finir v.
1. 〈Loire, Puy-de-Dôme (Clermont-Ferrand), Creuse, Haute-Vienne〉 fam. finir d’arriver loc. verb. "poursuivre son chemin pour arriver à son but (généralement chez soi)" Allez ! au revoir ! je finis d’arriver ; la femme m’attend pour manger (SabourinAubusson 1983).
1. […] la mère Chanvot qui descendait de là-haut […], posait ses sabots sur le toit du
père Antoine et finissait d’arriver à la messe avec ses galoches. (L. Pralus, Mon Village sous l’hiver, 19778, 71.)
2. Catherine tape dans ses mains : un gros merle noir au bec jaune et luisant s’envole
en jacassant : c’était bien lui qu’elle avait entendu. […] Elle était rassurée : non
elle n’avait rien perdu de ses facultés perceptives. Elle pouvait finir d’arriver [chez elle, après une longue absence]. (P. Louty, Le Secret de Catherine, 1999, 424-425.)
2. 〈Charentes (nord-est), Allier (sud-est), Gard, Cantal, Haute-Loire, Puy-de-Dôme (pop.), Limousin, Dordogne, Lot〉 fam. surtout rural finis/finissez (donc) d’entrer loc. phrast. ("invitation, faite à une personne, à entrer (dans une maison, dans une pièce)").
3. – […] Quelle bonne surprise ! Finissez d’entrer, installez-vous. (J.-P. Chabrol, Je t’aimerai sans vergogne, 1967, 113.)
4. Moi, je commence à m’inquiéter de ces cérémonies : « Est-ce qu’elle va se décider à les faire entrer ? On ne laisse pas les gens si longtemps
dehors. » Et comme les bavardages se prolongent, je me décide à prononcer la formule traditionnelle :
« Finissez donc d’entrer. » (J. Anglade, Le Voleur de coloquintes, 1972, 22-23.)
5. L’Albine ouvre la porte : « Finis d’entrer » dit-elle. (F. Dupuy, L’Albine, 1981 [1977], 24.)
6. – […] Au moins, restez pas là, au soleil. Finissez d’entrer. Vous goûterez notre vin. Vous me dérangez pas. (M. Peyramaure, L’Orange de Noël, 1996 [1982], 41.)
7. « Allons, allons, Jean-Pierre, finis donc d’entrer, assieds-toi ; on va prendre un verre. » (Panazô, L’Argent du ciel, 1987, 35.)
8. Le maître d’école apparut, s’immobilisa sur le seuil. Julia n’eut pas l’air surprise :
– Finissez d’entrer, monsieur Farges, dit-elle, ne restez pas dans le courant d’air. (Chr. Signol, Les Chemins d’étoiles, 1988 [1987], 164.) 9. Enfin, on arrivait ! […] Des exclamations joyeuses jaillissaient ; on « finissait d’entrer » et après les effusions amicales ou affectueuses les veilleurs étaient invités « à passer dans le cantou* », place de choix, car on était un peu à l’abri des courants d’air si cruels dans les
maisons d’autrefois où l’inconfort était roi… (G. Marthon-Marchi, La Terre à ses sabots, 1994, 44.)
10. Il attend sur le seuil. Immobile. Engourdi par le froid. Figé. La neige dégoutte de
ses vêtements. À ses pieds, une flaque se forme.
Alors, la plus âgée [des deux femmes] : – Mais finissez d’entrer. Il y a encore des braises dans le fourneau. Pauvre monsieur, vous êtes gelé. (R. de Maximy, Le Puits aux corbeaux, 1996 [1994], 19.) 11. Secouant contre la marche la neige collée à ses sabots, Piassou la surprend. Il est
matinal, tête nue et appuie un très gros paquet sur le banc contre le mur. […]
– Finis d’entrer. Il s’embarrasse, montre son lourd paquet et veut dire quelque chose. (G. Rey, La Montagne aux sabots, 1994, 23.) 12. Il faisait beau, encore froid car un coupant vent d’est, soufflant sur le plateau,
s’engouffrait dans la cour de ferme et ne poussait pas à s’y éterniser.
– Finissez d’entrer, invita Jean-Claude après avoir salué les deux hommes. (Cl. Michelet, La Terre des Vialhe, 1998, 186.) 13. Elle venait emprunter une lampe de poche. Christelle lui a dit de finir d’entrer et lui a proposé de la salade de fruits […]. . (R. Millet, Lauve le pur, 2000, 210.)
V. encore s.v. y, ex. 8.
□ En emploi métalinguistique ou autonymique.
14. […] ce délicieux finissez d’entrer ou finissez d’arriver que ne manque pas de vous signifier le Creusois qui vous a accueilli à quelque distance
du seuil de son logis, lorsque sur le point de pénétrer dans sa demeure vous vous
attardez en quelque cordial bavardage. (LouradourCreusois 1968, 131.)
15. Ces retrouvailles impliquent [dans le Limousin] des visites dont le préambule protocolaire
tient dans cette formule redoutable : « Finissez donc d’entrer. » Elle a le pouvoir de débusquer un flacon centenaire d’alcool d’on ne sait trop quoi,
qui offre la particularité de ne se vider jamais. (A. Blondin, Ma Vie entre des lignes, 1984 [1982], 471.)
16. […] quand on recevait une visite, on disait toujours à celui qui ouvrait la porte :
– Finissez donc d’entrer. (Chr. Signol, Marie des brebis, 1989, 89.) 17. « Finissez d’entrer ! », vous dit le paysan limousin quand vous vous présentez au seuil de sa maison. Cette
invitation en dit long sur l’emboîtement d’espaces qui protège la demeure. (M. Robert,
Centre-France, 14 juillet 1997, 4.)
■ variantes. fam., rural (et d’aire en partie différente : 〈Gard, Hérault, Corrèze〉) achève/achevez (donc) d’entrer/de rentrer. « – Allons, achève d’entrer, espèce d’ânon » (M. Chaulanges, Les Mauvais Numéros, 1971, 103) ; « Allez, achève d’entrer, dit-il enfin. Tu as de la chance, je suis tout seul ; on sera tranquilles. La femme
et le fils ramassent les pommes de terre. Moi, je peux plus me doubler [= me plier
en deux], les reins… » (Cl. Michelet, Des Grives aux loups, 1979, 133). En emploi pron. « Achevez de vous rentrer ! » (Témoin né vers 1896, dans J.-P. Chabrol, La Cévenne par ses gens, 1976, 95.)
◆◆ commentaire. Dans ces locutions verbales, le semi-auxiliaire finir exprime un aspect terminatif, comme dans le français standard, mais ces constructions
ne sont attestées que dans des aires restreintes. Celle avec entrer (2) est caractéristique et emblématique d’une zone compacte, qui coïncide à peu près
avec le Massif Central ; c’est la francisation polie de achevez d’entrer, lequel est un calque de l’occitan (en Auvergne : 'chabatz d’entrar). Son emploi n’a pas pénétré la langue générale (un seul exemple hors de cette aire
dans Frantext : Queneau, 1944) et, curieusement, la lexicographie régionale l’a quasiment passé
sous silence, sauf ColasBordes 1982 et SabourinAubusson 1983 et 1998 (v. aussi Aurillac
1965, Moussarie, RHA 39, 509) ; à aj. à FEW 3, 557a, finire. La variante est « bien connue (très pop./rurale) en Basse Auvergne » (J.-P. Chambon, comm. pers.).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Cantal, Corrèze, Puy-de-Dôme, Haute-Vienne, 100 % ; Creuse,
90 % ; Haute-Loire (nord-ouest) ; Dordogne, 75 %.
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