ressembler v. tr.
〈Aisne (nord-est), Ardennes, Lorraine, Bourgogne, Franche-Comté, Ain, Rhône (Beaujolais),
Loire, Savoie, Drôme, Languedoc, Ardèche, Haute-Loire, Puy-de-Dôme (Thiers)〉 fam. ou pop. "ressembler à qqn". Synon. région. donner d’air*/de l’air*, sembler*, tirer* (II.2). – Va t’habiller autrement, que* tu ressembles je ne sais quoi (MédélicePrivas 1981).
1. Je vois encore leur étonnement de me trouver installé à la Mairie. Ça ne ressemblait guère le petit commis craintif qu’ils avaient connu. (D. Lagru, Écrits divers et autobiographiques, 1974, 98.)
2. Oh, c’est un beau gosse ! / Il r’ssemble son père, tout pic* ! (L. Semonin, La Madeleine Proust, 1990, 152.)
■ remarques. Cette construction semble rare à l’écrit, probablement parce qu’elle est ressentie
comme fautive (et peut difficilement être exploitée stylistiquement).
◆◆ commentaire. Ressembler qqn (dep. ca 1100, TLF) a été progressivement remplacé par ressembler à qqn (dep. 1155, ibid.) et était considéré comme vieux au 17e s. par Vaugelas (v. GrevisseGoosse 1993, § 280, a 16) ; v. encore Féraud 1761 et 1787. Il est enregistré comme archaïque dep. Trév
1752 (mais Littré souligne qu’il est « resté populaire ») ou comme « régional » (TLF « Belgique et Thiérache » ; DHLF 1992 sans autre précision). Cet emploi transitif est encore observable en
français de France, surtout à l’oral, notamment dans quatre aires : le Nord-Est (Ardennes,
Thiérache), le Grand-Est (Lorraine, Franche-Comté, Bourgogne), les environs de Lyon
(Savoie, Beaujolais, Velay, Ardèche) et le Sud-Ouest (Gard, Haute-Garonne, Lozère) ;
on y ajoutera aussi des témoignages concernant la Belgique (PohlBelg 1950 ; PironBelg
1978), l’Acadie (A. Maillet, dans GrevisseGoosse 1993, loc. cit.) et la Suisse romande (Pierreh). Il s’agit là d’un archaïsme qui s’est conservé dans
le français de ces régions et a pénétré les dialectes dans lesquels il a été abondamment
relevé (mais on refusera de suivre le cheminement inverse, proposé par GrevisseGoosse
1993, loc. cit. : « La construction subsiste dans beaucoup de dialectes […] et de là dans les français
régionaux populaires »).
◇◇ bibliographie. BrunFrComté 1753 ; DuboisLorr 1775 ; MichelLorr 1807 ; PomierHLoire 1835 ; GabrielliProv
1836 ; FertiaultVerdChal 1896 ; ConstDésSav 1902 ; Mâcon 1903-1926 ; BoillotGrCombe
1929 ; SéguyToulouse 1950 « assez rare, sauf dans le Sud du département » ; GLLF « époque classique » ; RLiR 42 (1978), 183 (Thiers) ; MédélicePrivas 1981 « constant quel que soit l’âge des locuteurs » ; Robert 1985 « vx ou archaïque » ; LanherLitLorr 1989 ; LanherLitLorr 1990 « partout » ; CampsLanguedOr 1991 (Gard, Lozère) ; DondaineMadProust 1991 ; TavBourg 1991 « souvent utilisé transitivement » ; ColinParlComt 1992 « construction spécifiquement régionale » ; MazaMariac 1992 ; TamineArdennes 1992 « construction fréquente » ; VurpasMichelBeauj 1992 « régionalisme grammatical emprunté au patois [sic]. Usuel au-dessus de 40 ans, bien connu au-dessous » ; FréchetMartVelay 1993 « globalement bien connu […], plus vivant chez les femmes que chez les hommes » ; GagnySavoie 1993 « courant » ; GrevisseGosse 1993, § 280 a 16 « régionalisme » ; FréchetAnnonay 1995 « globalement bien connu » ; FréchetDrôme 1997 « bien connu » ; ValMontceau 1997 ; FréchetMartAin 1998 ; MichelRoanne 1998 « usuel » ; LesigneBassignyVôge 1999 ; FEW 11, 624b-625a, similare.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Doubs, 100 % ; Vosges, 85 % ; Meurthe-et-Moselle, Moselle,
75 % ; Jura, Meuse, 65 % ; Haute-Saône (nord), Territoire-de-Belfort, 65 % ; Haute-Saône
(sud), 0 %.
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