machure ou mâchure n. f.
1. 〈Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, Maine-et-Loire, Centre-Ouest, Indre, Cher, Haute-Garonne,
Limousin, Aquitaine〉 usuel "contusion résultant d’une lésion interne des tissus à la suite d’un choc ou d’une
forte pression (sur une partie du corps), souvent de couleur livide". Stand. ecchymose, bleu. – Il est tombé sur le genou et s’est fait une belle machure (Vendée, RLiR 1978, 176).
1. […] la roue du cabriolet lui avait fait une grande machure bleue au travers de la minuscule poitrine. (R. Blanc, Clément, Noisette et autres Gascons, 1984, 128.)
□ En emploi métalinguistique.
2. Meurtrissures et ecchymoses sont confondues dans le Pays charentais sous le nom de
« mâchures » (M. Leproux, Médecine, magie et sorcellerie, 1954, 98.)
2. 〈Puy-de-Dôme〉 "marque ou trace laissée par un choc ou par des barbouillages". Il peut donc s’agir d’une machure de meurtrissure ou de salissure (E. Coudert, Parlem, Prima de 1995, 6, dans la métalangue, s.v. mâcher).
■ graphie. V. la rem. s.v. macher.
◆◆ commentaire. 1. Dérivé de formation ancienne : aocc. macadura "meurtrissure" 14e s., mfr. macheure "contusion, meurtrissure" (1472, FEW), avec emploi dominant, dès cette époque, dans le Centre et l’Ouest (Gdf).
Ce particularisme sémantique, relevé à la fin du 16e s. chez Montaigne, encore bien vivant aujourd’hui à l’Ouest, du sud de la Basse Bretagne
aux Pyrénées, comme l’attestent les enquêtes DRF 1994-1996, n’est pas signalé dans
la lexicographie générale sauf dans quelques emplois spéciaux (v. aujourd’hui : TLF
« techn. et méd. » et Rob 1987 « techn. », sans marque diatopique) et il est peu, et tardivement, documenté dans la lexicographie
régionale. L’emploi techn. et l’emploi région. pourraient être deux développements
indépendants à partir de la base verbale macher "frapper ; meurtrir", toutefois, l’absence de tradition lexicale incite à suivre TLF où le sens "meurtrissure, contusion" est donné comme une extension du sens méd. "lambeau de chair écrasé sur les bords d’une plaie". 2 résulte probablement de l’influence du type mâchuré* "barbouillé, souillé de noir", proche sémantiquement (v. FEW 6, 432a, note 25, mask- I 2 b). L’emploi au Canada, où les lexicographes mentionnent explicitement les sens
1 et 2 pour le Québec (Dionne 1909 machure "meurtrissure, contusion ; tache causée sur un fruit par le froissement", GPFC 1930 "meurtrissure, contusion ; tache sur un fruit"), peut laisser penser que cette influence est antérieure au départ des colons pour
le Canada ; toutefois 2 n’est pas documenté pour l’acadien (PoirierAcadG, DitchyLouisiane 1932, MassignonAcad
1962).
◇◇ bibliographie. FEW 6, 67b-68a, makk- II 1 (du corps), et 69a, makk- II 2 a (de fruits) ; Voizard, Essai sur la langue de Montaigne, 1885 [fin 16e s.] Ce n’est pas macheure, c’est plutost une teinture universelle qui me tache (III, 2) ; JaubertCentre 1864 "contusion, meurtrissure ; tache causée sur la peau, sur un fruit, par un coup, par
un froissement" ; VerrOnillAnjou 1908 "froissure, contusion, meurtrissure, ecchymose" ; MussetAunSaint 1932 ; RézeauPérochon 1978 [1943] ; PierdonPérigord 1971 "contusion, bleu" ; RLiR 42 (1978), 176 ; RézeauOuest 1984 et 1990 ; SalmonLyon 1995 (non documenté
à l’époque mod., un ex. de 1886) ; BoisgontierDocMs [1995] « entendu » ; LuronCentreBerry 1997 ; MoreuxRToulouse 2000 « régionalisme inconscient […]. Mâchure n’est accepté que par quelques personnes âgées ».
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance (1) : Deux-Sèvres, Gers, Pyrénées-Atlantiques, Hautes-Pyrénées,
100 % ; Gironde, Vienne, 80 % ; Charente, 75 % ; Haute-Vienne, 70 % ; Landes, 65 % ;
Loire-Atlantique, 60 % ; Corrèze, 55 % ; Charente-Maritime, Dordogne (nord), 50 % ;
Creuse, 45 % ; Lot-et-Garonne, 40 % ; Maine-et-Loire, 30 % ; Vendée, 25 % ; Ille-et-Vilaine,
10 % ; Nord-Picardie, 5 % ; Sarthe, 0 %.
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