], 178.)
2. […] l’arrière-salle d’un cani, modeste mais propre et confortable, que seules les buées sur ses vitres, en hiver,
et les odeurs de cuisine voluptueuses qui s’en échappent vous permettront de reconnaître.
(Cl. Bourgendre, Le Tablier de sapeur, 1979, 199.)
3. Pour laisser les esprits se calmer, j’ai changé de bistrot. J’ai choisi le Café de
Savoie [à Givors, Rhône]. Un « cani » de pépères. (Le Nouvel Observateur, 23 mars 1983, 64.)
4. Une silhouette, celle de Pierrot. Il vient d’entrer dans le cani. (San-Antonio, Renifle, c’est de la vraie, 1988, 205.)
5. Je descendis à pied le labyrinthe de rues, m’attardai devant deux ou trois canis et me décidai pour un minuscule bouchon* pas très loin du lycée de la Martinière. (Fr. Joly, Be-bop à Lola, 1989, 51.)
6. C’est Jacky qu’a débarqué. Comme un fou qu’il était. Je te dis pas. C’est Bob qui
me l’a dit. Il voulait savoir où était Bens et tout. Il lui dit qu’il a vu sa bagnole,
que tous les canis sont fermés, qu’il sait qu’elle est là et tout, qu’il veut juste lui parler, qu’on
peut pas l’empêcher… (M. Sergent, Normal, 1991, 225.)
□ Avec un commentaire métalinguistique incident.
7. Outre les deux cafés (des « canis », comme on dit), la rue Rivet [dans le quartier de La Croix-Rousse, à Lyon] comprend
surtout un commerçant doué d’une grande valeur symbolique dans ce petit quartier.
(M. de Certeau et al., L’Invention du quotidien, 1994 [1980], t. 2, 105.)
■ graphie. La graphie canis dans l’ex. 1, qui aligne la finale sur le suffixe ‑is, témoigne de l’incertitude à orthographier un terme qui appartient principalement
à l’oralité.
◆◆ commentaire. Caractéristique du français de Lyon (et relevé aussi à Delémont, en Suisse romande),
ce sens n’est pris en compte ni par la lexicographie générale ni par les relevés régionaux.
Probablement de l’argot lyonnais cani "petite chambre meublée" Nouguier, v. EsnaultArg 1965 (cf. Mâcon 1926 canil [kani] "chenil, niche à chiens ; logement sale, lit mal fait" et TavBourg 1991 "niche du chien"), ce sens a d’abord été relevé dans l’argot de soldats suisses (ca 1904-1914, v. EsnaultArg 1965 ; GPSR, qui renvoie à Roux [1921] et à Granger [1916]).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
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