fête votive loc. nom. f.
〈Hautes-Alpes, Provence, Gard, Hérault, Haute-Garonne, Tarn (spor.), Tarn-et-Garonne (spor.), Lot, Aveyron, Lozère, Ardèche, Cantal, Limousin, Dordogne〉 usuel "fête annuelle du village". Synon. région. assemblée*, ducasse*, festin*, frairie*, kilbe*, messti*, reinage*, romérage*, vogue*, vote*. – Bal des fêtes votives (Chr. Dardé, Moi, Justine, enfant de l’Assistance Publique, 1992, 156). La fête votive d’Ayguesvives [Haute-Garonne] (Huguette Bouchardeau, France-Culture, 9 mai 1996, 7 h 05). La clairière […] où se tenaient habituellement les fêtes votives (J.-P. Chabrol, La Banquise, 1999 [1998], 118). Prix de beauté lors de la fête votive de la commune (M. Massalve, Marie du fond du cœur, 1998, 21).
1. Comme les fêtes votives, tous les ans, aux mêmes époques ont lieu les foires du canton. (D. Lavaud-Ribette,
Mœurs et coutumes actuelles dans un canton du Périgord [Saint-Astier] [1961], Lou Bournat, 1985, n° 4, 26.)
2. Si le type reinatše est en train d’envahir le type boto, la chose est due essentiellement à l’influence des fêtes votives de la région de Marvejols et de Mende et en particulier à celle de Marvejols qui
draine toute la jeunesse du pays […]. (CamprouxEssai 1962, 747.)
3. – […] En 1962, à Cannes, à la fameuse époque, il m’a bassiné pour que je lui refile
celui [porte-clé] que j’avais en souvenir d’une fête votive de Marseille. (L. Malet, Nestor Burma en direct, 1990 [1962], 520-521.)
4. Cependant, pour la fête votive du premier dimanche d’août, il ne pouvait pas refuser de participer au Grand Concours
[de pétanque] doté de nombreux prix organisé par la Municipalité. (Y. Audouard, Ma Provence à moi, 1968, 145.)
5. Lou Roudas / Cette manifestation pittoresque, héritage de nos aïeux[,] avait lieu
les soirs d’élection et la veille de la Saint-Jean, fête votive de Chanac. (Mme Scheidbach-Pagès, « Lou Roudas », Lou Païs 149, novembre 1968, 194.)
6. Les fêtes votives des paroisses, les votes*, s’égrenaient au long de l’été déclinant, trêves aux gros travaux, dans la sécurité
des premières récoltes, la joie des belles journées et des nuits sereines. La jeunesse
s’y rendait à pied, en bandes, et ça faisait sur le chemin comme de vives traînées
de dimanche. (M. Chaulanges, Le Roussel, 1972, 112.)
7. Chaque année tu feras pour la fête votive
Un retour solennel aux coutumes d’antan Et tu revêtiras la blouse au point d’épine Avecques le chapeau au grand bord si seyant. (« Commandements de l’Illustre Confrérie [de la Pouteille et des Manouls (La Canourgue)] », Lou Païs 197, décembre 1973, 293.) 8. La fête votive, la « vote »*, se déroulait toujours le 24 août, au moment de l’ancienne foire, n’avait pas changé
depuis des siècles. Maintenant ils l’ont mise le quatorze juillet. (L. Chaleil, La Mémoire du village, 1989 [1977], 285.)
9. À Albaret, le jour de la Saint-Barthélémy, patron de la paroisse, on faisait une procession
jusqu’à la croix du Couder. Elle était suivie d’une fête votive avec jeu de quilles, courses à pied et bal. (M.-C. Fourcade, « Civilisation locale traditionnelle : Lachamp et Albaret-le-Comtal (Lozère) », Bïzà Neirà 37, 1983, 31.)
10. Il était une fois un jeune de Crespin qui s’appelait André. Il alla à la fête votive du Port-de-la-Besse, là-bas sur les rives du Viaur. (J. Boudou, Contes, traduit de l’occitan par Cantalausa, 1989, 294.)
11. vinezac / 20-21-22 août [1993] / fête votive. / vendredi 18 h 00 Concours de Pétanque Doublette / […] / 21 h 00 Bal gratuit avec C T S Sono / samedi 16 h 00 Concours de Pétanque Doublette / […] / 21 h 00 Bal gratuit avec C T S Sono / dimanche 16 h 00 Concours de Pétanque Triplette / […] / 21 h 00 Bal gratuit avec C T S Sono / tirage de la tombola / attractions foraines. (Affiche, Ardèche, 1993.)
