chicon n. m.
I. 〈Nord, Pas-de-Calais, Picardie〉 usuel "pousse blanche de la chicorée de Bruxelles ou witloof (Cichorium intybus), obtenue par forçage et étiolement". Stand. endive. – Salade de chicons (Le Guide rouge 2000, 2000, 261 [Restaurant de Béthune, Pas-de-Calais]).
1. La deuxième étape [de la culture des endives], c’est le « forçage », qui permet d’obtenir prématurément les chicons. Après une période de maturation, les racines sont, en effet, « poussées » dans le noir en chauffant le sol. Vingt jours plus tard, apparaît une endive d’un
jaune tendre qui sera délicatement séparée de sa racine […] avant d’être expédiée
sur le marché. (Le Monde Dimanche, 19 décembre 1982, V.)
2. Les endiviers du Bas-Pays avaient lancé en début d’année un sacré pari : produire
et vendre des chicons pendant tout l’hiver. (L’Écho rural du Pas-de-Calais, octobre 1989.)
□ En emploi métalinguistique.
3. Voici un siècle, le hasard a fait découvrir en Brabant une racine de chicorée, nommée
witloof (feuille blanche) en Flandre, chicon dans le Nord et endive ailleurs. Ce légume, exporté partout dans le monde, est adoré
par nos amis belges, qui le préparent de cent manières, cru ou cuit. (Rustica, 31 mai 1989, 34.)
4. Ferme fuseau blanc et jaune paille, l’endive ou comme on dit par ici [dans la région
Nord-Pas-de-Calais] le « chicon », a été introduite en France au début de ce siècle. Notre pays est désormais le premier
producteur mondial de ce légume. (Rustica, 12 juillet 1989, 40.)
5. […] l’endive. C’est à la suite d’une visite à l’exposition horticole de Gand en 1873
qu’Henri de Vilmorin en rapporta les premiers exemplaires en France. Flamand, ch’timi
ou botaniste, chacun se l’approprie sous un vocable différent. Mais qu’il soit baptisé
witloof, chicon ou chicorée de Bruxelles, il s’agit en réalité d’un seul et même légume. (G. Crouzet,
« L’endive », Le Monde, 4 février 1998, 25.)
6. Le chicon, parisianisé sous le terme d’endive (voilà qu’on prend honte de notre vocabulaire !)
donne lieu à des recettes de soupes délicieuses. (J. Messiant, La Cuisine flamande traditionnelle, 1998, 39.)
II. 〈Centre-Ouest, Loiret, Loire, Dordogne, Lot-et-Garonne, Pyrénées-Atlantiques, Landes,
Gironde〉 "romaine (variété de laitue)".
□ Avec ou dans un commentaire métalinguistique incident.
7. […] la salade bien croquante, celle que je préfère entre toutes depuis les jeudis
chez grand-mère, cette laitue romaine qu’à Châteauneuf[-sur-Loire] on appelle le chicon. (M. Genevoix, Trente mille jours, 1981 [1980], 81.)
8. Pour toute salade, on ne connaissait guère [à Vernou-sur-Brenne (Indre-et-Loire)]
que les chicons à l’huile de noix appelés par ailleurs romaine. (Témoignage de Roger Lecotté – né en 1899 –, recueilli par B. Houchard, dans Le Monde Dimanche, 29 août 1982, VI.)
■ remarques.
1. La lexie chicon vert (au sens II) ne semble plus attestée aujourd’hui à Pont d’Ucel (Ardèche), comme elle
l’était voilà une quarantaine d’années : « […] haies de sapinette* enserrant de rigoureux carrés de radis ou de chicon-vert » (J.-J. Salgon, 07 et autres récits, 1993, 18). Un courrier de l’auteur [né en 1948] en date du 2 octobre 1996, indique
ce mot comme « surgi de [sa] mémoire d’enfant », précisant que ces chicons « étaient bons comme la romaine ! ».
2. D’autres sens (correspondant aux sens traditionnels de endive Cichorium endivia, v. par exemple NPR 2000, sens 1) sont attestés sporadiquement : "chicorée frisée" (dans le Hainaut, CartonPouletNord 1991) ; au pl. "plants de scarolle [sic] à repiquer" (GononPoncins 1984).
◆◆ commentaire.
I. Attesté en 1923 en Belgique (D’Harvé dans TLF), ce sens, explicite dans les dictionnaires
français dep. Lar 1960, est en usage dans certaines régions de Belgique, dans le nord
de la France et « même à Paris » selon Hanse 1994 ; il semble aujourd’hui assez largement connu mais comme terme régionalement
marqué. Les dictionnaires généraux contemporains l’enregistrent comme tel (« région. (Belgique) » Rob 1985 et NPR 1993-2000 ; « région. (Nord, Belgique) »), sauf Lar 2000 qui le donne sans marque. – MassionBelg 1987 ; CartonPouletNord 1991 ;
GuilleminRoubaix 1992 ; DelcourtBelg 1998.
II. est attesté dep. 1651 (N. de Bonnefons, v. TLF). TLF et Rob 1985 n’indiquent pas que
ce sens est marqué diatopiquement, ce qui semble cependant aujourd’hui le cas dans
la mesure où (laitue) romaine l’a remplacé dans le français standard (on notera que chicon ne figure dans Ac que de 1762 à 1878 et qu’il est relevé dans RheimsMots 1969) ;
ce remplacement a pu se faire à partir du 19e s., comme en témoignent certains relevés (BourquelotProvins 1868 « Chicon, plante à salade qu’on nomme ailleurs romaine. Ce mot s’emploie en Beauce et en Gâtinais » ; DauzatVinz 1915, § 622 dans la métalangue « chicon, laitue romaine » ; ClouzotNiort 1907-1923 « On n’appelle jamais autrement à Niort la laitue romaine »). À l’étymologie préconisée par Littré (resuffixation de chicot "trognon"), reprise par Rob 1985, DDM et CartonPouletNord 1991, on préfèrera celle que propose
FEW, reprise par TLF et DHLF 1992 (fausse régression de chicorée) comme respectant mieux le sémantisme du mot.
◇◇ bibliographie. GonthiéBordeaux 1979 ; TuaillonRézRégion 1983 ; RézeauOuest 1984 ; BoisgontierAquit
1991 ; FEW 2, 665a, cichorium (y rattacher chicon Belfort "pied de salade", mal classé ibid., 13/2, 367b, tšikk-).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : (1.) Nord, Pas-de-Calais, 100 % ; Aisne, 90 % ; Oise, 80 % ; Somme, 30 %. (2.) Charente, Charente-Maritime, Deux-Sèvres, Vendée, Vienne, 100 % ; Gironde, 90 % ;
Pyrénées-Atlantiques, 50 % ; Landes, 30 % ; Lot-et-Garonne, 20 % ; Gers, Hautes-Pyrénées,
0 %.
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