cours n. m.
〈Surtout Rhône, Isère (Vienne), Provence〉 usuel "avenue, le plus souvent plantée d’arbres, utilisée dans les villes comme lieu de promenade
ou de passage".
1. Ils marchèrent sur le cours National où le goudron était plus doux aux jambes. (R. Sabatier, Les Noisettes sauvages, 1983 [1974], 157.)
3. – Si on doit être à huit heures au cours Saint-Louis, on a intérêt à se grouiller. (Ph. Carrese, Graine de courge, 1998, 70.)
3. À Aix-en-Provence, c’est mars : l’air vous a un relent de printemps tôt venu. […]
/ […] le va-et-vient des voitures sur le cours Mirabeau […]. (É. Holder, Nouvelles du Nord et d’ailleurs, 1998, 27-28.)
4. Samedi matin, jour de marché sur le cours Mirabeau, à l’ombre des platanes. […] Nous sommes à Marignane. En Provence. (Télérama, 7 octobre 1998, 8.)
5. Il faudrait assister aux lents entretiens sur les pierres des bancs du « cours », véritable agora, ou bien aux heures de papotage dans les cafés. C’est là que « l’opinion publique » prend consistance. (J. Onimus, Les Alpes-Maritimes, 1999, 98.)
V. encore s.v. minot, ex. 16.
□ Avec un commentaire métalinguistique incident.
6. Et c’est vrai que l’ensemble urbain xviiie siècle de Bordeaux est extraordinaire, avec le Grand Théâtre de Victor Louis, le
front-de-fleuve, les « cours » (avenues) et allées, la rue piétonne Sainte-Catherine […]. (Le Monde, 1er juin 2000, 29.)
□ En emploi autonymique.
7. Et si [à Lyon] les grandes avenues de la presqu’île et de la rive gauche du Rhône
sont presque toutes rectilignes, elles portent souvent le nom désuet de cours (de l’italien corso) comme Gambetta, Lafayette, Vitton, Charlemagne, de la Liberté, ce qui est une façon,
douillettement provinciale, de n’être pas boulevardières. Tant pis pour les enfants
du paradis, tant mieux pour les gones* de La Guillotière. (R. Belleret, dans Le Monde, 3 avril 1997, 2.)
■ prononciation. Le centre-ville de Vienne (Isère) connaît le cours Romestang et le cours Brillier ;
contrairement à l’affirmation de ArmanetVienne 1989 (« Il importe de bien prononcer “coursss”, si l’on ne veut pas passer pour un étranger »), la prononciation usuelle est [kuʁ] (comm. de J. Serme).
■ encyclopédie. « […] chaque ville provençale possède une allée ombragée, établie ou non sur l’emplacement
d’anciens remparts ; depuis une dizaine d’années seulement les petites villes ont
donné un nom à cette avenue (p. ex., à Istres, le Cours > Cours Jean-Jaurès) ; à Marseille
“le Cours” suffisait encore, il y a encore [sic] 40 ans, à désigner le Cours Belzunce ; à Aix, où le Cours Mirabeau est le seul à
porter cette dénomination, on disait encore “le Cours”, tout simplement, vers 1920 […] » (Ch. Rostaing, « Le français de Marseille dans la “trilogie” de Marcel Pagnol », FrMod 10 (1942), 12).
◆◆ commentaire. Si le sud-est de la France n’a pas le monopole de cette désignation dans le vocabulaire
odonymique (ainsi le Cours-la-Reine, à Paris ; le Cours Dajot, à Brest ; le Cours des 50 otages, à Nantes ; le Cours Léopold, à Nancy ; le Cours Sablon, à Clermont-Ferrand, le Cours Lassus et le Cours Palmarole à Perpignan, le Cours Fénelon et le Cours Montaigne à Périgueux, etc. ; v. encore ici ex. 6 et s.v. marque-mal, ex. 8), elle y revêt une fréquence caractéristique. Après avoir donné le sens classique
"lieu agréable qui est un rendez-vous pour se promener à certaines heures à cheval
ou en voiture, et qui est ordinairement en dehors de la ville" (avec ex. notamment de La Bruyère et de Saint-Simon), Littré ajoute "nom de promenades publiques dans des villes". Le terme est enregistré dans les dictionnaires généraux contemporains sans marque :
GLLF (mais exemples de Daudet et Zola) ; Rob 1985, sans ex., signale aussi « région. faire le cours : se promener sur le cours » ; TLF, ex. de Stendhal 1838a et de Daudet 1869b ; NPR 1993-2000 ; Lar 2000.
a L’exemple est pourtant porteur d’une indication diatopique nette : « Je me suis mis à errer [à Bordeaux] dans les environs du magnifique cours d’Aquitaine
(nous appellerions ça à Paris boulevard d’Aquitaine). »
b Attestation concernant Marseille au 18e s. : « La Ville-Neuve, c’est ainsi qu’on appelle la partie qu’on a ajoûté depuis cinquante,
ou soixante ans à l’ancienne Ville [Marseille], est très-belle. Sa principale ruë
qu’on nomme le Cours, parce parce [sic] qu’il y a une rangée d’arbres de chaque côté, est droite, longue, & fort large ;
les maisons des deux côtez sont à quatre étages, avec des façades uniformes, & toutes
de pierres de taille fort blanche. C’est dans cette ruë que tout le peuple de Marseille
s’assemble le soir pour prendre l’air, sçavoir des nouvelles, & danser » (J.-B. Labat, Voyages du P. Labat, de l’ordre des FF. Prêcheurs, en Espagne et en Italie, Amsterdam, Aux dépens de la Compagnie, t. 2, 21 ; comm. de P. Enckell, qui précise
« ce voyage a été fait en 1706 »).
◇◇ bibliographie. GabrielliProv 1836 « prononcez cour, sans faire sentir le s final. […] Se promener sur le courǀs » ; MichelDaudet, 153 « Ce terme existe à Paris (cf. “le Cours la Reine”), mais il est plus rare que dans le Midi et n’est pas employé comme nom commun » ; BrunMars 1931 « prononcer l’s final » ; RostaingPagnol 1942, 121 ; ArmanetVienne 1984 ; absent de FEW s.v. cursus.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
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