charmille n. f. ou m.
〈Saône-et-Loire, Côte-d’Or, Vosges, Haute-Saône, Doubs, Jura, Savoie, Isère (La Combe-de-Lancey)〉 usuel
1. "arbre ou arbrisseau vivace (Carpinus Betulus L.), dont le bois est blanc, dur et à grain fin". Stand. charme. – Buisson de charmilles (L.-A. Gauthier, Les Fidarchaux de Cabrefontaine, 1978, 176). Branchages de charmille (GranjeanFougerolles 1979, 239). Couper des charmilles dans le bois communal (Ibid.). Sous la charmille.
1. J’étais caché derrière un petit buisson de charmilles […]. ([L. Fénix], Histoire passionnante de la vie d’un petit ramoneur savoyard, 1978 [av. 1958], 117.)
2. […] le grand panier qu’elle portait d’une main, s’appuyant de l’autre sur son bâton
[…]. Une bonne branche de charmille noueuse dont elle menaçait les gamins qui lançaient des pierres dans son enclos.
(B. Clavel, Malataverne, 1990 [1960], 67.)
3. La bise* menait le branle dans les acacias et les frênes. Quelques charmilles encore feuillues grelottaient. Quantin sentit le froid qui l’empoignait. (B. Clavel,
Le Voyage du père, 1972 [1965], 227.)
4. – […] Rien ne vous empêche de chercher […] pendant que je suis occupé. Et faites bien
le tour des pieds de charmilles, c’est là que les jaunottes* poussent le mieux. (R. Vuillemin, Les Chroniques du « Chat bleu », 1975, 85.)
5. Des charmilles et quelques résineux poussaient dans ce terrain très en pente, touffu à certains
endroits […]. (A. Nicoulin, Le Dessus du Mont, 1979, 78-79.)
6. Mais jusque dans les fermes les plus éloignées, on ne pouvait ignorer que c’était
la Fête-Dieu : des branches de charmille où à leur défaut de hêtres ou de noisetiers décoraient de place en place les façades
des fermes et de leurs dépendances […]. (M. Sauvage, « Les travaux et les jours dans les Vosges saônoises », dans Barbizier. Bulletin de liaison de folklore comtois n.s., n° 9, décembre 1980, 359 ; sic charmille, mais hêtres, noisetiers.)
7. Les endroits les plus éloignés étaient décorés [pour la Fête-Dieu] comme à Servance
ou à Corravillers ; dans la vallée du Breuchin, les calvaires reçevaient [sic] une branche de charmille. (J.-Chr. Demard, Le Guide de la Haute-Saône, 1990, 70.)
8. Le sentier n’avait pas un mètre de large : en bien des endroits, sur son tracé, les
noisetiers, les charmilles tordues et les ronces formaient une manière d’entrelacs que la lumière traversait
comme une pluie dansante. (P. Pelot, Ce soir, les souris sont bleues, 1993, 224.)
V. encore s.v. deux, ex. 4.
— Emploi non-comptable.
9. Le village possède plus de 120 hectares de bois communaux. […] Les essences dominantes
sont « le foyard »* (hêtre) et le « charmille » (charme), sauf une petite région qui est une chênaie […]. (FleischJonvelle 1951).
— Avec jeu de mots.
10. Bien amusante également était la coutume des Mais […]. Un habitant de Coincourt [Meurthe-et-Moselle] se souvient : « En mai, on montait sur les maisons pour placer, dans les cheminées, là où il y avait
des jeunes filles à marier : des branches d’épines (si la jeune fille de la maison
avait mauvais caractère), de saule (si elle tenait mal son ménage), de charmille (si elle était charmante) etc. […]. » (La Mémoire de la terre au Pays du Sânon, 1996, 281.)
2. Par méton. "bois de cet arbre". J’ai rentré 20 stères de charmille sous la remise (DromardDoubs 1991).
11. [Contre le mal de dents] On prenait un bain de pieds bouillant – avec de la cendre
de verne* ou de charmille (la cendre de chêne, au contraire, activait le mal). (L. Gauthier, « Le mal de dents et les vieux Bressans », À travers notre folklore et nos dialectes (Bourgogne) 4, 1977, 247.)
12. Un grand feu de charmille flambait dans l’âtre, sous la crémaillère où mijotait une marmite de soupe au lard.
(A. Besson, La Marie-des-Bois, 1978, 63.)
13. […] les rondins de charmille et les quartiers de chêne se consumaient dans les flammes d’un feu d’enfer […]. (G. Garillon,
Vosges de mon enfance, 2000, 129.)
14. Bouleau et verne* sont appréciés par le sabotier, le charmille est matière première pour usiner les navettes des filatures et tissages Zeller et
le rondin de charbonnette* fait allumette et petit bois dans les fourneaux et cheminées. (Le Pays, 8 février 2000, 21 [Article sur un ancien bûcheron de Petitmagny, Territoire-de-Belfort].)
V. encore s.v. charbonnette, ex. 3 ; fayard, ex. 41.
◆◆ commentaire. Le fr. standard connaît aujourd’hui charmille "haie ou berceau de charmes" (dep. Trév 1732, FEW) et, par ext., "haie ou berceau de toutes sortes d’arbres" (dep. Sainte-Beuve, 1829, Frantext). Mais le terme s’emploie au sens de "charme" (dep. Lamartine [né à Mâcon], Jocelyn, 1836, un tronc de charmille, Frantext) dans une large aire de l’Est, qui a conservé et adapté le sens ancien de charmille, au f. sing. à valeur collective, "ensemble de jeunes plants de charmes" (1669, TLF ; Fur 1690 "du plant de charme" un millier de charmille) ; cette aire est toutefois beaucoup plus restreinte que l’aire dialectale qui, souvent
en alternance avec le simple, a couvert ou couvre notamment la Normandie, le Maine,
l’Anjou, le Poitou, la Saintonge, la Lorraine, la Franche-Comté, la Suisse, le Rhône.
Cet emploi est absent des dictionnaires généraux contemporains et sa faible prise
en compte par les relevés régionaux est sans doute un indice de légitimité.
◇◇ bibliographie. ContejeanMontbéliard 1876 dans la métalangue s.v. tchairmé ; Mâcon 1926 ; DuraffGloss, § 8746 dans la métalangue ; FleischJonvelle 1951 ; VincenzCombeL
1974, 67 et 107, n. 39 ; TavBourg 1991 « utilisé dans la presse et considéré comme français [standard] » ; DromardDoubs 1991 et 1997 ; FEW 2, 407a, carpinus.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Côte-d’Or, 100 % ; Saône-et-Loire, 71 % ; Nièvre, Yonne,
50 %.
|