12. Mon plus ancien souvenir de taureaux, ce sont les courses pour la fête votive à Aureille. (L. Merlo, J.-N. Pelen, Jours de Provence, 1995, 96-97.)
13. Pandrignes / Fête votive / La fête votive aura lieu le week-end des 7 et 8 octobre avec un bal le samedi soir. Le dimanche
matin, le foyer renouvelle l’expérience de la foire à la brocante à partir de 9 heures
[…]. L’après-midi, activité traditionnelle avec randonnée VTT, courses d’ânes et thé
dansant à partir de 17 heures. (La Montagne, éd. Tulle, 21 septembre 1995.)
14. le monastier / pin-moriès / Grande Fête Votive 96 / dans le cadre de verdure du Chambon. (Affiche, Mende, mai 1996.)
15. Le souvenir de ces moissons ne cesse de me hanter. Il me rattrape chaque été, à l’occasion
des fêtes votives où l’on veut attirer les touristes, car il est devenu à la mode de présenter un spectacle
de moissons à l’ancienne. Cette farce me remplit de fureur. J’y vois des hommes feignant
de réaliser les gestes qui les nourrirent jadis, singeant ce qu’ils possédaient de
plus sacré : le travail pour le blé et le pain. (Chr. Signol, Bonheurs d’enfance, 1998 [1996], 99.)
● Except. avec l’adjectif coordonné à un autre adjectif ou détaché du nom.
16. Les fêtes votives et patronales (M. Carlat, « Les fêtes populaires et religieuses », dans M. Carlat (dir.), L’Ardèche, 1985, 357).
17. Hervé Fabre-Aubrespy […] s’emploie à capitaliser le travail de fourmi qu’il accomplit
depuis 1993 en assistant à toutes les fêtes paroissiales, votives et républicaines de la circonscription [Gardanne, Bouches-du-Rhône], mais il doit
aussi rappeler, y compris à des gens qui se disent ses amis, qu’une élection aura
lieu bientôt. (M. Samson, « La compétition s’annonce vive à Gardanne entre Bernard Kouchner et le candidat communiste », Le Monde, 4 octobre 1996, 9.)
□ Avec ou dans un commentaire métalinguistique incident. Voir s.v. festin, ex. 6 ; vogue, ex. 18 ; vote, ex. 4.
◆◆ commentaire. Création moderne cultivée du français méridional, d’aire large, s’étendant (en partie)
sur les aires des types dialectaux fèsta, frairie, reinatge, romeratge, vòga, vòta (cf. ALF 556). Ayant eu d’abord le sens de "fête patronale" (dep. 1668 [Rouergue], Affre 159b ; Languedoc 1756, Sauvages, RézeauNorm 209 ; Rouergue
1784, RevRouergue 33, 31 ; Cahors 1786, Chr. Constant-Sturm, Journal d’un bourgeois de Bégoux : Michel Célarié, 1771-1836, Cahors, 1982, 93 ; Esclassan [Vivarais] 1868, Carlat, op. cit., 358 ; Rouergue 1898, RevRouergue 1990, 258 ; Corrèze 1898, Gennep 184 ; encore ex. 6),
ce néologisme a probablement pris naissance dans la zone d’occ. vòta "fête patronale" (dep. 1567, FEW 14, 637b ; ALF 556). La dérivation de votive sur occ. vòta / fr. vote (régional, attesté dep. 1569, JournFaurin 51, à Castres ; VillaGasc 1802, RézeauNorm
209), dont le lien avec lat. votum était perçu par les doctes, s’est faite sur le modèle de lat. votivus et de fr. général votif (emprunt attesté dep. Monet 1636) au prix d’une extension de sens (= "(fête du saint) auquel la localité a été vouée")a ; cf. stand. fête patronale (dep. Cotgr 1611, FEW 8, 25b). Le processus de formation montre que la lexie est d’origine savante et cléricale,
la langue de l’Église ayant été le facteur déterminant dans son accession à (et de
son maintien dans) la norme (supra-)régionale. Bien qu’ayant été parfois légèrement
stigmatisé (« expression faite à plaisir qu’on n’entend dire que dans ce pays » Sauvages 1756 ; VillaGasc 1802), fête votive, introduit dans la lexicographie générale par LittréSuppl 1877 (avec un exemple Lozère
