malon ou mallon n. m.
〈Hautes-Alpes, Provence, Gard〉 usuel "petite brique de carrelage, le plus souvent hexagonale et de couleur rouge". J’ai fait mettre des malons blancs et bleus dans ma cuisine (GermiLucciGap 1985). Rince la pièce* à la pile* et lave-moi les mallons (BouvierMars 1986). On a refait les mallons du réfectoire (Fr. Fernandel, L’Escarboucle, ma Provence, 1992, 69). Les mallons rouge bordeaux (Fr. Thomazeau, Qui a noyé l’homme-grenouille ?, 1999, 21).
1. L’appartement brillait de propreté. Les malons venaient d’être lavés à l’eau chaude, puis frottés de je ne sais quoi […]. (H. Queffélec,
Journal d’un salaud, 1944, 28.)
2. Je voudrais délaisser l’ascenseur, grimper des marches […] avec des mallonsa rouges et frais aux interstices chaulés […]. (A. Sarrazin, L’Astragale, 1965, 198.)
a Graphie malons dans l’éd. du Livre de Poche, n° 2418, 1968, 153.
3. Elle a lavé du linge, elle a « fait » les chambres, mettant les draps à la fenêtre afin « qu’ils prennent l’air », chassé la poussière, frotté les malons. (L. Nucéra, Avenue des Diables-Bleus, 1982 [1979], 89.)
4. Le chat se manifesta. Il bâilla, s’étira, fit un petit bruit de gorge et […] quitta
la fraîcheur des malons. (L. Nucéra, Le Kiosque à musique, 1984, 83.)
5. Nous nous asseyions par terre et nous restions là un moment, côte à côte sur les mallons froids […]. (S. Prou, Le Dit de Marguerite, 1986, 37.)
6. Elle donna un coup de rein et ils roulèrent jusqu’au milieu du lit.
– Attention de ne pas tomber, dit Pascal, parce que si […] on fait un petit et si en plus on se fend le crâne sur les mallons, ça va faire beaucoup pour une seule soirée. (P. Cauvin, Rue des Bons-Enfants, 1990, 165.) 7. Mon grand-père, il avait deux louis d’économie. Des fois, ces deux pièces, il les
laissait tomber devant la cuisinière sur les malons. Et je me disais : « S’il y en avait mille, ça ferait tel bruit ! » (P. Magnan, Le Mystère de Séraphin Monge, 1990, 22.)
8. Le téléphone est dans l’entrée, je parcours la distance les pieds nus sur les malons froids en quatre sonneries. (Ph. Carrese, Filet garni, 1996, 54.)
■ graphie. En l’absence d’une tradition lexicographique soutenue, qui aurait pu fixer l’orthographe
du mot, les auteurs (et les éditeurs, v. ici ex. 1, n. a) hésitent entre les deux graphies.
■ dérivés. mallonné, ‑ée adj. "carrelé". « […] on dort juste au-dessus [de la cuisine], dans la chambre, “mallonnée”, c’est-à-dire carrelée de tommettes [sic] […] » (Pays et gens de France, n° 33, le Vaucluse, 6 mai 1982, 7). – ReynierMars 1829 malonner ; GabrielliProv 1836 mallonner ; FEW 6/1, 114b, *malla.
◆◆ commentaire. Emprunt au pr. (dep. ca 1490, Lv ; lui-même peut-être d’origine préromane) et attesté en ce sens en français
dep. 1808 (« Nous allâmes un jour à Auriol, oô se fabriquent tous les carreaux qu’on emploie à
Marseille et dans les départemens circonvoisins pour parer les salons et les chambres ;
on les nomme malons » Aubin-Louis Millin, Voyage dans les départements du midi de la France, t. 3, 346) et 1810 (« malon, carreau de terre cuite » Rolland), le terme est caractéristique d’une aire compacte du Sud-Est, principalement
provençale, correspondant de près à l’aire qu’occupe le mot en occitan (cf. FEW).
Non marqué dans Littré (qui donne, à la suite de Boiste 1812 malons pl. au sens de "briques dont on se sert pour maçonner les chaudières à savon" [à Marseille ?]), mallon est absent des dictionnaires généraux contemporains, sauf de TLF qui le marque « région. (Sud de la France) ». Les deux seuls exemples qu’en donne Frantext renvoient à la Provence (Bourget, Lazarine, 1917 et Aragon, Les Beaux Quartiers, 1936).
◇◇ bibliographie. RollandGap 1810 malon ; ReynierMars 1829-1878 malon ; GabrielliProv 1836 malon ; BrunMars 1931 mallon ; GermiLucciGap 1985 malon ; BouvierMars 1986 mallon ; BlanchetProv 1991 malon ; CampsLanguedOr 1991 mallon ; GermiChampsaur 1996 malon ; MazodierAlès 1996 malon ; ArmKasMars 1998 mallon, malon ; BouisMars 1999 mallon ; FEW 6/1, 114b, *malla.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Hautes-Alpes, 100 % ; Alpes-Maritimes, 85 % ; Var, Vaucluse,
80 % ; Bouches-du-Rhône, 60 % ; Alpes-de-Haute-Provence, 50 %.
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