piat n. m.
1. 〈Lyon, Loire, Haute-Loire (Velay)〉 fam., vieillissant "morceau de tissu que l’on coud sur un vêtement pour le réparer". Stand. pièce. Synon. région. petat*. – Ce pias est mal posé, mais il tient (FréchetMartVelay 1993).
2. 〈Loire, Ardèche (nord), Haute-Loire (Velay)〉 "chiffon, étoffe, tissu". Vous regardez les pias ? (Question posée au marché de Feurs, en 1984, devant la vitrine d’un magasin de vêtements,
GononPoncins 1984). Sur le marché il y avait un marchand de pias (MartinPilat 1989).
1. Huber [un Alsacien] m’apprit à pêcher les grenouilles avec une ligne rudimentaire :
un grand bâton, une ficelle, un « piat » rouge… (M. Bailly, Le Piosou, 1980, 74.)
2. Pour tout dire avec un grand piat elles sont nippées [les filles d’aujourd’hui]. (J. Rouchouse, « Panassa » de mon enfance, 1999, 90.)
— Emploi non-comptable 〈Annonay (Ardèche)〉 "tissu de mauvaise qualité". Quand on tisse sans donner de coup de battant, c’est du pias qu’on fait ; le tissu
s’éraille (FréchetAnnonay 1995).
□ En emploi métalinguistique.
3. Et nous retrouvions aussi [à Saint-Étienne] les bruits et les cris de la rue, ceux
des petits métiers ambulants : […]
–les vendeurs de myrtilles : « Aux airelles* ! » –le chiffonnier ramasseur de peaux de lapins : « Au pattère ! » (À Sauxillanges, c’était le « Piarot » [v. peillerot] : les chiffons en gaga [= parler de Saint-Étienne] sont des « pattes »*, en auvergnat [= Haute-Loire (est)] des « piats »…). (M. Bailly, Le Piosou, 1980, 113-114.) 3. 〈Loire, Isère, Gap (Hautes-Alpes)〉 vieilli "couche de bébé". Maintenant on ne met plus de pias aux bébés, tout le monde achète des couches qui
se jettent (GermiLucciGap 1985).
■ remarques. Le petit nombre d’exemples écrits et les hésitations sur la graphie indiquent un mot
cantonné au code oral.
◆◆ commentaire. Emprunt récent au frpr. (dep. 1907, VachetLyon), sans adaptation phonétique. 1. 2. et 3. reprennent le sémantisme des dialectes frpr. et pr. alpin avec toutefois un appauvrissement
de certains emplois (v. dial. stéph. pia "pièce d’étoffe ; chiffon, loque" ; "morceau" en général, au fig. "une part" VeÿStEtienne ; StrakaPoèmesStEt) ; par ailleurs l’aire de fr. pia est en nette régression par rapport à l’aire dialectale (ALJA 1345 ; ALLy 973 ; ALLy
5, 653 ; ALF 1839, avec des réserves pour le sémantisme). Ces traits signalent un
type lexical aujourd’hui vieilli, cantonné dans le domaine de la vie domestique, et
en concurrence avec d’autres types lexicaux, notamment petat* (issu également de lat. pittacium emprunté au grec de l’Italie méridionale, et qui a supplanté, à partir du Languedoc,
les types pia et peda, héritiers – sans passage par le lat. –, de gr. pitkion < pittkion "lambeau") et patte*. Les trois emplois paraissent s’articuler autour de Saint-Étienne ; l’usage de piat décroissant en dehors de l’aire d’influence de la ville ouvrière, celle-ci a probablement
contribué à la survie du terme.
◇◇ bibliographie. FEW 8, 615a, pitacium s.v. pittacium 1 a ; VachetLyon 1907 pia, pias, piat « assez rare » (1) ; BaronRiveGier 1939 piat ou petat (1) ; DornaLyotGaga 1953 piat « on entend aussi, mais plus rarement, un petat » (1) ; GononPoncins 1984 pia (1, 2) ; MeunierForez 1984 piat (1) ; GermiLucciGap 1985 pias pl. « mot souvenir » (3) ; MartinPellMeyrieu 1987 piat « mot vieilli » (3) ; MartinPilat 1989 pias « usuel à partir de 40 ans, en déclin au-dessous » (1, 2, 3) ; DucMure 1990 pia (3) ; FréchetMartVelay 1993 pias « utilisé dans l’est du domaine » (1) ; FréchetAnnonay 1995 pias « globalement connu » (2) ; SalmonLyon 1995 (non documenté pour l’emploi contemporain : la source reprend
les graphies de VachetLyon 1907 et le seul ex. cité est de 1928) ; CottetLyon 1996,
166 pia, piat (1) « plus couramment un petat » ; PlaineEpGaga 1998 piat « encore utilisé » (1).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
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