cime n. f.
1. 〈Savoie (Val d’Arly, Tarentaise, Maurienne), Rhône, Loire, Isère, Drôme, Hautes-Alpes
(Champsaur), Alpes-de-Haute-Provence, Gard, Ardèche, Haute-Loire (Velay)〉 "sommet, hauteur, partie élevée". La cime du pays (VincenzCombeL 1974). Il habite la cime du village (MédélicePrivas 1981).
1. Au « pied » de La Grave, par opposition à la « cime » du village, les habitants sont privés de soleil [l’hiver] pendant douze jours pleins.
(M. Liotier, Celui qui va devant, 1974, 89.)
— Surtout dans des loc.
● à la cime loc. adv. "en haut, au-dessus". Le cerisier qui est à la cime, contre la barrière (L. Pralus, Mon village sous l’hiver, 1978, 36).
2. Les étrangers viennent chercher ce qui reste dans le pays […]. Ils font semblant de
ramasser les champignons, et en douce, ils ramassent les pommes, les noix, tout ça,
dans un sac, avec quatre champignons à la cime. (Témoignage recueilli dans J.-P. Chabrol, La Cévenne par ses gens, 1976, 87.)
● à la cime de / (moins usuel) dans la cime de loc. prép. "en haut de, au-dessus de". Synon. région. au fin dessus de (v. fin2). – Prends une serviette à la cime de la pile de linge (ArnouxUpie 1984). À la cime de l’échelle, de l’escalier, du placard, de la maison, du village. Je trouve
pas leur numéro de téléphone, regardez voir quel numéro y a à la cime de la facture (DucMure 1990). [Maître de chant aux choristes] Bon, on recommence, deuxième portée à la cime de la page (QuesnelPuy 1993).
3. Mon père [jardinier] était estimé, on savait qu’il ne « fardait » pas – « farder » c’est placer le plus beau à la cime de la corbeille et le minable en dessous, c’est tromper le client. (L. Chaleil, La Mémoire du village, 1989 [1977], 190.)
4. Le chien […] est assis, la tête droite, dans la cime du champ, où il y a du soleil, et il semble surveiller tout le monde. (L. Pralus, Mon village sous l’hiver, 1978, 28).
5. – […] Faut entendre la pommade : « Ah ! les merveilles que tu m’apportes là, et rondes, et parfumées, et patatin et patatan…
C’est parce qu’elles sont dignes de parader à la cime du panier que je te les achète au plus fort. » Le vendeur […] s’en tortille d’orgueil et ne se doute pas que les prix sont arrêtés
d’avance, ni que ses truffes iront dans le sac d’un acheteur qu’il déteste et auquel
de sa vie il n’aurait jamais accepté de les vendre. (P. Sogno, Le Serre aux truffes, 1997 [1993], 124-125.)
2. Par ext. 〈Savoie (Val d’Arly, Tarentaise, Maurienne), Hautes-Alpes (Champsaur), Gard (Brignon),
Ardèche (Mariac)〉 "extrémité". J’ai un cor à la cime du pied (GermiChampsaur 1996). La cime du chemin, du lit, des doigts, du crayon.
6. Ce boudin, on le ferait frire au souper* avec la fricassée* ; la fricassée, c’est la viande qui entoure la cime des côtes. Rissolée dans son propre jus, elle fait avec le boudin un plat excellent.
(L. Chaleil, La Mémoire du village, 1989 [1977], 218.)
◆◆ commentaire. Ce régionalisme sémantique (d’extension plus large qu’en français standard, où le
terme signifie essentiellement "extrémité supérieure, pointue, d’un objet élevé (arbre, montagne, rocher)", tandis que le cime régional s’applique également à des objets non pointus) couvre une aire compacte
dans le Sud-Est, où son emploi est très vivant. S’il est caractéristique de la zone
d’influence de Lyon, cette zone est probablement évidée du centre (l’emploi ne semblant
plus guère appartenir à l’usage lyonnais actuel : Ø VurpasLyonnais 1993 ; SalmonLyon
1995, avec un exemple de 1927). Attesté dep. 1566 sous la plume du Comtois Du Pinet,
au français marqué de nombreux traits lyonnais (« Le parfum des os qui sont a la cime de la corniole et garguette du cerf fait amasser
les serpens », trad. de Pline, dans Gdf s.v. corniole et s.v. garguette), cet emploi demeure ignoré de la lexicographie générale. Les patois frpr. et occ.
de la vallée du Rhône, du Languedoc et d’Auvergne possèdent également le type lexical
dans ce même sens général ("partie supérieure d’un objet quelconque" FEW ; ALMC 240*), de sorte que le régionalisme est parfois attribué à une influence
dialectale (« Ce régionalisme sémantique continue le dial. cima », FréchetAnnonay 1995 ; cf. aussi BlancVilleneuveM 1993 ; VincenzCombeL 1974 ; FréchetDrôme
1997).
◇◇ bibliographie. « au barrine [un champ] il faudra y mettre du châpre [= sainfoin] pour que cà se suive
avec l’autre morceau de la cîme » (16 mars 1915, VandrandPuyD, 83 ; du même, le 6 mars 1916, « les molletières […] me sont un peu juste au mollet, mais ce n’est rien je le ferai
bien réparer […] car il n’y à qu’à faire avancer la boucle de la cime », 142) ; DornaLyotGaga 1953 ; VincenzCombeL 1974, 72 ; RLiR 42 (1978), 165 ; MédélicePrivas
1981 « ressenti comme français [standard] » ; TuaillonVourey 1983 « On ne dit pas au sommet de, on dit toujours à la cime de » ; ArnouxUpie 1984 « très fréquent, ressenti comme français [standard] » ; GononPoncins 1984 « très courant ; cru français [standard] » ; QuestThiers 1987 ; MartinPilat 1989 « usuel » ; DucMure 1990 « extrêmement vivant » ; VurpasMichelBeauj 1992 « B[eaujolais] V[iticole] usuel » ; MazaMariac 1992 cîme [sic] ; BlancVilleneuveM 1993 ; FréchetMartVelay 1993 « usuel » ; GagnySavoie 1993 « courant » ; QuesnelPuy 1993 ; FréchetAnnonay 1995 « usuel » ; LaloyIsère 1995 ; SalmonLyon 1995 ; GermiChampsaur 1996 « très vivant » ; FréchetDrôme 1997 « globalement connu » ; MichelRoanne 1998 ; PlaineEpGaga 1998 à la fin cime ; FEW 2, 1608b, cyma.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Ain, Ardèche, Drôme, Haute-Loire, 100 % ; Puy-de-Dôme, 80 % ;
Cantal, Isère, Loire, 75 % ; Rhône, 30 %.
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