merlusse n. f.
〈Hautes-Alpes, Provence, Gard, Hérault, Haute-Garonne (vieilli)〉 fam. "poisson de mer de la famille des Gadidés, qui vit dans l’Atlantique Nord et l’océan
Arctique d’où il émigre par bancs vers le sud pour frayer dans des eaux moins froides,
et dont la chair est vendue fraîche (stand. cabillaud) ou séchée et salée (stand. morue ; synon. région. stockfis(c)h)"a.
a Dans les cas ici considérés, il s’agit en fait du poisson sous sa forme séchée et
salée.
1. Au plafond, plates et dures comme du bois, une ou deux merlusses pour les jours maigres. Apollonie n’avait pas de stockfish, on n’était pas habitué
à en cuisiner dans sa famille. (M. Rouanet, H. Jurquet, Apollonie, 1984, 89.)
2. C’était [le vendredi] le jour des omelettes au tomatat*, de la merlusse aux pommes de terre […]. (G. J. Arnaud, Les Moulins à nuages, 1988, 79.)
3. Un se chargeait de la merlusse, l’autre des rutabagas, les autres du vin, enfin, on répartissait… À présent, c’est
le traiteur. (Cl. Courchay, Chronique d’un été, 1990, 95.)
□ En emploi autonymique.
4. Le provençal féminise tout ce qui est agréable, on dit une belle platane [sic, sans guillemets], comme aussi une « belle lièvre », une « merlusse ». (A. Detaille, Les Noyaux de cerises, 1978, 218.)
◆◆ commentaire. La forme merluche, qui est celle du français de référence (dep. 1603, v. FEW), y semble toutefois peu
usuelle, même si les dictionnaires généraux contemporains la donnent sans marque (TLF
ne l’illustre que par des exemples du 19e s., époque à laquelle, si l’on en croit les recueils de cacologies, morue s’est imposé) et si l’on peut invoquer des exemples intéressant le 20e sièclea, ils demanderaient à être assortis d’une enquête d’ensemble ; merlusse, forme du français du sud de la France (Provence et Languedoc oriental), où il alterne
avec stockfisch (plus usuel en Provence) est attesté dans le français de Montpellier dep. 1802 (« merlusse, De la merluche, et non molue, barbarisme, ni morue qui est impropre » Villa). Emprunté à l’occ. merlussa (type attesté dep. le Moyen Âge, "espèce de poisson", v. FEW) et dominant, pour désigner la morue, dans les parlers de Provence (FEW),
du Languedoc (ALLOr 465 ; ALLOc 365) et du Massif Central (ALMC 387).
a Ainsi M. Bailly, Le Piosou, 1980, 82 : « […] à Sauxillanges, il n’y avait pas de poissonnerie, alors on s’infligeait la morue,
la “merluche” pour ma mère [originaire de Saint-Étienne], qui la mettait à dessaler vingt-quatre
heures à l’avance […]. »
◇◇ bibliographie. VillaGasc 1802 ; GabrielliProv 1836 « Quoique merluche soit français, servez-vous plutôt de morue » ; SievracToulouse 1836 « Merluche […] Nom que l’on donne à la morue après qu’elle a été desséchée au soleil » ; JoblotNîmes 1924 ; BrunMars 1931 marlusse ; BouvierMars 1986 ; LangloisSète 1991 ; MazodierAlès 1996 ; MoreuxRToulouse 2000
« connu de tous nos informateurs âgés, mais il n’est plus utilisé, même au marché Victor
Hugo, où les jeunes poissonniers l’ignorent » ; FEW 5, 436a, lucius.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Bouches-du-Rhône, Alpes-Maritimes, 70 % ; Var, 65 % ; Hautes-Alpes,
50 % ; Alpes-de-Haute-Provence, Vaucluse, 30 %.
|