côtis (et var.) n. m.
〈Saône-et-Loire, Côte-d’Or, Lorraine, Franche-Comté, Moselle (est), Alsace〉 usuel "morceau de viande de porc constitué de plusieurs côtes coupées en travers et que l’on
consomme frais ou salé". Synon. région. coustélous*. – Jambons, côtis, porc sans rival (R. Begeot, « Sonnet au cochon », dans R. Begeot et al. Contes comtois des rois René, 1978, 199). Cotis de porc frais ou salés (Dernières Nouvelles d’Alsace, 19 septembre 1996, n. p.). Des côtis frais et longs (Dernières Nouvelles d’Alsace, 16 octobre 2000, TE 7).
1. […] la potée bourguignonne, préparation faste réservée aux jours de fête – marmite
où trônent le jarret de porc, le coti (petit salé), le saucisson à cuire, le cervelas, les légumes de saison et les pommes
de terre. (Les Maîtres cuisiniers de France, Les Recettes du terroir, 1984, 105.)
2. Quant aux côtis, jambons, palettes, bajoues et autres morceaux, ils subissaient le passage à la saumure,
puis, après une dizaine de jours, on les en retirait, car ils devaient aller rejoindre
les saucisses à la faveur du doux feu de l’âtre. (L. Renoux, Un village alsacien-comtois aux années vingt, 1984, 48.)
3. Cette fois, la découpe pouvait s’achever à l’intérieur de la maison pour l’extraction[,]
successive et méticuleuse, des jambons et jambonneaux, de la panne, des filets et
des pointes, de la poitrine et du carré, des côtis et de l’échine, tout cela fleurant bon la chair fraîche et tiède, promesse de régals
à venir. (J. Reyboz, Douceur d’automne, 1984, 133.)
4. Une odeur de viande fumée emplissait la maison. / – Mange avec nous, dit Oscar… des
haricots secs et des « côtis ». (Y. Charpiot-Riche, Marie des Vosges, 1987, 93.)
5. Cotis grillés / Salade de pommes de terre ou choucroute. (Carte de La Cour des Chasseurs, La Wantzenau [Bas-Rhin], 27 janvier 1992.)
6. Je vais mettre une bonne soupe de choux avec du lard et pis des côtis, de la saucisse avec une salade […]. (P. Jeune, dans Barbizier, Bulletin de liaison de folklore comtois, n.s., n°19, octobre 1992, 259.)
7. À côté des habituels presskopf*, bouchées à la reine, salades* mixtes et autres wädele [= jambonneaux], […] les tripes au riesling, les côtis salés, les lentilles au lard avec palette […]. (G. Pudlowski, Dernières Nouvelles d’Alsace, éd. Strasbourg, 26 février 1999, TE 2 [Chronique sur le restaurant L’Ami Fritz à Sarrebourg, Moselle].)
— Souvent en emploi non-comptable. Du côtis frais (E. Bailly, bouchère, ca 30 ans, Ronchamp [Haute-Saône], enq. orale, 15 juin 1993).
8. D’abord la potée avec du lard épais comme timon de char, du côtis, puis la poule en sauce blanche, grasse comme nonnette, puis le rôti qui pouvait bien
être une oie qui avait échappé au regingot [= repas de fête] de Noël et du Jour de
l’an. (H. Vincenot, La Billebaude, 1978, 121.)
9. Il y a le geste traditionnel de faire « porter » […] par un enfant, l’assiette de faïence blanche où, sous le torchon, se découvrent
invariablement le boudin noir, le morceau de rôti ou de « cottis ». (Y. Verdier, Façons de dire, façons de faire, 1979, 34.)
10. 1 livre de côti / 300 g. de lard maigre fumé. (P. Fischer, Toute la gastronomie comtoise, 1981, 106.)
V. encore s.v. râpé, ex. 4.
■ prononciation. [koːti] en Bourgogne et en Franche-Comté ; [koti]/[kɔti] en Alsace.
■ graphie. La graphie du mot est fluctuante : à côté de la graphie étymologique côtis et de côti (v. ici ex. 10 ; H. Vincenot, Le Pape des escargots, 1972, 31 ; DuraffHJura 1986 ; TavBourg 1991), on trouve cottis (v. ici ex. 9), coti(s) (cf. ex. 5, correspondant à la prononciation alsacienne, et ex. 1), voire côtys pl. (Histoires et traditions du Doubs, 1982, 218).
◆◆ commentaire. Mot de forte vitalité (chez les adultes surtout) dans la zone où il est attesté. Dérivé
sur fr. côte à l’aide du suffixe ‑is à valeur collective (cf. Bald 182-184) ; Grafström (AM 77, 230) propose, probablement
à tort, une autre suffixation, en rapprochant d’aocc. costil "côte de porc" (= *costilh < costa + -iîculu). Le caractère aborigène de la formation paraît garanti par la première attestation,
en 1582 (« un bon jambon, des andouilles, des cotis, des poix au lard »), chez le Dijonnais Tabourot des Accords (Huguet, sans définition ; à biffer FEW 21, 488a ‘mets’, sans définition), lequel est très probablement la source de Cotgr 1611 (cotis, seule apparition dans la lexicographie générale), v. Chambon dans Hommages à Paul Fabre, Montpellier, 1997, 119. Le mot est relevé au 19e siècle dès les premiers recueils de régionalismes (MulsonLangres 1822, cotis ; CunissetDijon 1889, côtis ; BeauquierDoubs 1881, côtis ; CorbisBelfort 1883, côti ; cf. aussi av. 1915, côtis, Pergaud, Œuvres complètes, 977). Le fait qu’il soit inconnu du français de la Suisse Romande comme des parlers
dialectaux de cette zone (Ø GPSR ; Ø FichierCDNeuch) semble suggérer de même une formation
relativement récente, diffusée peut-être à partir de la Bourgogne (cf. la zone d’implantation
dialectale homogène dans ALB 1162 et plus sporadique en Franche-Comté, cf. ALFC 684*) ;
le français d’Alsace est tributaire de la variété belfortaine. L’opacification de
la dérivation explique les hésitations de la prononciation et de la graphie.
◇◇ bibliographie. GuilleLouhans 1894-1902 côtis ; CollinetPontarlier 1925, côtis ; GarneretLantenne 1959 les côtis ; BichetRougemont 1979 cotis ; RouffiangeMagny1983 ; DuraffHJura 1986 côti ; TavBourg 1991 côti ; TrouttetHDoubs 1991 le côtis ;ValMontceau 1997 côti(s) ; Saint-Dié (comm. de Chr. Tetet) ; Lorraine (« très fréquent sur les étiquettes des boucheries artisanales ou de grandes surfaces », comm. d’A. Litaize) ; FEW 2, 1246a, costa.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissancea : Moselle (est), 75 % ; Haut-Rhin, 20% ; Bas-Rhin, 15 %.
a La faible reconnaissance du mot en Alsace est probablement dû au fait que les enquêtes
y ont été faites principalement auprès d’étudiants : il apparaît en fait sur les étiquettes
de maint étal de boucheries-charcuteries et sur bien des cartes de restaurants de
type brasserie.
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