farçon n. m.
〈Haute-Savoie, Savoie, Ain, Isère〉 usuel "mets à base de pommes de terre auxquelles on ajoute œufs, crème, pruneaux, raisins
secs, tranches de poitrine de porc, et que l’on cuit au four ou au bain-marie".
1. – J’ai vu, dans des livres folkloriques, que le farçon était devenu une recette, dit Alain [= Alain Chapel, restaurateur à Mionnay (Ain)].
J’ai bien ri. Le farçon n’a jamais été rien d’autre qu’un mode de vie. Le dimanche, dès que tu te lèves,
tu plies* tes richesses dans de belles feuilles de chou : du pain rassis, des prunes sèches
ou des raisins, des pommes de terre, des œufs durs, du lait ou du caillé… Du lard
s’il y en a encore dans le saloir. Tu mets à mitonner dans la coquelle* de l’âtre, feu dessous, feu dessus, et tu descends à la messe. Quand tu remontes
quatre ou cinq heures plus tard, ton farçon est à point. (F. Deschamps, Croque en bouche, 1980 [1976], 320-321.)
2. Le repas [de Noël] était copieux, à base de viande fumée, et puis, un gros farçon bourré de pommes et de pruneaux. (L. Tournier, Il était une fois la montagne, 1979, 118.)
3. […] ils s’étaient retrouvés côte à côte au repas, l’avant-dernier soir des vendanges.
Ils ne s’étaient pas regardés une seule fois, s’étaient passé le jambon, le farçon [en note : sorte de ragoût de pommes de terre parfumé au safran et contenant des raisins de
Corinthe], les rissoles*, sans un mot. (J. Rosset, Les Porteurs de terre, 1990, 228.)
V. encore s.v. rissole, ex. 1.
□ Avec un commentaire métalinguistique incident.
4. […] gratins et farçons savoyards (ce dernier étant un gratin de purée de pommes de terre au lait, avec cerfeuil
ou fines herbes, mélangé d’œufs, d’épices et parfois sucré) […]. (Guide Bleu. Savoie, 1954, LVIII.)
5. À ce fleuron de la gastronomie iséroise [le gratin de pommes de terre] s’apparentent
d’autres préparations plus ou moins proches, comme le « farçon » de Saint-Pierre-de-Chartreuse, sorte de gâteau de pommes de terre au lait, aux œufs
et au cerfeuil […]. (Pays et gens de France, n° 47, l’Isère, 16 septembre 1982, 19.)
■ synonymes. farcement n. m. "id.". « – Jeannine, tu as bien mis les pruneaux dans le farcement ? Tu n’as pas oublié le sel ? » (M. Chatelain, Alpages, terres de l’été, 1995, 47). « Le farcement, préparation domestique, est commercialisé à Sallanches et à Cluses, entre autres,
par les charcutiers et les traiteurs, depuis une vingtaine d’années. […] / Le farcement se consomme surtout en Savoie du nord, dans le Chablais et le Faucigny notamment » (L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Rhônes-Alpes, 1995, 184 et 185). – Dérivé sur fr. farcir, attesté dep. le 19e s. dans le français de Suisse romande (GPSR) ; GagnySavoie 1993 ; aj. à FEW 3, 414b, farcire.
■ encyclopédie. Comme en témoignent les exemples ci-dessus, les recettes de ce plat, dans lequel le
salé et le sucré sont habituellement associés, sont très diverses. On lira une recette
de « Farçon de pommes de terre » dans L’Encyclopédie de la cuisine régionale. La Cuisine Savoie-Dauphiné-Jura, 1980, 104 ; pour une autre préparation à base de chou, v. la recette de « Farçon de chou » ibid., 103. V. aussi L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Rhône-Alpes, 1995, 184-186.
◆◆ commentaire. Terme caractéristique du français de Savoie, attesté dep. 1889 « Farçon à la savoyarde [Menu] », L’Echo de Paris, dans HöflerRézArtCulin. Mot endogène emprunté récemment à sav. farçon (ConstDésSav 1902), dérivé sur le correspondant de fr. farce ou de farcir à l’aide d’un suffixe collectif ‑on < -umen (GPSR) avec traitement francoprovençal de u devant nasale. Absent des dictionnaires généraux contemporains.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
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