1876), est souvent senti, même par des locuteurs cultivés, comme le terme normatif
légitime, par opposition à fr. région. vogue (v. ce mot, ex. 18), à fr. région. vote, ainsi que le montrent les ex. 6 et 8 ci-dessus (cf. encore Chaulanges, Les Mauvais Numéros, 1971, 105 ; Dauzat, Le Village et le paysan de France, 1941, 153 ; Cl. Latta, Le Guide de la Corrèze, 1996, 96), à fr. région. ballade (GonfroyLim 1984, 187), à fr. région. frairieb, et le fait que le mot apparaisse volontiers dans la métalangue des lexicographes
du pays (1847, CouziniéCastr 1850 s.v. boto ; 1879, VayssierAveyr s.v. bóto et bouóto ; BrunMars 1931 s.v. vote ; JamotChaponost 1975 s.v. vogue ; Alibert 1977 s.v. vòt ; MédélicePrivas 1981 s.v. vogue ; BlanchetProv 1991 s.v. romérage ; CampsLanguedOr 1991 s.v. renage ; EscoloGév 1992 s.v. reinatge ; FaraçaVans 1992, 72 (pour traduire occ. vòta), 42 (index français) ; MarconPradelles 1987 s.v. reinatge et 1, 295 ; cf. aussi 1930, SolQuercy 245) ou dans les traductions de l’occitan (v. ex. 10,
traduisant vòta ; cf. aussi, de même, Charnay éd., Procès Gaffié, 1991, 63, 77 ; traduisant reinage dans F. Remize, Contes du Gévaudan 1968, 69, 133, 135)c. On voit par ces exemples que fête votive relève d’une véritable norme supra-régionale qui non seulement transcende les anciens
types dialectaux, mais encore les dénominations françaises sub-régionales. Le sens
actuellement vivant est laïcisé. La lexie, typiquement française, a pu être, très
occasionnellement, empruntée par certains parlers dialectaux (Tarn pt 753, ALF 556) ;
son absence dans les parlers dialectaux a constitué un facteur de préservation auprès
des locuteurs insécures.
a Ce processus paraît se retrouver au niveau métalinguistique sous la plume de J. Chataing
quand il emploie pour faire l’étymologie d’Églisolles vòta le syntagme libre (et non la lexie) fête votive (du patron) : « La fête patronale est pour ainsi dire le seul jour de réjouissance populaire. On l’appelle
en patois la “vòta”, mot dérivé du latin qui signifie simplement fête votive du patron ou de la patronne
de la paroisse » (av. 1941, Autrefois la vallée de l’Ance, 1985, 53). J. Chataing ne semble pas avoir quitté sa Basse Auvergne, où fête votive est inconnu, et dans son Vocabulaire français-patois de la vallée supérieure de l’Ance, 1934, il use de fête patronale.
On remarquera, au nord de la Loire, le même emploi de fête votive (syntagme libre et non lexie) sous la plume du Breton A. Le Braz : « Notre-Dame de la Fraude eut, dès lors, son culte ; on alla jusqu'à lui instituer une fête votive, un pardon » (1901, « Le Sang de la Sirène » dans A. Le Braz, Magies de la Bretagne, Paris, 1997, t. 2, 146) ou du Vendéen Jean Yole : « Les fêtes votives ont le piquant et l'attrait des fêtes de village » (La Vendée, Paris, 1936, 15). b Cf. « On appelle frairie la fête votive ou patronale du pays » (La MazillePérigord 1929, 335).
c CamprouxEssai, 603 (cf. aussi 739), imagine même de faire dériver Lozère boto d’un latin « vot(i)va » (!). Intéressant effet d’inversion étymologique, entièrement sous l’influence de
fr. fête votive comme norme supra-régionale prise pour évident type étymologique.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Corrèze, Dordogne, 90 % ; Bouches-du-Rhône, 80 % ; Vaucluse,
65 % ; Alpes-de-Haute-Provence, Hautes-Alpes, Aveyron, 50 % ; Creuse, 45 % ; Tarn-et-Garonne,
Haute-Vienne, Var, 30 % ; Ariège, Haute-Garonne, Lot, Tarn, 0 %.
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