tout
II. tout partout loc. adv. 〈Surtout Nord, Pas-de-Calais, Somme, Aisne, Oise, Eure-et-Loir, Loir-et-Cher, Loiret, Saône-et-Loire
(Montceau-les-Mines), Aube, Haute-Marne, Ardennes, Lorraine, Territoire-de-Belfort,
Doubs, Loire, Provence (spor.)〉 fam. "absolument partout". Ils fouilleront tout partout (P. Magnan, L’Aube insolite, 1998 [1946], 356). Je n’ai pas trouvé de place pour m’asseoir, il y a du monde tout partout (EmrikAmiens 1958). Le rafistoler de tout partout (M. Bailly, Le Piosou, 1980, 54). Ils l’ont emmenée tout partout (L. Semonin, La Madeleine Proust, 1990, 199). Je l’ai cherché tout partout (GuilleminRoubaix 1992). Il avait mis du cirage tout partout (Belfortaine, env. 60 ans, 2 septembre 2000).
1. Enfin il [le paysan qui a quitté ses terres] finissait par conclure que tout partout les pierres sont dures, que les assurances sociales c’était beau mais ça ne payait
pas tout. (J. Garneret, L’Amour des gens, 1972 [1950], 258.)
2. Un lourd parfum de viandes et d’épices règne en maître « tout partout », jusqu’à la cave, où Doudoux s’active à remplir les dernières bouteilles. (Th. Malicet,
Debout, frères de misère, 1962, 144.)
3. Mon père m’a demandé où je m’étais fait des jambes et des bras pareils parce que le
soir après la douche toutes les écorchures par les épines […] étaient enflées et brûlaient
comme après des roulades dans la neige. J’ai dit que c’est en gym. Il a pas été chercher.
Lui aussi pendant les moissons chez mon grand-père, il était griffé tout partout à mon âge. On a la même peau. (A. Perry-Bouquet, Voilà un baiser, 1984 [1981], 29.)
4. Faut lui d’mander où il est pas allé à part ça, il est allé tout partout ! / Ben, y m’en a d’jà envoyé d’ ces cartes postales ! (L. Semonin, La Madeleine Proust en forme, 1984, 28.)
5. Mon copain Serge en avait fini avec la quête, la corbeille regorgeait de sous. Tout
d’un coup, bang ! le pauvre Serge et sa belle soutane rouge carmin à surplis blanc
trébuchent sur la première marche du chœur. V’là toutes les pièces qui se débinent
tout partout ! (Y. Hureaux, Bille de chêne, 1996, 153.)
6. Jos disparaît sans rien me dire, revient presque aussitôt, tenant dans ses bras sa
dernière fille et la couvrant tout partout de baisers. (Y. Audouard, Le Sabre de mon père, 1999, 110.)
III. tout pendant loc. fam.
1. 〈Centre-Ouest, Jura (Morez)〉 loc. adv. "tout le temps". Nous avons passé la matinée ensemble et nous avons bavardé tout pendant (RézeauOuest 1984).
2. 〈Centre-Ouest, Doubs〉 loc. prép. "toute la durée de". Cette année, il a mouillé* tout pendant le mois de juin (RézeauOuest 1984)
7. […] j’espère qu’elles vont pas causer tout pendant le spectacle. (L. Semonin, La Madeleine Proust, 1990, 182.)
3. tout pendant que loc. conj. 〈Basse-Normandie, Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique (nord), Centre-Ouest〉 "aussi longtemps que ; du moment que ; pendant que". Tout pendant que je serai vivant, il est pas question de vendre ce champ (RézeauOuest 1984). Fais donc le repas, tout pendant que je finis de faire ce travail (BlanWalHBret 1999).
◆◆ commentaire. II. Attesté dep. l’afr. (FEW), ce tour connaît dans le français de référence contemporain
certaines restrictions : il est considéré comme « pop. » (GLLF), « pop. ou régional » (Rob 1985), « pop. ou région. » (TLF, citant Pourrat). Il semble bien, en effet, qu’il ne se maintienne guère, comme
archaïsme, que dans des aires périphériques : ouest parisien (et français d’Amérique :
Dunn 1880 ; Dionne 1909 ; GPFC 1930 ; DitchyLouisiane 1932 ; PoirierAcadG, 420), nord
et nord-est de la France (et Belgique : PohlBelg 1950 ; MassionBelg 1987 ; Hanse 1994
« On a dénoncé comme un flandrisme l’expression tout partout […], courante en Belgique. C’est une vieille expression française, considérée avec
raison aujourd’hui comme redondante et populaire, mais qui survit dans plusieurs régions
de France et au Canada » ; LeboucBelg 1998), Saône-et-Loire et Franche-Comté (et Suisse romande : Pierreh),
avec quelques traces dans la Loire et la Provence ; les trois attestations les plus
récentes de la base Frantext sont Bernanos 1943, Cl. Simon 1960 et G. Matzneff 1981. III. Principalement ancrées dans le français de l’Ouest (Normandie, Haute Bretagne, Centre-Ouest)
et passées au Québec (GPFC 1930), ces locutions sont aussi de quelque usage en dehors
de cette aire (sud de la Franche-Comté) et tout pendant que a été relevé dans Céline 1936 (Frantext). Attesté dep. Saint-Simon (« Il s’étoit trouvé dans la chambre de la princesse, tout pendant que le roi y avoit
demeuré », cité dans Jaubert), il s’agit là d’un archaïsme.
◇◇ bibliographie. (II) Féraud 1761 « Tout par-tout n’est pas françois, il faut dire par-tout » ; Féraud 1788 « Anciènement on disait tout partout, et on le dit encôre en Franche-Comté, et âilleurs » ; MichelLorr 1807 ; MulsonLangres 1822 ; JaubertCentre 1864 ; MoisyNormand 1887 ;
MazeHavre 1903 ;VerrOnillAnjou 1908 ; LelongLuroué 1911, 85 et Les Contes de la gobine, 1923, 17 ; EmrikAmiens 1958 ; WolfFischerAlsace 1983 (ex. de 1852) ; LanherLitLorr
1990 ; CartonPouletNord 1991 ; GuilleminRoubaix 1992 ; ValMontceau 1997 ; LesigneBassignyVôge
1999 ; FEW 13/2, 126a, totus. – (III) JaubertCentre 1864, 659 ; VerrOnillAnjou 1908 (3) ; CormeauMauges 1912 (1) ; TuaillonRézRégion
1983 (2 et 3) (Normandie, Vendée) ; RézeauOuest 1984 et 1990 ; LepelleyBasseNorm 1989
(3) ; LepelleyNormandie 1993 (3) ; RobezMorez 1995 (1) ; BlanWalHBret 1999 (3) « fréquent à usuel » ; FEW 8, 181a, pendere.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : (II) Aisne, Loir-et-Cher (nord), Nord, Oise, Pas-de-Calais, Somme, 100 % ; Aube, Loiret,
80 % ; Eure-et-Loir, 65 % ; Haute-Marne, 25 % ; témoignages épars (Essonne, Seine-et-Marne,
Val-d’Oise). (III.3) Basse-Normandie, 60 %.
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