traverse n. f.
〈Saône-et-Loire, Côte-d’Or, Doubs, Jura, Haute-Savoie, Savoie, Ain, Rhône, Loire, Isère,
Drôme, Gard, Ardèche, Haute-Loire, Puy-de-Dôme〉 usuel "vent qui souffle de l’Ouest". La traverse, c’est vers Boucoiran et Sauzet (L. Chaleil, La Mémoire du village, 1989 [1977], 197).
1. Cet après-midi-là, à Mézilhac [Ardèche] on enterrait la veuve de la route d’Aubenas.
La traverse avait remplacé la Burle*, glissant au passage sur une neige molle et sale, giflant les visages, faisant larmoyer
les yeux, s’égoutter les narines, fumer les haleines. (J. Durand, Les Contes de la Burle, 1993 [1974], 125.)
2. Le vent dominant, en toutes saisons, vient de l’ouest, c’est la « traverse » qui amène la pluie, le mauvais temps. (A. Pourrat, Traditions d’Auvergne, 1976, 11.)
3. Dès que la pluie tombe, la « traverse » s’apaise, le lendemain, la bise* règne à nouveau et les choses ont repris leur cours normal. (Th. Bresson, Le Vent feuillaret. Une enfance ardéchoise, 1980, 9.)
V. encore s.v. fenestron, ex. 14 ; mâchurer, ex. 6.
□ En emploi métalinguistique ou avec/dans un commentaire métalinguistique incident.
La traverse, ce vent d’Ouest qui amène la pluie et qui est ainsi appelé parce qu’il
souffle en travers de la vallée du Rhône (CottetLyon 1996).
4. Ce plateau connaît de fréquentes et violentes tempêtes de neige. Lorsque souffle la
« traverse » – les vents d’ouest – on s’y croirait transporté dans le grand Nord. (G. Bayssat,
Et l’Auvergnat vint au monde en dansant, 1998, 13.)
5. On a un vent d’ouest qui arrive sur Bourdeau : il s’appelle « la traverse ». En trois minutes, le lac [du Bourget] est entièrement démonté. (Témoignage recueilli
à Bourdeau, Savoie, dans J.-N. et Ph. Deparis, La Place du village, 1998, 137.)
6. Vent d’ouest porteur de pluie, la traverse, qui souffle en rafales, est modérée à assez forte. Humide et tiède en été, elle s’accompagne
d’ondées et d’orages, en particulier sur les versants montagneux orientés à l’ouest.
Au printemps et en hiver, ce vent froid amène de brusques averses, de la grêle ou
des giboulées de neige. C’est un vent de grains, surnommé vent d’Arsine à Monêtier-les-Bains [Hautes-Alpes], vent de Montmélian sur la rive gauche de l’Isère ou encore vent d’Armenaz du côté d’Albertville [Savoie]. (Philippe Villette, « Bon vent… », L’Alpe, n° 6, hiver 2000, 42-43.)
V. encore s.v. bise, ex. 23.
— Dans le syntagme vent de (la) traverse.
7. Et puis le soleil printanier saupoudra d’or vierge les forsythias du presbytère… le
vent-de-traverse épongea les mouillères du ciel… (R. Semet, Les Argyronètes, 1976, 75.)
■ remarques. 〈Lozère, Limousin, Dordogne〉 vent de traverse ou vent de travers peu usuel "vent du Nord-Ouest".
◆◆ commentaire. Ce type lexical couvre une vaste aire francoprovençale et occitane d’allure rhodanienne
(FEW ; Alleyne RLiR 25, 1961, 119 [carte], 122 ; ALLy 768 ; ALAL 34, 34*). Également
bien attesté en français, dep. le mil. 14e siècle (Entrée d’Espagne, TLF), il est en usage dans une aire compacte qui s’étend du sud de la Franche-Comté
au Gard. Seul dictionnaire général contemporain à l’enregistrer, le TLF ne fait pas
ressortir son caractère régional de façon adéquate « Météor. Vent d’Ouest dans le Centre [sic] de la France ».
◇◇ bibliographie. DuPineauV [ca 1750] ; Legrand d’Aussy, Voyage fait en 1787 et 1788 dans la ci-devant Haute et Basse Auvergne…, 2, an II, 160 ; VillaGasc 1802 la travèsse ; MolardLyon 1803-1810 ; OffnerGrenoble 1894 ; PuitspeluLyon 1894 « Je crois que nous avons emprunté le mot aux Foréziens, qui ont donné ce nom au vent
d’ouest parce qu’il prend en travers de la plaine du Forez » ; FertiaultVerdChal 1896 tràvasse ; ConstDésSav 1902 ; GuilleLouhans 1894-1902 ; Mâcon 1903-1926 ; R. Michalias, Chants des montagnes, Ambert, 1904, 107 (en italique, pour traduire traverso) ; PrajouxRoanne 1934 ; BaronRiveGier 1939 ; DuraffVaux 1941 ; GarneretLantenne 1959 ;
JamotChaponost 1975 ; ManteIseron 1980 ; RouffiangeMagny 1983 ; TuaillonRézRégion
1983 (Loire) ; TuaillonVourey 1983 « constant » ; GononPoncins 1984 ; MeunierForez 1984 ; DuraffHJura 1986 « très usuel » ; JaffeuxMoissat 1987 s.v. traverso ; ChassanyMétéo 1989 « dans le Vivarais » ; MartinPilat 1989 « usuel à partir de 20 ans » ; DucMure 1990 ; BessatGerMtBl 1991 ; CampsLanguedOr 1991 ; DromardDoubs 1991 et
1997 vent de la traverse ; TavBourg 1991 « usuel en Saône-et-Loire, surtout en Bresse ; connu en Côte-d’Or (plaine de la Saône) » ; ColinParlComt 1992 ; VurpasMichelBeauj 1992 « emprunté au patois ; usuel » ; BlancVilleneuveM 1993 ; FréchetMartVelay 1993 ; VurpasLyonnais 1993 « bien connu » ; FréchetAnnonay 1995 « globalement bien connu » ; SalmonLyon 1995 ; CottetLyon 1996, 181 ; MazodierAlès 1996 ; FréchetDrôme 1997
« globalement connu » ; FréchetMartAin 1998 « usuel à partir de 60 ans, connu au-dessous » ; MichelRoanne 1998 « usuel au-dessus de 60 ans » ; ChambonÉtudes 1999, 139 (Pourrat, Gaspard des montagnes) et 238 ; FEW 13/2, 222b, transversus.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Ain, Ardèche, Drôme, Haute-Loire (Velay), 100 % ; Loire,
60 % ; Haute-Savoie, 65 % ; Rhône, 30 % ; Isère, 0 %. (vent de traverse) Dordogne, 25 % ; Corrèze, 20 % ; Creuse, Haute-Vienne, 0 %. (vent de travers) Haute-Vienne, 30 % ; Corrèze, 20 % ; Dordogne, 10 % ; Creuse, 0 %.
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