raï ou ray [ʁaj] interj.
〈Gard, Hérault, Aude, Pyrénées-Orientales, Ariège, Haute-Garonne, Tarn, Tarn-et-Garonne,
Lot, Aveyron, Lozère, Pyrénées-Atlantiques (Béarn)〉 fam. "peu importe ; ça va ; passe encore". Synon. région. cocagne*. – Vous autres ray, qui avez de l’argent (SéguyToulouse 1950). La misère encore ray, mais c’est la santé qu’il faut garder (ibid.). Il va mieux ton estomac ? – L’estomac ray, mais le reste ! (NouvelAveyr 1978).
1. […] je passais pour un privilégié, un nanti. Oh toi, « ray » [en note : expression patoise, pas d’importance], tu es riche ! me disaient mes camarades. (J. Cazalbou, La Porte du Casteras, 1969, 57.)
□ En emploi autonymique.
2. Boudu* con, c’est aujourd’hui ce qui surnage (avec le con* qui sert de virgule de Narbonne à Agen) d’un immense naufrage qui, depuis l’époque
où Jean Séguy écrivait son Français parlé de Toulouse, a emporté les ray, les sas et sasque, les biétaze, les boudiu […] qui ponctuaient alors toutes les conversations des gens de peu. (Y. Rouquette,
« Histoires de parler », dans Toulouse, 1991, 138.)
— ça raï "id.". Ça ray, je m’en passerai (SéguyToulouse 1950).
3. – Si tu peux attendre trois jours, moi j’aimerais bien. Ça « raï », mais à Maironnes [= Mayronnes] elles vont s’inquiéter, les petites vieilles. (G. J. Arnaud,
Les Moulins à nuages, 1988, 168.)
— raï de qqc. "va pour". Raï de la petite table ! Mais, dessus, qu’est-ce qu’il y a ? (J.-P. Chabrol, dans CampsLanguedOr 1991).
◆◆ commentaire. Interjection du français du Sud-Ouest (mais l’indication de SuireBordeaux ne semble
pas correspondre à un usage établi), non documentée en français avant le milieu du
20e siècle et absente des dictionnaires généraux contemporains. Transfert d’occ. rai, de même valeur, ça raï est un calque d’occ. acò rai (attesté à Toulouse dep. 1637, Doujat, Dictiounari moundi, v. FEW).
◇◇ bibliographie. MichelCarcassonne 1949, 28 ; SéguyToulouse 1950 « caractéristique et très fréquent » ; NouvelAveyr 1978 « très courant » ; KellerRussoBéarn 1985 ; SuireBordeaux 1988 ; CampsLanguedOr 1991 ; CampsRoussillon
1991 ; LangloisSète 1991 ; BoisgontierMidiPyr 1992 « très usuel » ; MazodierAlès 1996 ; MoreuxRToulouse 2000 ; FEW 10, 21b, radius.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Aude, 100 % ; Hérault, 80 % ; Lozère, 70 % ; Gard, 55 % ;
Pyrénées-Orientales, 50 %.
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