allée n. f.
〈Surtout Ain, Rhône, Loire, Isère, Drôme〉 usuel "porte d’entrée d’un immeuble et escalier, couloir ou cour sur laquelle elle donne". Si vous sortez ce soir, il ne faut pas oublier de prendre la clé d’allée (RLiR 42 (1978), 156).
1. […] c’est demain jeudi. Viens avec moi et tu verras. Rendez-vous à une heure, en bas
de mon allée… (M.-É. Grancher, Lyon de mon cœur, 1946, 61.)
2. Lorsqu’on sortait [à La Croix-Rousse] de la « ficelle »* sur le boulevard qui est très beau, large, avec beaucoup d’arbres, on respirait un
air meilleur qu’en ville. […] Il y a soixante, soixante-dix ans, c’était la campagne.
Les maisons ont un aspect minable, vétuste, mais prenez la peine d’entrer dans l’« allée » [en note : terme lyonnais] et, au bout du couloir, vous allez trouver un beau jardin […].
(Témoignage, dans M. de Certeau et al., L’Invention au quotidien, 1994 [1980], t. 2, 179.)
3. La Croix-Rousse est pareillement renommée pour son labyrinthe de volées d’escaliers,
de rues escarpées et de traboules*, pas loin de trois cents qui, comme on le sait, permettent de passer d’une rue à l’autre
à l’abri en empruntant les « allées » d’immeubles. C’est dans ce charmant fouillis que bat le cœur de Lyon. (R. Belleret,
dans Le Monde, 3 avril 1997, 2.)
V. encore s.v. traboule, ex. 14 ; trabouler, ex. 1.
□ Dans un commentaire métalinguistique incident.
4. Gilbert appuya sur le bouton de commande de la porte cochère et suivit un couloir
– une « allée » en langage local – large et propre. Il gravit l’escalier sur la pointe des pieds.
(P. Salva, Le Diable dans la sacristie, 1982 [1975], 36.)
— Dans le syntagme porte d’allée "porte d’entrée d’un immeuble". À Lyon, les concierges ferment les portes d’allée à 21 heures (RLiR 42 (1978), 156).
5. – J’ai un début de bronchite, révèle-t-elle [une concierge lyonnaise], c’est la saison,
ces derniers jours il en tombait comme qui la jette et pour aller d’ici à la porte d’allée, je me trempais comme une soupe. (San-Antonio, Le Standinge selon Bérurier, 1970 [1965], 269-270.)
□ Avec un commentaire métalinguistique incident.
6. – Minute, on va vérifier s’ils crèchent [= habitent] dans l’immeuble.
J’ouvre la porte d’allée (comme on dit là-bas [à Lyon]) et actionne ma petite torche électrique pour passer en revue les boîtes aux lettres du couloir. (San-Antonio, Le Casse de l’oncle Tom, 1987, 188.) ◆◆ commentaire. Par restriction de fr. allée "passage entre deux murs, qui conduit de l’entrée d’une maison à l’intérieur ou dans
la cour" (dep. 1456, à Tournai, FEW). Attesté dans le syntagme porte d’allée au 19e siècle (1804 dans Moi, Joseph Mosneron, armateur négrier nantais (1748-1833), publ. par Olivier Pétré-Grenouilleau, Rennes, Éd. Apogée, 1995, 92) ; Jouy 1811,
Hugo 1862 et Goncourt 1890 – tous les trois dans Frantext), il s’agit donc d’un archaïsme ; il est relevé dans le français du Rhône dep. 1688
(« Au fond de l’allée, en entrant en lad. maison, il y a une chambre », Inventaire à Lucenay, dans Gonon MélGossen 1976, 289) ; ca 1800 dans la lexie allée qui traverse (« on ne dit pas, comme à Lyon, une allée qui traverse, mais une allée de traverse » AnonymeHippolyteF s.v. aleyo). Ce sens précis semble aujourd’hui circonscrit, en France, à Lyon et à certaines
villes de sa zone d’influence ; il n’est pas pris en compte dans les dictionnaires
généraux en dehors de NPR 1993-2000, qui le donne comme « région. (Suisse) » (GPSR le date de 1786-87 ; il est absent de Lengert 1994 et de DSR 1997).
◇◇ bibliographie. PuitspeluLyon 1894, allée qui traverse (repris dans VachetLyon 1907, MiègeLyon 1937 et CottetLyon 1996) ; JamotChaponost
1975, 61 ; RLiR 42 (1978), 155 (Grenoble, Lyon, St-Étienne) ; MalapRég 1981, 135 ;
FréchetMartVelay 1993 ; VurpasLyonnais 1993, dans la métalangue s.v. traboule ; SalmonLyon 1995 porte d’allée (avec ex. de San-Antonio, s.d.) ; FEW 24, 420a, ambulare.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Ain, Drôme, Isère, Loire, Rhône, 100 % ; Ardèche, 30 %.
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