voir1 adv.
〈Surtout Saône-et-Loire (est), Côte-d’Or (est), Haute-Marne (est), Lorraine, Franche-Comté,
Haute-Savoie, Savoie〉 fam. "(pour renforcer un verbe, le plus souvent à l’impératif)". Stand. donc. – Ecoutez voir un peu (R. Vuillemin, Les Chroniques du « Chat bleu », 1975, 36). Regarde voir ; écoute-moi voir (GuichSavoy 1986). Dites-moi voir (DuchetSFrComt 1993). Attendez voir (ValThônes 1993). Essaie voir de faire marcher l’horloge (RobezMorez 1995). Tâche-voire [sic] de […] ne pas parler la bouche pleine (DromardDoubs 1997). Allongez-vous voir que je vous examine (Médecin, Nancy, septembre 2000).
1. – Vous boirez bien le café ? coupait ma mère.
Et s’adressant à moi : – Mets don [sic] voir la goutte sur la table. (R. Collin, Les Bassignots, 1969, 48.) 2. Faudrait voir attendre que je sache combien je gagne avant de faire des frais ! (R. Vuillemin,
Les Chroniques du « Chat bleu », 1975, 112.)
3. Les vieux prédirent une année exécrable : « Pensez voir, une année bissextile ne vaut rien de bon », disaient-ils. (L . Chapuis, Vigneron en Bourgogne, 1980, 91.)
4. – […] tâche voir de trouver deux trois brindilles pas trop humides en bordure du murger*. (P. Arnoux, La Vigne au loup, 1996, 14.)
□ En emploi métalinguistique.
5. – Ecoute voir, Lisa !
Curieuse manie de chez nous, que mêler les verbes voir et entendre, dans une expression où ils n’ont rien en commun. (Y. Turbergue, Aimé, 1984, 229.) ■ remarques. Appartient principalement à l’usage oral.
◆◆ commentaire. Si cet adverbe (dep. le 16e s., Des Périers, Littré, v. FEW), sur lequel se sont acharnés les puristes, appartient
bien au français de référence, qui le mentionne avec une simple marque « fam. » (GLLF ; Rob 1985 ; NPR 1993-2000) ou « fam. ou pop. » (TLF), son emploi dans l’est de la France (et la Suisse romande, dep. 1524, Pierreh ;
Lengert 1994) cumule une fréquence particulièrement élevée et des possibilités combinatoires
beaucoup plus variées que les stéréotypes écoute voir, regarde voir ou voyons voir. On peut donc considérer, suivant en cela les recueils différentiels, qu’il s’agit
là d’un trait qui distingue le français de Franche-Comté, de Savoie et de quelques
aires limitrophes.
◇◇ bibliographie. DuPineauR [1746-48] ; BrunFrComté 1753 donnez-moi voir ; Sauvages 1756 « voyons voir, qui en François est un pléonasme ridicule » s.v. vêirë ; DesgrToulouse 1768, 366-367 ; LagueunièreSéguier voyons voir [ca 1770] ; SchneiderRézDoubs 1786 « mot purement comtois » donnez-moi voir ; Féraud 1788 voyons-voir ; VillaGasc 1802 voyons voir ; MichelLorr 1807 ; MolardLyon 1810 ; JBCPérigord 1818 « Il n’est pas rare d’entendre dire aux habitants de la Dordogne, voyons voir, voyez voir, vous verrez voir : rien de si révoltant » ; SajusLescar 1821, 45 voyons voir, montrez voir ; MulsonLangres 1822 ; JBLGironde 1823, 161 ; DéribierHLoire 1824 voyons voir et laissez voir ; SaugerPrLim 1825 ; PomierHLoire 1835 ; GabrielliProv 1836 ; AnonymeToulouse 1875 ;
CunissetDijon 1889 ; PuitspeluLyon 1894 ; DrozBesançon 1920, 33 ; BlochVosgesMérFr
1921, 130 ; BoillotGrCombe 1929 ; ZéliqzonMetz 1930 ; PoirierAcadG voyons voir ; DuraffVaux 1941 ; PohlBelg 1950 ; RouffiangeMagny 1983 voire ; WolfFischerAlsace 1983 ; Straka MélBaldinger 1984, 247-274 ; GuichSavoy 1986 « très employé » ; DromardDoubs 1991 et 1997 voire ; J. Chaurand, Les Parlers et les hommes, 1992, 2, 139-141 ; ColinParlComt 1992 ; DuchetSFrComt 1993 ; GrevisseGoosse 1993,
§ 920 g « dans le français parlé de bien des régions » ; ValThônes 1993 ; RobezMorez 1995 « courant » ; ChambonÉtudes 1999, 257 ; LesigneBassignyVôge 1999 ; FEW 14, 330a, verus et 332a, n. 6.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
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