pain-beurre n. m.
〈Basse Bretagne.〉
1. Emploi non-comptable usuel "pain en tranches que l’on tartine de beurre".
1. Mon petit treudik [= enfant malingre], venez prendre vote katreurre [sic] et du pain-beurre vous aurez* plein ! (PichavantDouarnenez 1978, 186.)
2. – Des cacahuètes nous pourrions acheter pour le petit Gabriel, maman ?
– Bah ! du pain-beurre avec du sucre est plus nourrissant pour un enfant, ma petite fille. Est-ce qu’on sait ce qu’il y a dans ces produits étrangers ? (H. Pollès, Sophie de Tréguier, 1983, 98.) 3. – Un panier d’huîtres, dit-elle triomphante, avec du pain beurre et du muscadet. (J. Failler, Boucaille sur Douarnenez, 1996, 189.)
4. – […] Et savez-vous où descendait cette pauvre vieille qui ne se nourrissait, dit-on,
que de café et de pain beurre ? Non, vous ne le savez pas ! Eh bien ! elle ne déjeunait que dans les tables les
plus cotées du Michelin. (J. Failler, Mort d’une rombière, 1997, 62.)
V. encore s.v. avoir, ex. 4 ; lait-ribot, ex. 3.
— Sur ce modèle moins usuel pain-pâté.
5. Émilienne servit le thé […].
– Moi, je le prends nature, sans lait ni sucre. Essaie. Mais je dois te dire qu’il n’est pas recommandé, plaisanta-t-elle, de tremper son pain-pâté dedans. (H. Jaouen, L’Allumeuse d’étoiles, 1997 [1996], 72.) 2. Dans des syntagmes.
— morceau de pain-beurre "tartine de pain beurré".
6. Le café avec un peu de crème (il ne s’agit pas de la vraie crème comme à Paris ou
en Normandie, mais de la peau qui se forme sur le lait qui a bouilli) et un bon morceau de pain-beurre, il n’y a rien de meilleur au monde. (H. Pollès, Sophie de Tréguier, 1983, 162.)
7. Ma mère lui offrait un petit morceau de pain-beurre avec son café au lait le matin et au goûter. (J. Ropars, Au Pays d’Yvonne, 1993 [1991], 186.)
— tartine de pain-beurre "tartine de pain beurré".
8. Nous nous asseyons sur l’herbe pour les attendre. Le temps d’avaler une tartine de pain-beurre et je suis remis debout par des cris […]. (P.-J. Hélias, Le Cheval d’orgueil, 1975, 179.)
— café-pain-beurre "collation de tartines beurrées accompagnée de café".
9. À quatre heures de l’après-midi, dans toutes les maisons honorables, c’est le café-pain-beurre. Le thé des Saxons. Toutes affaires cessantes en dehors des moissons. Du café à pleins
bols, les tasses ne valent pas mieux que des dés à coudre. (P.-J. Hélias, Le Cheval d’orgueil, 1975, 402.)
10. Le café-pain-beurre est celui de la famille. Mais celui des invités est précédé et suivi de toutes sortes
de nourritures qui s’ordonnent autour de lui. On ne se met pas trop en frais pour
la coterie, mais on prend soin d’apporter sur la table au moins exactement ce que l’on a bu et
mangé chez les uns et les autres. Les hommes s’habituent lentement à ces agapes, mais
n’y viennent guère. Pour eux, cette caféterie est une occupation de femmes désœuvrées dont la mode a été apportée par les épouses
des marins pour meubler leurs longues solitudes. Avec la solde de leurs maris, elles
ont de quoi licher* du bon et du fin, dans un pays où une simple pension de veuve de guerre suffit à
vous établir presque en bourgeoisie. (P.-J. Hélias, Le Cheval d’orgueil, 1975, 403.)
11. […] le café katreurre [sic] : le café-pain-beurre. (PichavantDouarnenez 1978, 100.)
12. Et elle deviendra – elle devra devenir – une de ces grosses femmes […] grasses comme
des taupes, plus attachées à la nourriture que les hommes, qui en font du moins de
la force, du travail, de l’utile, avec des café-pain-beurre quatre fois par jour (ont-elles des chagrins ? elles s’en nourrissent) […]. (H. Pollès,
Sophie de Tréguier, 1983, 191.)
13. […] elle n’avait fait qu’une tasse de café […], au cas où il se contenterait de café pain-beurre […]. (H. Jaouen, L’Adieu aux îles, 1999 [1986], 251.)
14. Mary trouva madame Le Berre, attablée devant un café pain beurre en compagnie de deux autres femmes de son âge, toutes vêtues de noir. (J. Failler,
Marée blanche, 1996 [1994], 28.)
● Sur ce modèle café-gâteau-lambig (v. lambig) ; chocolat-pain-beurre.
15. Il vous racontera ses longues études : de dix à douze ans à l’école des frères, nourri
matin et soir de soupe au lard dans la partie du réfectoire réservée aux pauvres,
pendant que les gosses de riches se tapaient la cloche au chocolat-pain-beurre. (H. Jaouen, Pleure pas sur ton biniou, 1985 [1980], 62.)
■ graphie. L’emploi du trait d’union est fluctuant.
■ remarques. On rencontre des tentatives de standardisation : « Mary pela sa poire avec l’Opinel qui ne la quittait jamais et la mangea en guise de
dessert accompagnée de pain beurré » (J. Failler, La Cité des dogues, 1996, 112). Voir encore s.v. godaille, ex. 9 et lait-ribot, ex. 13). Il est vraisemblable qu’on ait une réfection du régionalisme dans l’exemple
suivant, extrait de la transcription d’un conte : « La patronne avait préparé du café, avec du pain et du beurre ; ils se sont tous mis
à table » (G. Massignon, Récits et Contes populaires de Bretagne, 1981 [1953/1954], 80).
◆◆ commentaire. Composé par juxtaposition dont on a des correspondants, indépendants, en francoprovençal
de Savoie (v. ALJA 700*). Le composé du français de Bretagne – absent des dictionnaires
généraux du français contemporain – est un calque du breton, cf. « bara hag amann [littéral. : pain et beurre], bara ’mann [littéralement : pain beurre],
du pain beurré » (Gros 1970).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Finistère, Morbihan, 100 % ; Côtes-d’Armor, 65 %.
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